Nouvelle- calédonie : le FLNKS en position intenable
Le bureau politique du Front de Libération nationale Kanak et socialiste ( FLNKS ) a engagé une épreuve de force avec le gouvernement.
Calédonie : le FLNKS en position intenable
Le bureau politique du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) a engagé une épreuve de force avec le gouvernement. Dans un communiqué publié mercredi 20 octobre, il a appelé à la « non-participation » à la consultation sur l’accession du territoire à la pleine souveraineté et à l’indépendance qui aura lieu à la date du 12 décembre. Dans son communiqué, le FLNKS conteste « la décision de l’État de maintenir coûte que coûte la tenue de la troisième et ultime consultation référendaire au 12 décembre 2021 ». Selon son analyse, « le gouvernement français s’entête à vouloir faire primer la campagne présidentielle dans le seul but de solder l’accord de Nouméa sous son quinquennat ».
Une position en retrait
L’accord de Nouméa du 5 mai 1998 prévoyait que trois consultations successives sur l’accession du territoire à la pleine souveraineté puissent être organisées en cas de réponse négative aux deux premières. Les deux premiers référendums ont eu lieu le 4 novembre 2018 et le 4 octobre 2020 : par deux fois, le non l’a emporté, avec 56,7 % puis 53,3 % des suffrages, pour une participation supérieure à 80 %. Ce troisième scrutin qui devrait se dérouler le 12 décembre marquera donc, quel qu’en soit le résultat, la sortie de l’organisation institutionnelle mise en place en 1998. Indéniablement, la position du FLNKS d’autant qu’il avait lui-même demandé, dès le 8 avril, la tenue de ce troisième référendum. Cette position qui marque un sérieux aveu de faiblesse est loin d’être partagée au sein de la mouvance indépendantiste. Il faut donc essayer de comprendre pourquoi le FLNKS, après avoir poussé pour qu’ait lieu ce troisième référendum, fait aujourd’hui une marche arrière précipitée. L’argument de la COVID paraît très superficiel. Cela signifierait que si la pandémie continue, le FLNKS aurait comme position de repousser une éventuelle indépendance aux calendes grecques. La vérité est que depuis un an, à la suite du long conflit provoqué par la reprise de l’usine de nickel de la province Sud, le mouvement indépendantiste a donné le sentiment d’être noyé et de ne plus rien contrôler sur son propre territoire, dans ses propres affaires. Il a fait chuter le gouvernement, mais a été incapable de désigner un nouvel exécutif ce qui a entraîné une paralysie des institutions calédoniennes pendant cinq mois. Mais plus grave, la plupart des habitants de Kanaky ont réalisé que sans la France, les instances locales auraient été incapables de faire face à la pandémie.
La réponse des loyalistes
De l’autre côté de l’échiquier politique, la coalition loyaliste Les Voix du non a annoncé qu’elle reprenait sa campagne référendaire, qu’elle avait suspendue au début de l’épidémie. Pour Calédonie ensemble, « en appelant à la non-participation à la consultation du 12 décembre, le FLNKS prend le risque de mettre le pays tout entier dans une impasse politique et de faire bégayer l’histoire ». À l’heure où cet article est écrit, le gouvernement n’a pas réagi officiellement. Lors de son déplacement, le ministre des outremers Sébastien Lecornu avait estimé que seule une situation « hors de contrôle » justifierait un report de la consultation. Une évaluation devrait être faite début novembre. Or le taux d’incidence est en forte diminution et 70 % de la population vaccinable dispose désormais d’un schéma vaccinal complet. De plus, la crise politique s’est doublée d’une crise économique et sociale. Selon le président de la chambre de commerce et d’industrie, David Guyenne, le secteur du BTP est en déroute totale. Le tourisme a été gravement touché. Faute d’accord entre les principales composantes indépendantistes, le budget du territoire a dû être mis sous tutelle par l’État ». Les comptes publics présentent un déficit de 400 millions d’euros et les comptes sociaux sont structurellement à l’agonie. Le budget 2022 va être extrêmement compliqué à mettre en œuvre. Les réformes fiscales, sociales et institutionnelles sont indispensables pour rendre le système soutenable, mais impossibles à mettre en œuvre sans la participation active des indépendantistes.
Passer au-delà de l’accord de Nouméa
Le sentiment quasi général est qu’aujourd’hui, placés au pied du mur, les indépendantistes hésitent. Leur région est devenue un enjeu entre la coalition américano-australo-japonaise d’un côté et la Chine de l’autre. Or la Chine a déjà pris des options sur l’usine de Nickel que le FLNKS a été incapable de gérer. Dans une pareille situation, l’indépendance risque fort de devenir un piège mortel pour la partie kanake sachant que la partie caldoche se rapprocherait du monde anglo-saxon. Mais d’un autre côté, il est politiquement impossible pour les indépendantistes de faire marche arrière. D’où cette position attentiste qui ne règle rien : boycotter un référendum dont ils sont les premiers artisans menaçant d’organiser des violences le jour du vote. À suivre donc…
GXC