FLNC : quand l'histoire radote
Le 14 juillet se tenait au couvent Saint Antoine de Casabianca une conférence à laquelle assistait une trentaine de personnes afin de commémorer le 14 juillet 1755, date de la réelle prise du pouvoir par Pasquale Paoli.
Le 14 juillet se tenait au couvent Saint Antoine de Casabianca une conférence à laquelle assistait une trentaine de personnes afin de commémorer le 14 juillet 1755, date de la réelle prise du pouvoir par Pasquale Paoli. C’est à cette occasion que quatre personnages cagoulés et curieusement armés ont tenue à déclarer sous la cagoule que le FLNC n’était pas mort.
Une assemblée décisive
Le 14 juillet, une consulta réunie au couvent de Sant’Antonio de la Casabianca proclame Pascal Paoli Général de la Nation. Y sont présentes un quart des pievi de Corse. Toutes les autres notamment celles du sud, ont boudé l’évènement. En fait, Paoli n’y vient que le lendemain pour entériner la décision de le nommer général de la nation. Il prononce un long discours afin de décrire sa feuille de route qui comprend en premier lieu une marche générale le 3 août afin de punir les délits et notamment les homicides. Pour Pasquale Paoli “le premier ennemi du Corse, c’est le Corse lui-même, qui se laisse aller à des luttes de parti et à des guerres intestines plutôt que d’affronter l’ennemi commun” écrit l'historien Antoine Marie Graziani. Ensuite il transforme le serment de fidélité et d’obéissance des populations, en un « serment de fidélité et d’obéissance à titre personnel ». Paoli n’est pas dupe de sa véritable puissance se comparant dans une lettre à Polichinelle jouant le Prince, faisant allusion à Machiavel. Ses premières mesures contre la vendetta provoquent une stupéfaction horrifiée dans la population. “En attendant la marche générale qu’il a intimée pour le 3 août, il a décidé de faire une série d’exemples : de fait, les premières condamnations qu’il promulgue sont très lourdes. Aux uns la mort, aux autres le fouet, aux autres encore la marque d’infamie. Condamnations pour l’exemple, s’agissant d’habitants de sa propre pieve. C’est ainsi qu’il fait exécuter un de ses parents, un jeune homme de Pastoreccia, convaincu d’assassinat. L’exécution en elle-même n’est pas surprenante : les prédécesseurs de Paoli avaient, eux aussi, pensé à exercer une justice expéditive pour réduire le phénomène de la vendetta. Ce qui stupéfie les témoins c’est qu’il n’hésite pas à faire saisir le jeune homme dans une église au mépris du for ecclésiastique, et dans une Corse où la justice privée et le poids des ligues familiales est considérable, qu’il ordonne l’exécution d’un de ses parents, un des siens… “souligne Antoine Marie Graziani. Ces terribles et courageuses décisions témoignent d'une volonté de justice mais surtout d’affirmation de son pouvoir personnel dans une Corse qui ne marque aucun enthousiasme à le suivre. Il n’empêche qu’il est alors le seul à incarner un destin ambitieux pour son île.
La nostalgie n’est plus du tout qu’elle était
La conférence de presse de 14 juillet 2020 était tenue par Jean-Pierre Santini, auteur d’un ouvrage sur le FLNC dont il se targue d’avoir été un des créateurs. De fait, Santini a été l’un de ceux qui ont écrit le Petit Livre Vert, premier programme du FLNC, fortement influencé par un bien curieux maoïsme (dont Santini était alors un fervent adepte) et par la Libye de Khadafi qui faisait alors figure de proue révolutionnaire. On imagine facilement le paradoxe d’une organisation clandestine, en grande partie fondée par des sympathisants ou des militants d’extrême-droite qui adoptaient soudain un programme d’extrême-gauche. Le FLNC avait été porté sur les fonts baptismaux en 1976 alors même que s'achevait la vague mondiale de décolonisation et que l’année précédente le FNL vietnamien avait vaincu les États-Unis en s'emparant de Saïgon. Vraisemblablement était-ce cette fascination exercée par les victoires de petits peuples sur des états puissants qui avaient suscité cette vocation chez des créateurs du FLNC dont les pères souvent partisans de l'Algérie française détestaient l'État français pour avoir fléchi devant les "Viets et les Fellaghas". Mais l'eau a coulé sous les ponts. Les militants ont vieilli et ont fini par rendre les armes. Et voilà que six ans après la fin du combat décrété par le FLNC Union des Combattants, quatre ans après la démilitarisation progressive du FLNC du 22 mars, quatre cagoulés armés de fusils d’un autre âge dont, curiosité militaire, une Sten, cette mitraillette de mauvaise qualité fabriquée par les Britanniques pour alimenter les maquis français, reprennent comme un bégaiement la vieille logomachie indépendantiste cent fois répétée.
