Dossier Alessandri et processus Darmanin : la grande solitude de Femu a Corsica
Pour Femu a Corsica, et bien sûr l’ensemble de la majorité territoriale, les jours et sans doute les semaines qui viennent risquent fort de ressembler à un chemin parsemé de pierres et d’épines sur lequel ils seront bien seuls et devront se garder de leur
Dossier Alessandri et processus Darmanin : la grande solitude de Femu a Corsica
Pour Femu a Corsica, et bien sûr l’ensemble de la majorité territoriale, les jours et sans doute les semaines qui viennent risquent fort de ressembler à un chemin parsemé de pierres et d’épines sur lequel ils seront bien seuls et devront se garder de leur famille. Un vrai chemin de croix.
La Chambre de l’application des peines de la Cour d'appel de Paris a rejeté le 29 septembre dernier la demande d'aménagement de peine déposée par Pierre Alessandri détenu depuis 1999 et libérable depuis 2017. L'annonce de ce rejet a fait l’effet d’une douche froide sur les élus qui étaient réunis en session ordinaire de l'Assemblée de Corse. A la tribune du Conseil exécutif ainsi que dans l’hémicycle, se sont immédiatement manifestées de la stupéfaction, de l’incompréhension, de la déception et de la colère. Quant à l’ordre du jour, il a été oublié. Le président du Conseil exécutif, Gilles Simeoni, a d’emblée exprimé son exaspération : « C’est une fois de plus, une fois de trop ! » puis s’est efforcé de calmer le jeu : « Aujourd’hui à Paris, je pense sincèrement qu’il y a des artisans de la paix, même s’ils sont trop timides, trop timorés y compris dans leur expression publique et dans leurs choix, et il y aussi, nombreux, des faiseurs de guerre (...) Pour nous, il n’y a qu’un chemin : le chemin de la libération, de la vérité, de la justice, de la démocratie et de la paix ».
En prononçant des paroles d’apaisement, le Président du Conseil exécutif a esquissé et peut-être même voulu suggérer la décision prise trois jours plus tard par Femu a Corsica. En effet, réunis à Corti, à l’occasion d’un séminaire qui devait être uniquement consacré à des ateliers sur le contenu à donner à l’autonomie dans tous les domaines (institutions, économie, fiscalité, foncier, environnement, langue, droits sociaux, création et répartition de la richesses, santé…) ainsi qu’au déroulé du « Giru paisanu è citadinu » (campagne de communication et d’explication dans les pieve et les grandes agglomérations portant sur l’autonomie et son contenu), les militants du parti siméoniste ont décidé de ne pas suspendre la participation de la majorité territoriale aux discussions avec l’État et de laisser du temps au temps : « Femu a Corsica réaffirme sa détermination à voir aboutir le processus de discussions en cours avec Paris (…) Femu a Corsica souhaite que le processus de négociation entre la Corse et l’Etat puisse s’inscrire dans le temps et réussir ». Femu a Corsica a cependant assorti d’exigence et d’intransigeance sa décision de poursuite du dialogue en plaçant la barre haut : « Ce processus doit aboutir à une solution politique globale intégrant toutes les dimensions de la question corse : historique, symbolique et politique, mais aussi institutionnelle, économique, sociale, culturelle, linguistique, sociétale », en affirmant que la question des prisonniers et anciens prisonniers politiques était essentielle : « sa résolution rapide et totale est indispensable à sa réussite. » et en demandant à l’Etat « de donner sans délai des signes publics clairs. »
Toutefois la tonalité exigeante et intransigeante de la position prise par Femu a Corsica ne saurait cacher la situation délicate dans laquelle seront le parti siméoniste et plus globalement la majorité territoriale dans les jours qui viennent. Ils en sont d’ailleurs conscients.
Un vrai chemin de croix
Ils savent qu’ils seront encore confrontés à des institutions de l’Etat dont les unes soufflent le chaud et les autres le froid. Ils savent aussi qu’il leur sera reproché de se montrer trop conciliants. Ils savent également qu’avec la décision de Chambre de l’application des peines, pour tenter de garder le contrôle et espérer éviter des débordements violents qui pourraient provoquer la suspension ou l’annulation du processus Darmanin, il leur faut prendre les devants. D’où l’appel de Femu a Corsica aux représentants du monde politique et à la société civile (élus représentant la Corse lors des discussions avec le Gouvernement, Associations de maires, chambres consulaires syndicats et associations) à « prendre position en faveur de la libération de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, de la justice et de la vérité pour Yvan Colonna, et de la réussite du processus de négociation ». D’où la proposition de Femu a Corsica que la mobilisation soit « élargie à l’ensemble des forces politiques françaises et européennes et aux Parlements français et européen. » Enfin, ils savent que l’unanimité qui s’est manifestée lors de la Conférences des président de l’Assemblée de Corse pour déplorer que « le maintien en détention de Pierre Alessandri comme celui d'Alain Ferrandi contrevienne à la logique d'apaisement », ne durera pas et que chacun avancera ses propre pions. Certains l’ont d’ailleurs déjà fait. Lors d’une conférence de presse qu’il a tenu à Bastia devant le Palais de Justice, le Collectif L’Ora di u Ritornu a demandé la suspension du dialogue engagé avec l'État.
