Le tourisme en Corse : un bien qu'il faut maîtriser
Au delà des préoccupations électorales se profilent des questionnements qui exigent désormais des réponses.
Le tourisme en Corse : un bien qu’il faut maîtriser
Difficile d’écrire un article en sachant qu’il va paraître entre les deux tours des législatives. Impossible de faire un pronostic après une campagne atone qui ne semble guère intéresser les citoyens. Mais peut-être n’est-ce là qu’une apparence ? Or par-delà les préoccupations électorales se profilent des questionnements qui exigent désormais des réponses
Réguler l’anarchie des locations saisonnièresLa question des locations estivales exige désormais des solutions pour empêcher l’achat spéculatif de logements qui sont ensuite proposés à la location sauvage durant l’été. La crise sanitaire et économique a fait que la Corse est devenue une destination prisée par des publics plus ou moins fortunés. Au Pays basque, la Communauté d’agglomération du Pays basque (CAPB), qui regroupe 158 communes, confrontée au même problème, avait adopté, le 5 mars, une délibération s’inspirant de celles adoptées à Paris ou à Bordeaux. Le dispositif contraignait les sociétés propriétaires qui louent des logements en courte durée dans les 24 communes en zone dite tendue à compenser les mètres carrés ainsi perdus pour l’habitation des résidents à l’année par autant de mètres carrés commerciaux convertis en appartements, dans le même quartier, et loués en longue durée. Cette mesure de défense a hélas été suspendue par le tribunal administratif alors qu’elle avait été adoptée par 95 % des élus.
Dans le Cap corse
Dans le Cap corse, pour tenter de contrôler le développement des locations meublées proposées sur des plateformes dédiées et obliger les propriétaires à les déclarer, le préfet de Haute-Corse a pris 11 arrêtés visant à réguler la conversion des logements en meublés touristiques dans le Cap Corse. Pour Anne-Laure Santucci, maire de Luri, interrogée par France 3 Corse ViaStella « ces arrêtés permettent à ceux qui voudraient changer d'usage des locaux d'habitation, après autorisation de la commune, d'obtenir un numéro déclaratif. Ce numéro sera ensuite renseigné directement par le loueur sur les plateformes et la taxe de séjour sera automatiquement payée. Cela permettra aussi à chaque commune de maîtriser les changements et donc l'offre de locations meublées. »
Protéger nos espaces remarquables
Il faut également protéger notre patrimoine naturel. C’est la mission que se sont fixée nos élus territoriaux. Le rapport adopté par l'Assemblée de Corse le vendredi 3 juin à Ajaccio prévoit la mise en place « dès l'été 2022 » de quotas touristiques dans un certain nombre de lieux menacés par la surfréquentation touristique. Cela concerne notamment le massif de Bavella, la Restonica, et les îles Lavezzi. Le rapport vise à « repenser l'accueil sur ces territoires sensibles en abordant la problématique de gestion du milieu naturel sous l'angle de la régulation des flux et de la promotion d'un tourisme durable ». Le problème se pose également pour le GR20 qui va connaître cet été une affluence record alors même que la canicule et la sécheresse s’imposent d’ores et déjà.
Avoir une vision d’ensemble
On le constate les problématiques sont désormais à appréhender comme des synergies et non pas comme des difficultés séparées les unes des autres. Une forte présence touristique pose également des questionnements hydriques, de déchets, d’énergie et de transport. Sans une approche systémique, le risque est de poser une rustine sur une déchirure alors même qu’une autre s’ouvre juste à côté. Et pour ce faire, il faut l’adhésion de la population et des contrôles efficaces.
La politique à courte vue ne réglera rien. Il faudrait établir des feuilles de route et puis s’y tenir quitte à bousculer des intérêts individuels. C’est peut-être cela le plus difficile à accomplir dans une île où le pouvoir politique a autant d’importance et où les clientèles sont aussi puissantes. Où qu’on promène son regard on fait le triste constat que jamais il n’y a eu autant de constructions dans l’histoire de la Corse. Mais surtout ces constructions se font désormais par immeubles entiers pour le plus grand profit des promoteurs et des intérêts occultes. Triste paradoxe qui veut que ceux qui s’étaient proclamés les défenseurs de la terre corse aient été les fossoyeurs de cette cause. Il serait peut-être temps de se reprendre et de replacer la terre au centre de nos préoccupations pour l’avenir de notre île.
GXC