Violence et efficacité en politique
La question de la violence en politique n'est pas un sujet nouveau.
Violence et efficacité en politique
La question de la violence en politique n’est pas un sujet nouveau. Il était généralement soulevé, en temps de guerre, par ceux qui désespéraient d’obtenir la victoire. Elle traversa toutes les périodes révolutionnaires et n’a pas fini d’être débattue. Aujourd’hui elle est mise sur la table par quelques excès commis en fin de manifestations, excès qui n’ont jamais cessé depuis des siècles. Faut-il rappeler que le fameux slogan « CRS SS » date de 1947 et fut lancé par des mineurs en grève qui ne se privaient pas d’user de violence contre les forces de répression elles-mêmes terriblement brutale.
Comparer ce qui peut l’être
Le ministre de l’Intérieur a usé du terme d’« écolo-terrorisme » pour qualifier l’action de quelques centaines de personnes en fin de manifestation écologique. Hormis l’outrance du terme, on remarquera qu’il a bien pris garde de ne pas utiliser un vocable identique pour les manifestations de Bastia et d’Ajaccio survenues après la mort d’Yvan Colonna, autrement plus dangereuses pour les forces de l’ordre. Vraisemblablement ne voulait-il pas mettre de l’huile sur un feu qui menaçait de devenir une explosion. Mais c’est dire l’attitude politicienne du ministre en la matière. Quelques jeunes gens qui lancent de la soupe sur des vitres protégeant des œuvres d’art ou se collent les mains sur des cadres et voilà la presse continentale qui hurle au scandale.
Le sage et l’imbécile
Un proverbe chinois cité ad nauseam dit : « Quand le sage montre la lune, l’imbécile regarde le doigt ». Que veulent dénoncer ces militants : le suicide de plus en plus rapide de l’humanité à force de consumérisme, la destruction en un demi-siècle de la moitié des espèces vivantes à cause de la rapacité humaine, les destructions causées par le réchauffement climatique qui vont d’abord impacter les régions les moins développées qui ne sont responsables que de 10 % de la pollution. Mais surtout ils ont agi alors qu’en Égypte se réunissent les nations pour discuter et encore discuter de mesures qui permettraient peut-être de limiter les dégâts. Et à quoi assiste-t-on ? Au pitoyable déballage des désaccords avec in fine un recul d’actions positives par rapport à l’année précédente. N’est-ce pas là une bonne raison de jeter de la soupe sur les vitres protégeant des biens qui n’ont en définitive que la valeur que les êtres humains veulent bien leur accorder. Que vaudront les peintures de Goya ou de Van Gogh si l’espèce humaine vient à disparaître ?
Une violence qui va croître
La question de la violence n’est pas une affaire d’éthique n’en déplaise aux pacifistes de tous crins. C’est un outil, un instrument pour se défendre ou pour attaquer. Sur la question du climat, nous voyons des femmes et des hommes qui sonnent le tocsin depuis plusieurs décennies. En vain. Chaque mois, des jeunes se mobilisent pour crier leur angoisse. En vain. Le massacre des autres espèces continue comme si de rien n’était. La déforestation n’a jamais été aussi intense. Toujours pour une question de profit. Les trois pays les plus pollueurs, la Chine, l’Inde et les États-Unis ne veulent rien entendre. Pire, ils sont dirigés par des autocrates qui ne cherchent qu’à accroître leur pouvoir et leur gloire. Alors que faut-il faire ? Attendre et pleurer ? Prier. Malheureusement les pouvoirs, notamment en démocratie, sont sensibles aux émois populaires. Ils craignent les flambées de violence qui mettent en danger leur image de marque et somme toute leur existence même. Toutes les évolutions sociales et même culturelles ont existé au prix de violence. La codification du travail, les congés payés, la sécurité sociale ont nécessité des manifestations, des morts, des coups. Le droit des femmes n’est jamais allé de soi. Il a fallu l’imposer au mépris des lois rétrogrades. Les corps constitués sont par définition conservateurs. Mais pour le coup, il s’agit de l’avenir de ces jeunes, de leur survie dans un monde acceptable. Ils ont mille fois raison de se révolter.
Et si malheureusement ils doivent user de violence pour se faire entendre par une supposée élite sourde à force de pouvoir solitaire, ils s’engageront sur cette voie périlleuse sans qu’on puisse les condamner. Cela ne veut pas dire que toutes les expressions de cette colère sont intelligentes ou même justifiées. Parmi les écologistes existent des complotistes, des délirants. Mais il n’empêche : il y a aujourd’hui danger de mort et donc légitime défense. Ce n’est pas le messager qu’il faut condamner, mais celles et ceux qui se refusent à constater le réel. Et parfois la violence sociale est la seule façon de rappeler à nos dirigeants qu’ils sont au service de la collectivité, qu’ils sont chargés de sa protection et non de sa destruction. Alors oui il y a de fortes chances que la violence écologique augmente. Elle sera comme la douleur, un avertissement qui augmentera au fur et à mesure que le corps malade ne réagira pas.
GXC