Un non-évènement à interpréter
Ce tout petit groupe a revendiqué un attentat dont les effets ont été retrouvés après des heures de recherche. C’est dire l’état de la clandestinité en Corse : une sorte de remugle des temps passés dont plus personne ne veut entendre parler mais qui continue d’agiter quelques personnes âgées en recherche de leur jeunesse. C’est qu’à force de n’avoir que comme référence le XVIIIe siècle on finit par paraître un peu radoteur. La Corse mérite mieux et a désormais le devoir d’imaginer un futur nouveau.
GXC
Une assemblée décisive
Le 14 juillet, une consulta réunie au couvent de Sant’Antonio de la Casabianca proclame Pascal Paoli Général de la Nation. Y sont présentes un quart des pievi de Corse. Toutes les autres notamment celles du sud, ont boudé l’évènement. En fait, Paoli n’y vient que le lendemain pour entériner la décision de le nommer général de la nation. Il prononce un long discours afin de décrire sa feuille de route qui comprend en premier lieu une marche générale le 3 août afin de punir les délits et notamment les homicides. Pour Pasquale Paoli “le premier ennemi du Corse, c’est le Corse lui-même, qui se laisse aller à des luttes de parti et à des guerres intestines plutôt que d’affronter l’ennemi commun” écrit l'historien Antoine Marie Graziani. Ensuite il transforme le serment de fidélité et d’obéissance des populations, en un « serment de fidélité et d’obéissance à titre personnel ». Paoli n’est pas dupe de sa véritable puissance se comparant dans une lettre à Polichinelle jouant le Prince, faisant allusion à Machiavel. Ses premières mesures contre la vendetta provoquent une stupéfaction horrifiée dans la population. “En attendant la marche générale qu’il a intimée pour le 3 août, il a décidé de faire une série d’exemples : de fait, les premières condamnations qu’il promulgue sont très lourdes. Aux uns la mort, aux autres le fouet, aux autres encore la marque d’infamie. Condamnations pour l’exemple, s’agissant d’habitants de sa propre pieve. C’est ainsi qu’il fait exécuter un de ses parents, un jeune homme de Pastoreccia, convaincu d’assassinat. L’exécution en elle-même n’est pas surprenante : les prédécesseurs de Paoli avaient, eux aussi, pensé à exercer une justice expéditive pour réduire le phénomène de la vendetta. Ce qui stupéfie les témoins c’est qu’il n’hésite pas à faire saisir le jeune homme dans une église au mépris du for ecclésiastique, et dans une Corse où la justice privée et le poids des ligues familiales est considérable, qu’il ordonne l’exécution d’un de ses parents, un des siens… “souligne Antoine Marie Graziani. Ces terribles et courageuses décisions témoignent d'une volonté de justice mais surtout d’affirmation de son pouvoir personnel dans une Corse qui ne marque aucun enthousiasme à le suivre. Il n’empêche qu’il est alors le seul à incarner un destin ambitieux pour son île.
La nostalgie n’est plus du tout qu’elle était
La conférence de presse de 14 juillet 2020 était tenue par Jean-Pierre Santini, auteur d’un ouvrage sur le FLNC dont il se targue d’avoir été un des créateurs. De fait, Santini a été l’un de ceux qui ont écrit le Petit Livre Vert, premier programme du FLNC, fortement influencé par un bien curieux maoïsme (dont Santini était alors un fervent adepte) et par la Libye de Khadafi qui faisait alors figure de proue révolutionnaire. On imagine facilement le paradoxe d’une organisation clandestine, en grande partie fondée par des sympathisants ou des militants d’extrême-droite qui adoptaient soudain un programme d’extrême-gauche. Le FLNC avait été porté sur les fonts baptismaux en 1976 alors même que s'achevait la vague mondiale de décolonisation et que l’année précédente le FNL vietnamien avait vaincu les États-Unis en s'emparant de Saïgon. Vraisemblablement était-ce cette fascination exercée par les victoires de petits peuples sur des états puissants qui avaient suscité cette vocation chez des créateurs du FLNC dont les pères souvent partisans de l'Algérie française détestaient l'État français pour avoir fléchi devant les "Viets et les Fellaghas". Mais l'eau a coulé sous les ponts. Les militants ont vieilli et ont fini par rendre les armes. Et voilà que six ans après la fin du combat décrété par le FLNC Union des Combattants, quatre ans après la démilitarisation progressive du FLNC du 22 mars, quatre cagoulés armés de fusils d’un autre âge dont, curiosité militaire, une Sten, cette mitraillette de mauvaise qualité fabriquée par les Britanniques pour alimenter les maquis français, reprennent comme un bégaiement la vieille logomachie indépendantiste cent fois répétée.
Un non-évènement à interpréter
Ce tout petit groupe a revendiqué un attentat dont les effets ont été retrouvés après des heures de recherche. C’est dire l’état de la clandestinité en Corse : une sorte de remugle des temps passés dont plus personne ne veut entendre parler mais qui continue d’agiter quelques personnes âgées en recherche de leur jeunesse. C’est qu’à force de n’avoir que comme référence le XVIIIe siècle on finit par paraître un peu radoteur. La Corse mérite mieux et a désormais le devoir d’imaginer un futur nouveau.
GXC