Puigdemont / Aragonès : duel au sommet en Catalogne
Le rapport de force au sein de l'indépendantisme devient défavorable à Carles Puigdemont et junts per Catalunya.
Puigdemont / Aragonès : duel au sommet en Catalogne
Le rapport de force au sein de l’indépendantisme devient défavorable à Carles Puigdemont et Junts per Catalunya. Pere Aragonès qui préside la Generalitat, et Esquerra Republicana de Catalunya leur font de l’ombre.
Carles Puigdemont est poursuivi par la justice espagnole pour avoir, alors qu'il présidait la Generalitat de Catalunya, initié le référendum d’autodétermination de la Catalogne du 1er octobre 2017 et la proclamation de l’indépendance ayant suivi. Étant réfugié en Belgique, il préside toujours le parti indépendantiste Junts per Catalunya. Carles Puigdemont a cependant annoncé qu’il allait passer la main lors du congrès du parti qui aura lieu en juin prochain. Une fois libéré de la présidence de son parti, Carles Puigdemont va probablement se consacrer à développer l’action du Consell per la República Catalana, structure dont il a été l’initiateur, dont il est le président et dont l’objet affiché est la construction d’un réseau diplomatique représentant la Catalogne et défendant ses intérêts. Le retrait de Carles Puigdemont relève toutefois d’une nécessité bien plus plus pressante que celle de développer l’action du Consell. Il est essentiellement conditionné par un rapport de force au sein de l’indépendantisme qui devient défavorable à Junts per Catalunya et à … Carles Puigdemont.
L’ascension de Pere Aragonès
Junts per Catalunya qui associe des sensibilités libérale, démocrate-chrétienne et écologiste, est un parti qui pèse lourd et est une composante importante de la majorité indépendantiste qui administre la Generalitat. Mais son influence est en déclin. En septembre 2020, Junts per Catalunya a dû céder la présidence de la Generalitat à l’autre grand parti indépendantiste, Esquerra Republicana de Catalunya, de sensibilité social-démocrate. Aujourd’hui, dans les rapports avec l’Etat espagnol, alors que Junts per Catalunya est campé dans le refus, Esquerra Republicana de Catalunya dialogue avec Madrid (dans le cadre de la « politique de réconciliation » initiée par le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez), a obtenu la grâce de ses dirigeants qui étaient impliqués dans la tentative de sécession d‘octobre 2017 et contribue à la survie du gouvernement socialiste en lui apportant les voix de ses dépotés et sénateurs qui siègent aux Cortès (Parlement espagnol).
Par ailleurs, Pere Aragonès qui préside la Generalitat, fait de l’ombre à Carles Puigdemont. Ayant une image d’homme jeune et neuf, il a 39 ans, étant un juriste rompu à mesurer ses paroles, jouant la carte du dialogue et faisant passer l’idée que le processus vers l’indépendance relèvera du temps long selon de nombreuses étapes, Pere Aragonès rassure les populations de Catalogne (particulièrement les classes moyennes urbaines, les acteurs économiques et les originaires d’autres régions), séduit les médias dominants et voit s’ouvrir les portes de dirigeants de l’Union Européenne et de plusieurs chefs d’États européens.
2023 sera « chaude »
Carles Puigdemont reste une figure emblématique et est peut-être encore la personnalité dominante de l’indépendantisme. Mais ses quatre décennies d’action politique, son action entravée par sa situation judiciaire, son refus du dialogue et avoir proclamé unilatéralement l’indépendance à partir d’un scrutin contestable et sans un appui international commencent à le desservir au sein de l’opinion catalane et lui ferment les portes qui s’ouvrent devant Pere Aragonès.
De plus, sa longue absence sur le sol catalan l’expose, à terme, à l’isolement et à être perçu comme un opposant symbolique voire folklorique. Toit ceci conduit une partie de son entourage à suggérer que rentrer en Catalogne offrirait plusieurs opportunités à Carles Puigdemont : il reviendrait dans le jeu politique par la grande porte ; si Pedro Sánchez le faisait incarcérer, il mettrait à mal la « politique de réconciliation » (qui exclut toute reconnaissance du droit à l’autodétermination) et rendrait difficile voire impossible le soutien des députés et sénateurs d’Esquerra Republicana de Catalunya au gouvernement socialiste espagnol ; il contrarierait la stratégie étapiste de Pere Aragonès en remettant le combat indépendantiste au centre du débat politique.
Une autre option est évoquée : présenter le Consell per la República Catalana comme un gouvernement en exil non soumis aux instituions espagnoles et ayant pour mission de promouvoir l’urgence indépendantiste, afin de permettre à Carles Puigdemont de se présenter comme le « Président de tous les Catalans » et le champion de l’indépendance. Ceci afin d’affaiblir afin de rogner les ailes de Pere Aragonès et d’Esquerra Republicana de Catalunya en les faisant apparaître comme peu combatifs et disposés à donner trop de temps à Madrid. 2023 sera une année électorale en Catalogne (élections municipales). Le duel Carles Puigdemont / Pere Aragonès dans les communes s’annonce « chaud ». D’autant plus que le mode de scrutin, à un tour et à la proportionnelle, incite à la férocité.
