Présidence française du Conseil de l'europe : la corse au piquet ?
Pour illustrer la présidence française du Conseil de l'Europe , 2O évènements ont été programmés dans toute la FRance. Toute la France, sauf la Corse....
Présidence française du Conseil de l’Europe : la Corse au piquet ?
Pour illustrer la présidence française du Conseil de l’Europe qui a débuté le 1er janvier et doit durer 6 mois, 20 évènements ont été programmés dans toute la France. Toute la France, sauf la Corse, et je suis surpris que cela n’ait pas soulevé plus de protestations, et c’est le moins que je puisse dire.
Car enfin, il nous faut quand même regarder les choses en face, nous n’intéressons plus grand monde aujourd’hui. Du moins si l’on en juge par l’attitude des candidats à l’élection présidentielle qui n’ont, pour le moment, guère manifesté d’intérêt pour la Corse, si ce n’est bien sûr pour préparer leurs prochaines vacances ou, à l’occasion, acquérir un terrain en bord de mer pour y construire leur résidence secondaire.
Mon tempérament plutôt optimiste m’inciterait à imaginer que, peut-être, les Corses se sont enfin rendu compte qu’ils ne trouveraient pas dans la politique la moindre raison d’espérer, et qu’ils se disposent, enfin, à puiser en eux-mêmes les ressources indispensables pour sortir de l’impasse dans laquelle notre Île est engagée. Entendons-nous bien, quand je dis qu’il n’y a pas grand-chose à espérer de la politique pour les Corses, cela couvre tout le champ de la politique, sans exception. J’ai voté, depuis 2015, et plaidé activement pour que les nationalistes puissent poursuivre, et je l’espère encore réussir, l’expérience politique d’un changement de nature de l’exercice de la politique et du pouvoir dans notre île. Les électrices et les électeurs ont accordé, il y a quelques mois une large victoire à la famille nationaliste, nonobstant l’éclatement de la coalition qui les avait portés au pouvoir, au large bénéfice du parti de Gilles Simeoni, Femu a Corsica. On pouvait espérer que cette large victoire allait convaincre le président de la République d’infléchir quelque peu son attitude. Il n’en a rien été. Les condamnés dans l’assassinat du préfet Erignac sont toujours sous le statut de DPS qui leur interdit d’être transférés en Corse, et le gouvernement a manifestement écarté volontairement l’île des manifestations auxquelles sont conviées les 12 autres régions métropolitaines, sans doute pour ne pas avoir à s’y rendre à cette occasion. Faut-il, dans ces conditions, et quel que soit le président ou la présidente élue en avril prochain, continuer à essayer d’établir avec le pouvoir une épreuve de force dont tout donne à penser, à mon humble avis, qu’elle ne bénéficierait pas du soutien populaire indispensable à sa réussite ?À moins bien entendu que, dans les jours et les semaines qui viennent, le candidat qui sera élu s’avance clairement sur le terrain de la reconnaissance du peuple corse, ou à défaut, de la solution de la Question Corse.
Mais il y a, quoi qu’il puisse se passer, un autre chemin, qui serait sans doute, pour moi, susceptible de susciter ce qui manque le plus aujourd’hui, mais qui est indispensable pour réussir : l’adhésion populaire à un projet collectif.
Je me souviens m’être rendu, une dizaine de jours après l’assassinat du préfet Erignac, à un colloque à Palma de Majorque.
Au dîner d’ouverture, à la table ou je me trouvais, le ministre de l’économie du gouvernement autonome des Îles Baléares qui présidait le dîner, s’adressa à moi avec cette question : « Que se passe-t-il donc avec la France dans votre Île ? » Après avoir livré quelques explications probablement plus ou moins convaincantes, j’ai cru pouvoir m’en tirer en l’interrogeant à mon tour : « Et vous, comment faites-vous avec l’Espagne ? » La réponse est venue rapidement : « Nous avons ici le PIB par habitant le plus élevé d’Espagne, en même temps que le taux de chômage le plus faible ».
Et, lorsque je lui ai fait remarquer qu’il n’avait pas répondu à ma question, il m’a asséné ce que je considère comme le coup de grâce :
« Je vous ai, au contraire parfaitement répondu. » Il m’avait indiqué le chemin à suivre si on voulait se faire respecter par l’État tutélaire, et il avait raison.
Il n’y en a pour moi pas d’autre pour notre Île que celui qu’il indiquait alors. Faute d’avoir l’énergie pour l’emprunter, la large victoire électorale de Gilles Simeoni ne tardera pas à devenir encombrante.
• Vincent Carlotti
Ancien Vice-président de l’Assemblée de Corse