Les vrais chiffres de la bataille de Ponte Novu

Les vrais chiffres de la bataille de Ponte Novu

On connaît maintenant très exactement les détails de la bataille de Ponte Novu grâce au travail d’historien exécuté par Jean-Marie Arrighi et Alain Venturini. Je ne cite que ces deux-là, mais Dorothy Carrington avait ouvert la voie. Serpentini notamment taille des croupières aux chiffres fantasmatiques trop souvent utilisés à des fins politiques par les autonomistes de l’entre-deux-guerres.

Le nombre de combattants nationaux

Au prix d’un très rigoureux décompte des troupes en présence, Alain Venturini, ancien directeur des Archives départementales de la Corse-du-Sud, arrive aux chiffres suivants : 1 200 hommes au moins font face au comte de Narbonne. Le nombre de combattants corses a vraisemblablement avoisiné les 10 000. Mais le corps principal, placé sous les ordres directs de Pascal Paoli et de ses principaux officiers, se situe au mieux à 4 000 hommes. La défaite a été rapide. Les nationaux ont alors cherché à l’expliquer par la présence de traîtres en leur sein ce qui est tout à fait possible. Les Français et leurs alliés corses sont en train de gagner la partie et bien des notables se demandent comment passer dans le camp des vainqueurs. » Au tableau d’infamie, outre Matteo Buttafoco (mais celui-ci combattait ouvertement dans le camp français), le comte Gentili pour le feu ouvert par ses mercenaires prussiens contre les soldats corses essayant de repasser le pont de Ponte Novo, Francesco Gaffori pour une conduite prêtant le flanc à la suspicion (abandon de Lento sans combat) et enfin Giacomo Dante Grimaldi, de la Caccia » écrit Alain Venturini avant d’en écarter trois. Buttafoco qui est officier de l’armée française et ne peut donc avoir trahi ; Gentili et Gaffori en invoquant « des lacunes ou fautes militaires, le premier n’ayant pas été capable de se faire obéir afin d’interrompre rapidement un feu fratricide, le second étant “coupable de ne pas avoir obéi à un ordre de l’importance de celui qu’il avait reçu ». Il ne reste donc que Giacomo Dante Grimaldi nommément dénoncé par le colonel de Petriconi ce qui ne suffit pas à expliquer une défaite.

Les pertes françaises

Les auteurs, insulaires ou non, lorsqu’ils étaient favorables à la cause nationale corse, les ont souvent surévaluées les situant entre 400 et 800. Or les archives conservent les comptes rendus des opérations rédigés successivement par le comte de Guibert puis par le comte de Vaux. Les pertes totales de la campagne de conquête de la Corse s’élèvent à un peu plus de 310 officiers et soldats mis hors de combat, dont au moins 91 tués (11 officiers et 80 soldats). Et même si on rajoute les pertes des volontaires corses on ne doit pas dépasser les deux cents morts. Quant aux pertes françaises concernant uniquement la bataille de Ponte Novu on ne dépasse pas 64 hommes tués ou blessés 47, soit un bon cinquième de l’ensemble des pertes de la campagne. « Nous arrivons ainsi à un total arrondi de 260 officiers et soldats mis hors de combat en neuf jours, ce qui laisse une grosse cinquantaine de pertes pour l’affrontement de la Bocca San Giacomo le 8 mai, les combats dans le sud de l’île et le reste de la campagne du corps du comte de Vaux. Nous pouvons aussi relever que si, comme tout nous y invite, nous attribuons aux “volontaires de l’armée” l’essentiel des pertes du combat de Lento du 8 mai, ces derniers peuvent avoir laissé sur le terrain en huit jours 100 à 110 hommes, soit l’équivalent du tiers des pertes totales de l’armée française et du neuvième de leur force initiale » écrit Alain Venturini.

Les pertes corses

Sans craindre le ridicule Roger Caratini dans son Histoire du peuple corse, sans citer la moindre source, donne le chiffre de 4 324 morts et 6 000 blessés. Petru Rocca plus réalise parle de 1 100 morts. La réalité est plus proche de 400 Corses et mercenaires tués à Ponte Novu ce qui représente des pertes quatre fois supérieures à celle du camp français. On ignore le nombre de blessés.

La question des volontaires corses

Ils se montent à environ 900 hommes, dont les deux tiers sont cantonnés à Ajaccio pour leur immense majorité des Grecs de Paomia et donc absents de la bataille de Ponte Novu. 130 volontaires calvais sont restés dans leur cité. En réalité, ils n’étaient donc que 170 Corses au sens strict, essentiellement des hommes du Nebbio commandés par Pietro Boccheciampe, le sinistre traître de la conspiration d’Oletta, à combattre avec les Français. Nous voilà bien loin des 5 000 volontaires cités par l’abbé Ambrogio Rossi et plus encore des 8 000 volontaires corses cités par certains auteurs. » Bref, même si les volontaires corses ont sans doute été un appoint non négligeable comme guides, ils n’ont guère compté comme force combattante : la campagne militaire de 1 769 n’a que très marginalement été un affrontement entre Corses » conclut fort justement Alain Venturini.

GXC