Au nom de Core in Fronte, Paul-Félix Benedetti a annoncé une décision en ce sens quelques minutes après avoir appris la décision de la Chambre de l’application des peines et expliqué : « Aujourd'hui, ce n’est pas une décision de justice qui est rendue, c’est une décision d’Etat instrumentalisée par le parquet. Je crois qu'on doit demander des clarifications. C’est blanc ou noir, nous on ne marche pas dans le gris. » Corsica Libera a adopté quelques heures plus tard la même position en demandant « à l'ensemble des élus concernés de reporter leur présence à ces discussions (celles de Paris, NDLR) jusqu'à la libération de tous les prisonniers politiques ». Le parti siméoniste et la majorité territoriale pourront peut-être compter sur un soutien de… leur meilleur ennemi. En effet, par la voix de son leader Jean-Christophe Angelini, le PNC-Avanzemu a appelé à « parler sans délai entre nationalistes et au-delà, entre sensibilités politiques très différentes » pour « examiner les voies et moyens de sortie de crise ».Mais prudence, à l’heure où sont écrites ces lignes, PNC-Avanzemu n’a encore pas décidé s’il suspendra ou non sa participation au processus Darmanin en attendant que soit trouvée la « sortie de crise » et Jean-Christophe Angelini a semble-t-il jeté une pierre dans le jardin siméoniste en suggérant que la décision de la Chambre de l’application des peines rendait nécessaire une nouvelle stratégie : « Il faut un débat ouvert, notamment entre les composantes du mouvement national ». Au fond, pour l'heure du moins, seule la droite n'est cause d'aucun souci pour les siméonistes dans la crise qu'ils affrontent.
Par la voix du sénateur Jean-Jacques Panunzi et celle des élus Un soffiu novu siégeant à l’Assemblée de Corse, elle s'est prononcée pour la poursuite du processus Darmanin.
En conclusion, pour le parti siméoniste et la majorité territoriale, les jours et sans doute les semaines qui viennent risquent fort de ressembler à un chemin parsemé de pierres et d’épines sur lequel ils seront bien seuls et devront se garder de leur famille. Un vrai chemin de croix.
Pierre Corsi
Pour Femu a Corsica, et bien sûr l’ensemble de la majorité territoriale, les jours et sans doute les semaines qui viennent risquent fort de ressembler à un chemin parsemé de pierres et d’épines sur lequel ils seront bien seuls et devront se garder de leur famille. Un vrai chemin de croix.
La Chambre de l’application des peines de la Cour d'appel de Paris a rejeté le 29 septembre dernier la demande d'aménagement de peine déposée par Pierre Alessandri détenu depuis 1999 et libérable depuis 2017. L'annonce de ce rejet a fait l’effet d’une douche froide sur les élus qui étaient réunis en session ordinaire de l'Assemblée de Corse. A la tribune du Conseil exécutif ainsi que dans l’hémicycle, se sont immédiatement manifestées de la stupéfaction, de l’incompréhension, de la déception et de la colère. Quant à l’ordre du jour, il a été oublié. Le président du Conseil exécutif, Gilles Simeoni, a d’emblée exprimé son exaspération : « C’est une fois de plus, une fois de trop ! » puis s’est efforcé de calmer le jeu : « Aujourd’hui à Paris, je pense sincèrement qu’il y a des artisans de la paix, même s’ils sont trop timides, trop timorés y compris dans leur expression publique et dans leurs choix, et il y aussi, nombreux, des faiseurs de guerre (...) Pour nous, il n’y a qu’un chemin : le chemin de la libération, de la vérité, de la justice, de la démocratie et de la paix ».
