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France : Les nouveaux féodaux disent non

Des présidents de région se lèvent contre le pouvoir central....
France : les nouveaux féodaux disent non

Pour conserver leurs prérogatives et leurs influences, et aussi par esprit partisan, des présidents de région se lèvent contre le pouvoir central et l’avis d’une majorité d’habitants.



Emmanuel Macron consulte en vue de concrétiser une réforme des institutions. Sont soumis à la réflexion et à la discussion une réduction du nombre de parlementaires, une réforme des modes de scrutin, un retour au septennat, la création du mandat de conseiller territorial (regroupement des mandats de conseiller régional et conseiller départemental) et une évolution institutionnelle de la Région Corse. Est aussi sur la table le redécoupage de quatre régions (Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, Grand Est, Auvergne-Rhône-Alpes) issues de la fusion d’anciennes régions intervenues dans le cadre de la réforme territoriale de 2015. Concernant ce dernier point, le camp présidentiel prépare le terrain en remettant en cause l’efficience et la pertinence de la réforme territoriale de 2015. Il est dit qu’elle a été mise en œuvre dans l’urgence au prétexte de s’aligner sur des critères préconisés par les instances de l’Union Européenne. Il est distillé qu’elle a été bâclée car le mille-feuille territorial (communes, établissements publics de coopération intercommunale, départements, régions) a été conservé.
Il est mis en exergue que les quatre régions qu’Emmanuel Macron souhaite redécouper ne relèvent ni d’une cohérence territoriale, ni de la démocratie locale, ni de la proximité. « Pour développer la démocratie locale, je suis favorable à la fin des grandes régions, pour revenir à un schéma plus simple et à taille humaine » a dernièrement déclaré le secrétaire général du parti présidentiel (Renaissance). Il convient aussi de retenir deux éléments.
La Cour des Comptes a constaté que les fusions ayant déterminé la constitution des régions Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, Grand Est et Auvergne-Rhône-Alpes ont « occasionné des surcoûts importants notamment en matière de rémunération des personnels et d’indemnités des élus ». Le second est que, selon les enquêtes d’opinion, le découpage intervenu en 2015 est défavorablement jugé par les habitants : 67 % d’insatisfaction dans le Grand Est, 61 % en Occitanie, 60 % en Nouvelle-Aquitaine.


Hostilité à la démarche présidentielle


Les présidents des quatre régions concernées ne cachent pas leur hostilité à la démarche présidentielle et peuvent compter sur le soutien de leurs pairs. « Au lieu de redécouper les grandes régions, il faudrait donner plus de capacité aux élus » a souligné l’Association des Régions de France (ARF).
Les présidents ayant l’étiquette Parti Socialiste sont les plus vent debout contre tout redécoupage. « Ce projet de loi illustre parfaitement la vision de l’administration centrale dont Emmanuel Macron est le pur produit (…) Emmanuel Macron veut une France éparpillée par petits bouts, façon puzzle. (…) Avec tout le travail que l’on a fait sur le terrain depuis huit ans, plus personne ne voudrait revenir en arrière. Le seul obstacle c’est le manque de moyens » assène Alain Rousset qui préside la région Nouvelle Aquitaine. Carole Delga, qui préside la région Occitanie et l’Association des Régions de France (ARF), a fait savoir à Emmanuel Macron n’être « pas favorable à un redécoupage » car cela représenterait « une dépense d’énergie et d’argent inutile » voire « une gabegie ». En 2004, paraissait « Les nouveaux féodaux ». Dans cet essai, Roland Hureaux, membre du corps préfectoral, professeur de droit public et élu local, tout en se défendant de s’accrocher au jacobinisme, mettait en exergue une dérive possible de la décentralisation : le retour de grands féodaux ne songeant qu'à maintenir et accroître leur pouvoir.
Aujourd’hui, le possible est devenu le réel. Pour conserver leurs prérogatives et leur influence, et sans doute aussi par esprit partisan (pour le Parti Socialiste en déconfiture au niveau national, le pouvoir régional représente désormais un bastion vital), des « nouveaux féodaux » se lèvent contre le pouvoir central et l’avis d’une majorité d’habitants.


Alexandra Sereni
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