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FLNC : Le grand retour

Revenant aux sources de la création du FLNC en mai 1976, le FLNC Union des Combattants et le FLNC du 22 octobre remettent la clandestinité et sa vision politique au centre du jeu.

FLNC : le grand retour


Revenant aux sources de la création du FLNC en mai 1976, le FLNC Union des Combattants et le FLNC du 22 octobre remettent la clandestinité et sa vision politique au centre du jeu.

Le 25 juin 2014, le FLNC-Union des Combattants annonce qu’il va conduire « un processus de démilitarisation et une sortie progressive de la clandestinité ». Le 2 mai 2016, le FLNC du 22 octobre promet de respecter une trêve illimitée. Les deux organisations clandestines accompagnent ainsi les victoires électorales qui ont permis au nationalisme de l’emporter à l’occasion des élections municipales de Bastia (mars 2014) puis des élections territoriales (décembre 2015). Quand, en 2017, en remportant largement les élections territoriales après avoir gagné les élections législatives, la coalition Per a Corsica confirme la force électorale du nationalisme, il semble acquis que le livre de la clandestinité ouvert, durant les années 1960, avec de premiers attentats contre les biens de rapatriés d’Afrique du Nord, sera définitivement fermé. Mais, en mai dernier, une conférence de presse fait connaître la création d’une nouvelle organisation clandestine dénommée « FLNC Maghju 21 ». Des militants lourdement armés accusent les trois partis de la coalition Pè a Corsica (Femu a Corsica, Partitu di a Nazione Corsa, Corsica Libera) d’être incapables « de créer un rapport de force politique face à l’Etat » et constatent que la Corse « s’apparente à un bateau à la dérive, livrée aux appétits financiers de quelques-uns » et est menacée par une « gangrène mafieuse ».

Depuis, cette organisation n’a plus donné signe de vie. Peut-être sa brève apparition n’a-t-elle été qu’une manifestation de militants clandestins ayant considéré que leurs organisations respectives tardaient à mettre en cause les cinq années de gestion de la coalition Per a Corsica et le peu de résultats politiques obtenus au vu des revendications fondamentales du nationalisme.
Cette hypothèse est étayée par le retour sur la scène politique du FLNC Union des Combattants et du FLNC du 22 octobre qui est alors intervenu. Un retour en deux temps. En juin dernier, quelques jours avant les élections territoriales, en transmettant un texte très court à la rédaction de Corse-Matin, les deux organisations ont annoncé qu’elles livreraient leur analyse politique après le scrutin et fait une première mise au point en dénonçant « la volonté de l'ensemble des organisations publiques de noyer la Lutte de Libération Nationale dans une vision exclusivement électoraliste, « la multiplicité des apparitions clandestines sans lendemain » et « la situation éminemment préoccupante» du Peuple corse ».
Le 2 septembre de ce mois, une deuxième mise au point a été faite. Les deux organisations ont transmis à la rédaction de Corse Matin une vidéo donnant à voir la réunion de plusieurs dizaines de militants en armes, et remis un long texte mettant en cause la majorité siméoniste, dénonçant l’action de l’État, soulignant une évolution désastreuse de l’état de la Corse et de son peuple, et laissant planer la menace d’un retour à l’action violente.

Le FLNC n'a pas vocation à abandonner la Lutte

Selon les deux Fronts, le succès de Gilles Simeoni et de ses partisans ne représente qu’une victoire électoraliste qui - en devant beaucoup au vote des nouveaux arrivants et au ralliement de maires de communes traditionnellement caractérisées par des votes clanistes, en ayant rejeté le Partitu di a Nazione et Corsica Libera, en persistant à ignorer Core in fronte et en placardisant les fondamentaux de la Lutte de Libération Nationale - jette les bases d’un néo-clanisme et d’un post-nationalisme. Ce qui est ainsi résumé : « Nous pensons que nous sommes face à l'avènement d'un nouveau Clan qui a utilisé tous les ressorts de ses prédécesseurs pour se faire élire. Et il y est parvenu en édulcorant au possible son discours. »
Si la personne du président du Conseil exécutif est encore épargnée : « Sa vision moderne et ambitieuse, sa droiture morale reconnue et son charisme personnel en font un leader incontournable », il est énergiquement signifié auvainqueur de juin 2021 qu’il lui faudra répondre de la politique conduite dans le cadre de la Collectivité de Corse : « La gestion de cette nouvelle assemblée sera celle de Gilles Simeoni. » Les deux Fronts s’en prennent aussi à l’État. Celui-ci est accusé de ne tenir aucun compte des victoires électorales nationalistes et de l’arrêt durable des actions violentes. Les clandestins évoquent aussi les agressions qui selon eux affectent la Corse et menacent l’existence du Peuple corse. Sont particulièrement visées : la spéculation immobilière, les nuisances environnementales et la porosité avec la voyoucratie d’une une partie du monde économique et de la classe politique. Aux acteurs de cette porosité, il est d’ailleurs signifié que des représailles seront exercées si des militants nationalistes sont menacés ou touchés. Enfin ne sont pas oubliés les nouveaux arrivants « qui pensent être chez eux sur la terre de Corse ».

Un avertissement très clair leur est adressé : « Cette terre n’est pas la votre.» Les deux Fronts ne sont pas allés jusqu’à annoncer une reprise des actions violentes. Mais il apparaît nettement que leur communication du 2 septembre représente un dernier avertissement « Si la politique de l’Etat perdure nous reprendrons définitivement les chemins de la nuit combattante ». Ceci est certes important. Mais l’essentiel de la communication est dans sa dimension de recadrage politique. Revenant aux sources de la création du FLNC en mai 1976, le FLNC Union des Combattants et le FLNC du 22 octobre remettent la clandestinité et sa vision politique au centre du jeu. Ils le font en rappelant à l’ordre Gilles Simeoni et ses amis, en s’assignant à nouveau le rôle de garant de la sauvegarde des droits nationaux du Peuple corse et en indiquant qu’ils ne renonceront jamais quel que soit le prix à payer à ce qu’ils considèrent être leur mission historique : « À nos élus qui pensent être tranquillement assis dans le confort d'une élection écrasante, nous disons que nous attendons d'eux un engagement et une attitude plus conformes aux sacrifices qui les ont portés à la place qu’ils occupent (...) Considérer notre discrétion sur le terrain politico-militaire comme un signe d'abandon de nos valeurs a fait commettre (à) l'Etat et aux nouveaux élus une erreur politique majeure.

Le FLNC n'a pas vocation à abandonner la Lutte alors même qu'aucun des objectifs pour lesquels il a été créé n'ont été atteints (…) Comme toujours depuis cinquante ans, c’est nous qui risquons la prison. »

Pierre Corsi
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