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Canada : régulation très limitée du marché immobilier

Il n' y a pas de quoi fouetter un chat.

Canada : régulation très limitée du marché immobilier



Il n’y a vraiment pas de quoi fouetter un chat. Pourtant le lobby immobilier brandit le martinet. Une fois encore, il est vérifié que, partout et toujours, la plupart des acteurs et des intérêts qu’il représente et défend, sont opposés à toute régulation.


Sur le territoire canadien, aux termes d’une loi entrée en vigueur le 1er janvier dernier, et ce, jusqu'au 31 décembre 2024, une partie des non-Canadiens n'a plus le droit d'acheter certains biens immobiliers à destination résidentielle. Cette mesure avait été proposée par le Premier ministre Justin Trudeau avant les élections fédérales ayant eu lieu en septembre 2021. Son parti l’avait alors défendue en expliquant qu’il convenait de freiner la spéculation, la flambée des prix et la dépossession des Canadiens qu’avaient accentué l’accroissement de la demande et le ralentissement de la construction intervenus durant la pandémie Covid : « La désirabilité des maisons canadiennes attire les profiteurs, les riches sociétés et les investisseurs étrangers. Cela conduit à un véritable problème de logements sous-utilisés et vacants, de spéculation effrénée et de montée en flèche des prix (… .)
Pour stabiliser le marché résidentiel en sortie de pandémie de la Covid-19, nous interdirons pendant deux ans aux investisseurs étrangers d’acheter des propriétés résidentielles non récréatives, à moins qu’il soit confirmé que l’achat constitue un prélude à un emploi ou une immigration au Canada au cours des deux années qui suivent. »


Vent debout !

Le lobby de l’immobilier est vent debout contre le texte. Il met en doute son utilité et son efficacité en avançant que les prix et la demande ont baissé depuis plusieurs mois (du fait de la hausse des taux hypothécaires ayant résulté de celle des taux d'intérêt) ; que les investisseurs étrangers représentent moins de 5 % des propriétaires de logements ; que seul accélérer la construction de logements neufs permettrait le retour à une offre suffisante et à des prix abordables. Il dit craindre que la réputation du Canada en tant que nation multiculturelle et terre d’accueil soit mise à mal. « L’interdiction de l'achat de propriétés résidentielles par des non-Canadiens peut avoir un impact sur notre réputation de nation accueillante » a en ce sens affirmé l'Association de l'immobilier canadien. Il dit s’inquiéter que les nouveaux arrivants, ne pouvant devenir propriétaires, peinent à s'intégrer rapidement.

« Nous nous préoccupons grandement de cette prohibition (…) On leur dit de venir, mais on ne les accueille qu’à moitié » a déploré la présidente d’une des Chambres de commerce de l’Ontario.


Pas de quoi fouetter un chat !

Le lobby immobilier est vent debout malgré que le gouvernement canadien ait limité l’interdiction d’acquérir aussi bien dans la durée que dans le champ d’application et ait tenu compte de plusieurs situations particulières. Durée d’application : deux ans. Champ d’application : exclusivement en ville, uniquement pour les maisons individuelles, les maisons jumelées ou en rangées, le logement résidentiel en copropriété comptant au plus trois logement. Le foncier rural, les terrains vacants, les immeubles comprenant quatre locaux d’habitation (et plus) et les structures touristiques ne sont donc pas concernés, tout comme ne le sont pas les réfugiés, les étrangers résidents permanents, les personnes bénéficiant du régime de la loi sur les Indiens, les non-Canadiens qui agissent avec leur conjoint légal ou de fait si ce dernier est un citoyen canadien, les États étrangers ayant besoin de locaux à des fins diplomatiques ou consulaires. Par ailleurs, le gouvernement s’est réservé le droit de pouvoir énoncer de nouvelles exemptions ou conditions d’application. A y bien regarder, l’interdiction est aussi souple que limitée. Il n’y a vraiment pas de quoi fouetter un chat. Pourtant le lobby immobilier brandit le martinet. Une fois encore, il est vérifié que, partout et toujours, la plupart des acteurs et des intérêts qu’il représente et défend, sont opposés à toute régulation.


Alexandra Sereni
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