Repenser le grand âge
La société vieillit
Repenser le grand âge
La société vieillit. Tous les scénarios conduisent à une hausse importante de la proportion de personnes âgées d’ici 2070. Cela représente des enjeux sociétaux et politiques d’importance et un investissement conséquent. Et repenser la société pour changer la représentation des seniors.
Favoriser l’autonomie
Ce qui devait être une politique de soutien au grand âge durant le quinquennat de Macron s’est réduit à diverses mesures intégrées à la loi 2022 de financement de la sécurité sociale. La loi « Grand âge et autonomie » devenue « Générations solidaires » était déjà à l’ordre du jour sous la présidence de Nicolas Sarkozy, puis sous celle de François Hollande. Il faut dire que cette réforme demande de gros moyens, et la situation est plutôt à l’austérité. Selon le rapport Libault préparatoire à la réforme de la prise en charge de la dépendance, le besoin de financement est estimé à 9,2 milliards par an d’ici 2030. Cela date de 2019. Aujourd’hui, les plus de 60 ans reçoivent, collectivement, une part croissante des dépenses de protection sociale, mais le montant des prestations de protection sociale reçues en moyenne par une personne de plus de 60 ans augmente moins vite que le PIB par habitant. D’où une contribution plus importante des plus âgés, pour que la hausse des coûts associés au vieillissement de la population ne pèse pas trop lourd pour les actifs.
Solidarité intergénérationnelle
C’est notamment grâce au système de protection sociale que les personnes âgées bénéficient aujourd’hui d’un niveau de vie plus élevé en France que dans la moyenne des pays de l’OCDE. Le transfert net moyen reçu par un individu âgé de 60 à 79 ans, soit ce qu’il reçoit de la protection sociale moins ce qu’il paie pour la financer, s’élevait en 2019 à 47 % du PIB par tête. En 2019, le PIB par tête s’élevait à 36 300 euros. Entre 1979 et 2019, la part des plus de 60 ans dans la population est passée de 17 % à 26 %. Ce vieillissement a alimenté la hausse des dépenses de protection sociale, qui ont progressé sur la même période de 25 % à 31 % du PIB. De fait, les dépenses de santé et de retraites, qui bénéficient largement aux plus de 60 ans, représentent aujourd’hui les trois quarts des dépenses de protection sociale. Mais en dehors de l’aspect purement économique, le rôle des personnes âgées dans les sociétés modernes reste imprécis. Deux courants contradictoires sont à l’œuvre : l’âgisme et la silver économie. L’âgisme regroupe toutes les formes de discrimination, de ségrégation, de mépris fondées sur l’âge, tandis que la silver économie promeut le vieillissement comme vecteur de richesse pour la société. Repenser la société dans son ensemble, et non plus seulement par tranches d’âge, pour éviter les conflits entre générations.
Opération « bien vieillir »
En France, on compte entre 1,3 et 3,9 millions de personnes âgées en perte d’autonomie. La Corse compte 29 % de personnes de 60 ans et plus et constitue la seconde région la plus âgée de France. Par ailleurs, entre 2012 et 2017, la part des 80 ans et plus a augmenté de 2,5 %, contre 1,9 % au niveau national. Selon les projections de l’INSEE, la Corse compterait 21 000 seniors potentiellement dépendants à horizon 2030, soit 6 000 personnes dépendantes de plus qu’en 2015. Rapporté à la proportion de bénéficiaires de l’APA actuelle, la Collectivité de Corse projette 5 333 bénéficiaires de l’APA en plus en 2030. La population âgée corse est caractérisée également par son faible niveau de revenu et donc un fort taux de pauvreté des personnes âgées. Les chiffres de la densité médicale sont globalement supérieurs aux moyennes nationales, mais certains territoires ruraux connaissent de forts enjeux de désertification médicale et d’accès aux soins. Le département est responsable de l’évaluation des besoins des personnes âgées, du financement d’une partie des dépenses d’aide professionnelle à domicile et en établissement (partie dépendance) et de la gestion de l’offre à domicile et en établissement (avec les agences régionales de santé). Aussi la Collectivité de Corse s’est-elle dotée d’un schéma directeur de l’autonomie 2022-2026 qui prévoit la mobilisation de 52 millions d’euros de mesures nouvelles sur la période pour un plan d’action favorisant l’autonomie à domicile dans les meilleures conditions, avec une offre médico-sociale accessible et une société plus inclusive. Car on ne nait pas vieux, on le devient…
Maria Mariana