Alexandra Sereni
Le rapport de force au sein de l’indépendantisme devient défavorable à Carles Puigdemont et Junts per Catalunya. Pere Aragonès qui préside la Generalitat, et Esquerra Republicana de Catalunya leur font de l’ombre.
Carles Puigdemont est poursuivi par la justice espagnole pour avoir, alors qu'il présidait la Generalitat de Catalunya, initié le référendum d’autodétermination de la Catalogne du 1er octobre 2017 et la proclamation de l’indépendance ayant suivi. Étant réfugié en Belgique, il préside toujours le parti indépendantiste Junts per Catalunya. Carles Puigdemont a cependant annoncé qu’il allait passer la main lors du congrès du parti qui aura lieu en juin prochain. Une fois libéré de la présidence de son parti, Carles Puigdemont va probablement se consacrer à développer l’action du Consell per la República Catalana, structure dont il a été l’initiateur, dont il est le président et dont l’objet affiché est la construction d’un réseau diplomatique représentant la Catalogne et défendant ses intérêts. Le retrait de Carles Puigdemont relève toutefois d’une nécessité bien plus plus pressante que celle de développer l’action du Consell. Il est essentiellement conditionné par un rapport de force au sein de l’indépendantisme qui devient défavorable à Junts per Catalunya et à … Carles Puigdemont.
L’ascension de Pere Aragonès
Junts per Catalunya qui associe des sensibilités libérale, démocrate-chrétienne et écologiste, est un parti qui pèse lourd et est une composante importante de la majorité indépendantiste qui administre la Generalitat. Mais son influence est en déclin. En septembre 2020, Junts per Catalunya a dû céder la présidence de la Generalitat à l’autre grand parti indépendantiste, Esquerra Republicana de Catalunya, de sensibilité social-démocrate. Aujourd’hui, dans les rapports avec l’Etat espagnol, alors que Junts per Catalunya est campé dans le refus, Esquerra Republicana de Catalunya dialogue avec Madrid (dans le cadre de la « politique de réconciliation » initiée par le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez), a obtenu la grâce de ses dirigeants qui étaient impliqués dans la tentative de sécession d‘octobre 2017 et contribue à la survie du gouvernement socialiste en lui apportant les voix de ses dépotés et sénateurs qui siègent aux Cortès (Parlement espagnol).
Par ailleurs, Pere Aragonès qui préside la Generalitat, fait de l’ombre à Carles Puigdemont. Ayant une image d’homme jeune et neuf, il a 39 ans, étant un juriste rompu à mesurer ses paroles, jouant la carte du dialogue et faisant passer l’idée que le processus vers l’indépendance relèvera du temps long selon de nombreuses étapes, Pere Aragonès rassure les populations de Catalogne (particulièrement les classes moyennes urbaines, les acteurs économiques et les originaires d’autres régions), séduit les médias dominants et voit s’ouvrir les portes de dirigeants de l’Union Européenne et de plusieurs chefs d’États européens.
2023 sera « chaude »
Carles Puigdemont reste une figure emblématique et est peut-être encore la personnalité dominante de l’indépendantisme. Mais ses quatre décennies d’action politique, son action entravée par sa situation judiciaire, son refus du dialogue et avoir proclamé unilatéralement l’indépendance à partir d’un scrutin contestable et sans un appui international commencent à le desservir au sein de l’opinion catalane et lui ferment les portes qui s’ouvrent devant Pere Aragonès.
De plus, sa longue absence sur le sol catalan l’expose, à terme, à l’isolement et à être perçu comme un opposant symbolique voire folklorique. Toit ceci conduit une partie de son entourage à suggérer que rentrer en Catalogne offrirait plusieurs opportunités à Carles Puigdemont : il reviendrait dans le jeu politique par la grande porte ; si Pedro Sánchez le faisait incarcérer, il mettrait à mal la « politique de réconciliation » (qui exclut toute reconnaissance du droit à l’autodétermination) et rendrait difficile voire impossible le soutien des députés et sénateurs d’Esquerra Republicana de Catalunya au gouvernement socialiste espagnol ; il contrarierait la stratégie étapiste de Pere Aragonès en remettant le combat indépendantiste au centre du débat politique.
Une autre option est évoquée : présenter le Consell per la República Catalana comme un gouvernement en exil non soumis aux instituions espagnoles et ayant pour mission de promouvoir l’urgence indépendantiste, afin de permettre à Carles Puigdemont de se présenter comme le « Président de tous les Catalans » et le champion de l’indépendance. Ceci afin d’affaiblir afin de rogner les ailes de Pere Aragonès et d’Esquerra Republicana de Catalunya en les faisant apparaître comme peu combatifs et disposés à donner trop de temps à Madrid. 2023 sera une année électorale en Catalogne (élections municipales). Le duel Carles Puigdemont / Pere Aragonès dans les communes s’annonce « chaud ». D’autant plus que le mode de scrutin, à un tour et à la proportionnelle, incite à la férocité.
Alexandra Sereni