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Le Domaine de Murtoli ciblé par une enquête, trois personnes ont été mises en examen pour fraude à l'urbanisme.

Parmi elles figure Paul Canarelli, le fondateur du luxueux domaine situé sur la commune de Sartène. Diligentée par le parquet d’Ajaccio, l’enquête avait débuté à la suite d’une plainte déposée par des associations de défense de l’environnement.
Le Domaine de Murtoli ciblé par la justice

Début avril, trois personnes ont été mises en examen pour fraude à l’urbanisme. Parmi elles figure Paul Canarelli, le fondateur du luxueux domaine situé sur la commune de Sartène. Diligentée par le parquet d’Ajaccio, l’enquête avait débuté à la suite d’une plainte déposée par des associations de défense de l’environnement.

Les bergeries de luxe de Murtoli de nouveau visées par une enquête judiciaire. Jeudi 6 avril, Paul Canarelli, fondateur du prestigieux domaine hôtelier, son ex-compagne Valérie Guilbert, ainsi que Stéphane Lucchini, l’architecte du complexe, ont été mis en examen pour fraude à l’urbanisme. Confirmée par le procureur de la République d’Ajaccio, l’information avait été révélée par nos confrères de Corse-Matin. Les trois personnes ont toutes été laissées libres à l’issue de leur présentation devant le magistrat instructeur. Toutes nient les faits reprochés.


Le dossier, qui se trouve entre les mains d’un juge d’instruction ajaccien, concerne des constructions édifiées au sein du complexe hôtelier de luxe qui comprend notamment une quinzaine de bergeries avec piscine, trois restaurants et un terrain de golf. La justice soupçonne la réalisation de travaux sans permis de construire ou autorisation préalable et en infraction avec le plan local d'urbanisme. "Malgré de multiples procédures judiciaires effectuées depuis 2005, le ou les dirigeants du Domaine de Murtoli continuent à faire les travaux de rénovation, construction, aménagement en l'absence totale de demande d'autorisation d'urbanisme", a conclu l'enquête, selon des documents consultés par l'AFP.


"Points prescrits et régularisés"

Pour la défense de Paul Canarelli, il s’agit d’un "non-dossier". "La procédure qui vise Paul Canarelli est fondée exclusivement sur des infractions non-établies à ce jour aux règles de l’urbanisme, a expliqué à France 3 Corse son avocat, Maître Philippe Dehapiot. Il est serein sur la suite de la procédure. Les points qui sont soulevés sont, en effet, pour la plupart prescrits, déjà régularisés, ou - nonobstant ce que peut en dire la partie adverse - en cours de régularisation, en accord avec les services administratifs concernés." L’avocat parisien a ajouté qu’il allait "saisir la chambre de l’instruction afin de demander l’annulation de cette procédure et de ces mises en examen".

Les enquêteurs s’interrogeaient également sur une subvention de 400.000 euros de l’Odarc dont une partie aurait pu servir à construire des "chambres et suites de luxe".

"Aucune subvention n'a été perçue pour la construction de trois bâtiments agricoles de la part de l'Office du développement agricole et rural de la Corse (Odarc)", a affirmé Me Dehapiot qui souligne que "Paul Canarelli dément ces accusations particulièrement graves, qui attentent à de son honneur et à sa probité."


Dépôt de plainte

Ces mises en examen ont été prononcées après quatre ans d’investigations. En 2019, une enquête préliminaire avait été ouverte à la suite d’une plainte au pénal déposée par les associations de défense l’environnement U Levante, ABCDE et France nature Environnement. Ces dernières pointaient des constructions réalisées, selon elles, en l'absence d'autorisation d'urbanisme, dans des zones inconstructibles, en espace remarquable de la loi littoral ou en site classé entre 1996 et 2019.

En 2021, une information judiciaire avait été ouverte après que U Levante s’était constituée partie civile. Avocat de l’association, Benoist Busson a salué "un travail très sérieux qui a duré quatre ans". "Un juge d'instruction a été saisi par le procureur Eric Bouillard en 2019, c'est donc une affaire importante, a-t-il déclaré sur France 3 Corse.
Contrairement à ce que peut dire l'avocat de Paul Canarelli, je n'ai pas connaissance de régularisation, et ce n'est pas possible en droit. U Levante réclame la remise en état et la démolition de ces constructions.
"

En 2016, la cour d’appel de Bastia avait condamné le Domaine de Murtoli notamment pour "destruction d’espèces animales et végétales".



Interview :Benoist Busson : "Tout n’est pas prescrit"



L’information judiciaire concernant le domaine de Murtoli fait suite à une plainte au pénal déposée par plusieurs associations de défense de l’environnement, dont U Levante qui s’est constituée partie civile. Pour Me Benoist Husson, spécialiste en droit de l’environnement et avocat de l’association, "il y a débat sur la prescription".

Que réclame U Levante, l’association que vous représentez ?
Comme d’habitude, ce que nous voulons, c’est la remise en état du site. Tout simplement aussi parce que tout un chacun en Corse comme ailleurs on doit être normalement égal devant la loi. Tout le monde doit demander un permis de construire quand on construit. Pour un abri de jardin, il faut également une déclaration de travaux. La loi est pour tout le monde la même. On demandera donc la remise en état du site.


Selon vous, plusieurs constructions seraient illégales. La défense de M. Canarelli indique que des points sont prescrits. Votre réaction ?
Les constructions visées sont très anciennes pour certaines. Il y a donc un débat sur la prescription pour les plus anciennes qui remontent aux années 1990. Celui-ci aura lieu devant le juge qui tranchera. Il y aura sans doute des appels. On ne peut pas dire assurément que tout est prescrit, loin de là. Après, il y a entre 20 et 30 constructions pour lesquelles on sait qu’il n’y a pas prescription.


Quid des autres points qui ont été régularisés ou sont en voie de l’être ?
Pour ce qui est de la régularisation, je rappellerai simplement que dans le cadre de la loi littoral, on construit dans la continuité du village ou de l’agglomération. Et à Murtoli, il n’y aucun village ni aucune agglomération. Il y a aussi le débat sur la reconstruction des bergeries. Les informations que nous avons démontrent assez largement que c’étaient simplement des ruines. Quand vous avez un tas de caillou par terre, vous n’avez pas un droit à reconstruire. Ces genres d’infractions sont finalement très classiques. Il y a déjà eu beaucoup de décisions des juridictions.


Vous avez déclaré que ces régularisations n’étaient pas possibles en droit. Que voulez-vous dire ?
Ce n’est pas en droit régularisable mais, malheureusement, le maire de Sartène peut fermer un peu les yeux comme l’a fait l’État à de nombreuses reprises depuis de trop nombreuses années sur le secteur de Murtoli. Lorsqu'un permis de construire est octroyé, même s’il est illégal, une fois les délais passés, on ne peut plus rien faire. En revanche, je pense que suite à l’enquête de la gendarmerie et du juge d’instruction qui a quand même duré 4 ans, il va être difficile maintenant pour les services de l’État de laisser passer des permis de construire que nous estimons de complaisance.

À notre connaissance, aujourd’hui, il n’y a pas de permis de construire de régularisation qui ont été délivrés. Est-ce qu’il y en a de déposer ? Je ne le sais pas. Mais je serais très étonné qu’ils aboutissent parce que l’État est en première ligne et doit faire preuve de vigilance sur ce dossier-là. On est dans un secteur qui n’est pas densément construit. Seules les installations agricoles, à certaines conditions, sont autorisées. Aucune construction nouvelle n’est donc possible dans ce secteur.

A.S
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