Marcuccia : La maroquinerie comme révélation de soi
Tout nouvel atelier artisanal à Bastia
La maroquinerie comme révélation de soi
Tout nouvel atelier artisanal à Bastia, Marcucciu, malgré une concurrente de taille (elle se nomme Covid-19) propose aux amatrices ses premières créations en mars 2020. Derrière la marque, Marc Fernandes-Carvalho, jeune maroquinier de 32 ans, s’épanouit dans une discipline découverte et travaillée il y a peu, après une rencontre… avec lui-même.
Baccalauréat professionnel électrotechnique en poche, pas toujours évident de trouver le job dont on a toujours rêvé. D’autant plus quand le sentiment de n’être plus en phase reste tenace. « Dans cet univers technologique, raconte Marc, tout va très vite. En sortant de l’école, la formation nous paraît déjà obsolète. Avais-je de plus l’envie de réactualiser ces logiciels ?! Pas sûr. » Il faut cependant assurer un quotidien. De boulots dits « alimentaires » au bricolage chez des amis, Marc se découvre des aptitudes avérées pour le travail manuel.
« Il a fallu que j’attende mes 25 ans pour prendre conscience de cette facilité, pour moi déconcertante, de fabriquer avec mes 10 doigts ! » poursuit-il. Le véritable virage s’opère grâce à une rencontre qui va bouleverser le cours de sa vie professionnelle. En 2015, Marc rencontre Clémence Lévêque, créatrice des bijoux Bella Tchix, installée également à Bastia. Ensemble, ils participent à la première édition de la manifestation Creazione qui met en lumière le travail des artisans insulaires, dans les domaines de la mode et du design. Marc assiste Clémence dans la préparation de son coin boutique. Plongeon dans le grand bain des créateurs, univers riche et contemplatif ! Le jeune homme est fasciné par tout ce qui l’entoure et plus particulièrement par les réalisations de Pascal Giacomini, maroquinier orfèvre.
Cet amoureux de la matière a exploré plusieurs continents avant son retour en Corse (puis son départ) en 2011 dans son village d’enfance, Urtaca. À son contact, Marc ressent comme une révélation. « J’étais très impressionné par ses pièces, l’expérience qui s’y cachait. Curieux par nature, j’ai voulu comprendre son art. Mais c’était très difficile de saisir ce que Pascal m’expliquait ! Si je voulais moi aussi tenter cette aventure, il me faudrait suivre une formation. » Trois ans plus tard, le voici fort d’un enseignement en maroquinerie sellerie dispensé à Semur-en-Auxois en Bourgogne. « Ces 8 mois m’ont permis d’apprendre les bases du métier avec des professionnelles aguerries. J’ai surtout pris conscience des variétés infinies qu’offrait ce métier, tant dans les matières que dans les objets.
De la pochette pour dame à la housse pour matériel de chasse ! » s’amuse Marc. Mais comment débute-t-on une carrière de maroquinier ? Les créations Marcucciu sont réalisées en « couture main », il faut donc acquérir, dans un premier temps, le matériel de base. Ce dernier a été financé par la Collectivité de Corse à la demande du centre de formation bourguignon (seule collectivité qui ait accepté ce partenariat). Vient ensuite l’acquisition de machines, pour la couture des doublures essentiellement. « La conception à la main est inégalable. D’abord par le plaisir qu’elle procure ! Mais aussi en termes de résistance au temps, complète Marc. Un sac cousu main peut avoir une durée de vie de 20 ans ; cousu machine, moitié moins. » Pour le modèle Marcucciu, il a fallu près d’un mois et demi au jeune maroquinier pour en dessiner ses contours jusqu’à sa confection finale ! Alors, n’allez surtout pas dire à Marc qu’il pourrait s’aligner sur les fabrications italiennes sorties d’usine !
Pour ce passionné, la réalisation d’une série est un ensemble indissociable : l’inspiration qui peut venir « d’un vêtement, d’une architecture et même d’un nuage qui passe dans le ciel ! » ; le travail de couture lui-même et enfin la qualité du cuir. Pour cela, Marc travaille exclusivement avec des matières achetées à Lyon, la France restant leader pour la haute qualité de ses peaux.
Dans un futur, qu’il espère, proche, Marc rêve d’une boutique-atelier, où il se consacrerait pleinement à ce pourquoi il a choisi cet artisanat : l’évasion, l’élégance, le beau. Aujourd’hui, il s’est donné pour mission de « se faire connaître », une nouvelle obligation pour les artisans créateurs du XXIème siècle. Son site internet sera donc en ligne courant du premier trimestre 2022 !
Marc est pugnace. Si pour l’heure, il est obligé d’associer, en parallèle à sa pratique artisanale, un emploi salarié, il confie, sourire jusqu’aux oreilles : « Voir la joie sur le visage d’une cliente suffit à me faire oublier toutes mes courbatures ! » Quand on aime, on ne compte pas.
•
Anna Massari
[email protected]
Instagram : marcucciu_maroquinerie
Facebook : marcucciu
Vente des créations Marcucciu chez Bella Tchix, 5 rue des Terrasses, Bastia
Photographies : © Lea Eouzan-Pieri