En prononçant des paroles d’apaisement, le Président du Conseil exécutif a esquissé et peut-être même voulu suggérer la décision prise trois jours plus tard par Femu a Corsica. En effet, réunis à Corti, à l’occasion d’un séminaire qui devait être uniquement consacré à des ateliers sur le contenu à donner à l’autonomie dans tous les domaines (institutions, économie, fiscalité, foncier, environnement, langue, droits sociaux, création et répartition de la richesses, santé…) ainsi qu’au déroulé du « Giru paisanu è citadinu » (campagne de communication et d’explication dans les pieve et les grandes agglomérations portant sur l’autonomie et son contenu), les militants du parti siméoniste ont décidé de ne pas suspendre la participation de la majorité territoriale aux discussions avec l’État et de laisser du temps au temps : « Femu a Corsica réaffirme sa détermination à voir aboutir le processus de discussions en cours avec Paris (…) Femu a Corsica souhaite que le processus de négociation entre la Corse et l’Etat puisse s’inscrire dans le temps et réussir ». Femu a Corsica a cependant assorti d’exigence et d’intransigeance sa décision de poursuite du dialogue en plaçant la barre haut : « Ce processus doit aboutir à une solution politique globale intégrant toutes les dimensions de la question corse : historique, symbolique et politique, mais aussi institutionnelle, économique, sociale, culturelle, linguistique, sociétale », en affirmant que la question des prisonniers et anciens prisonniers politiques était essentielle : « sa résolution rapide et totale est indispensable à sa réussite. » et en demandant à l’Etat « de donner sans délai des signes publics clairs. »
Toutefois la tonalité exigeante et intransigeante de la position prise par Femu a Corsica ne saurait cacher la situation délicate dans laquelle seront le parti siméoniste et plus globalement la majorité territoriale dans les jours qui viennent. Ils en sont d’ailleurs conscients.
Un vrai chemin de croix
Ils savent qu’ils seront encore confrontés à des institutions de l’Etat dont les unes soufflent le chaud et les autres le froid. Ils savent aussi qu’il leur sera reproché de se montrer trop conciliants. Ils savent également qu’avec la décision de Chambre de l’application des peines, pour tenter de garder le contrôle et espérer éviter des débordements violents qui pourraient provoquer la suspension ou l’annulation du processus Darmanin, il leur faut prendre les devants. D’où l’appel de Femu a Corsica aux représentants du monde politique et à la société civile (élus représentant la Corse lors des discussions avec le Gouvernement, Associations de maires, chambres consulaires syndicats et associations) à « prendre position en faveur de la libération de Pierre Alessandri et Alain Ferrandi, de la justice et de la vérité pour Yvan Colonna, et de la réussite du processus de négociation ». D’où la proposition de Femu a Corsica que la mobilisation soit « élargie à l’ensemble des forces politiques françaises et européennes et aux Parlements français et européen. » Enfin, ils savent que l’unanimité qui s’est manifestée lors de la Conférences des président de l’Assemblée de Corse pour déplorer que « le maintien en détention de Pierre Alessandri comme celui d'Alain Ferrandi contrevienne à la logique d'apaisement », ne durera pas et que chacun avancera ses propre pions. Certains l’ont d’ailleurs déjà fait. Lors d’une conférence de presse qu’il a tenu à Bastia devant le Palais de Justice, le Collectif L’Ora di u Ritornu a demandé la suspension du dialogue engagé avec l'État.
Au nom de Core in Fronte, Paul-Félix Benedetti a annoncé une décision en ce sens quelques minutes après avoir appris la décision de la Chambre de l’application des peines et expliqué : « Aujourd'hui, ce n’est pas une décision de justice qui est rendue, c’est une décision d’Etat instrumentalisée par le parquet. Je crois qu'on doit demander des clarifications. C’est blanc ou noir, nous on ne marche pas dans le gris. » Corsica Libera a adopté quelques heures plus tard la même position en demandant « à l'ensemble des élus concernés de reporter leur présence à ces discussions (celles de Paris, NDLR) jusqu'à la libération de tous les prisonniers politiques ». Le parti siméoniste et la majorité territoriale pourront peut-être compter sur un soutien de… leur meilleur ennemi. En effet, par la voix de son leader Jean-Christophe Angelini, le PNC-Avanzemu a appelé à « parler sans délai entre nationalistes et au-delà, entre sensibilités politiques très différentes » pour « examiner les voies et moyens de sortie de crise ».Mais prudence, à l’heure où sont écrites ces lignes, PNC-Avanzemu n’a encore pas décidé s’il suspendra ou non sa participation au processus Darmanin en attendant que soit trouvée la « sortie de crise » et Jean-Christophe Angelini a semble-t-il jeté une pierre dans le jardin siméoniste en suggérant que la décision de la Chambre de l’application des peines rendait nécessaire une nouvelle stratégie : « Il faut un débat ouvert, notamment entre les composantes du mouvement national ». Au fond, pour l'heure du moins, seule la droite n'est cause d'aucun souci pour les siméonistes dans la crise qu'ils affrontent.
Par la voix du sénateur Jean-Jacques Panunzi et celle des élus Un soffiu novu siégeant à l’Assemblée de Corse, elle s'est prononcée pour la poursuite du processus Darmanin.
En conclusion, pour le parti siméoniste et la majorité territoriale, les jours et sans doute les semaines qui viennent risquent fort de ressembler à un chemin parsemé de pierres et d’épines sur lequel ils seront bien seuls et devront se garder de leur famille. Un vrai chemin de croix.
Pierre Corsi