De Courson : drôle d'ami !
Hier pourfendeur des arrêtés Miot, un ami de la corse ! Mais .....
De Courson : drôle d’ami !
Charles Amédée Simon du Buisson de Courson, hier pourfendeur des arrêtés Miot, un ami de la Corse. Encore un ! Mais, au fond, a t-il vraiment changé ? Pas si sûr. En effet, si l‘on prend le peine d’analyser ses réponses à l’occasion d’une récente interview, il y a matière à douter.
En 1998, députés et sénateurs ont fait rentrer la Corse dans le droit commun en matière de droits de succession. Charles Amédée Simon du Buisson de Courson a été l’initiateur de ce mauvais coup. A l’Assemblée Nationale, à l’occasion de la discussion de la loi de finances de 1999, il a déposé un amendement disposant que la déclaration des successions immobilières ouvertes en Corse soit rendue obligatoire. Ce qui a ouvert la voie à une taxation des successions à laquelle les familles insulaires échappaient du fait d’un régime dérogatoire découlant des arrêtés Miot. En effet, au début des années 2010, il a été instauré un régime transitoire d’exonération partielle valant uniquement pour les biens acquis avant 2002 et, d’ici moins de cinq ans, le droit commun étant devenu la règle, les Corses paieront « plein pot ».
En 2016, s’appuyant sur un rapport de la Cour des comptes qui fustigeait la gestion des impôts en Corse et plus particulièrement des dérogations « dépourvues de bases légales », et souhaitant faire en sorte que « le régime de droit commun soit appliqué sur tout le territoire français, y compris la Corse », Charles Amédée Simon du Buisson de Courson a tenté de faire supprimer deux dérogations : l’exonération du droit de circulation et de transport des vins produits et consommés en Corse octroyée par une loi de 1897 ; l’exonération de taxe spéciale sur certains véhicules routiers (TSVR), appelée aussi taxe à l’essieu, applicable aux véhicules de plus de 12 tonnes immatriculés et circulant en Corse (l’intéressé a par ailleurs annoncé qu’il s’attacherait ultérieurement à faire supprimer la non-application de la TVA sur les vins et la dérogation fiscale sur le tabac faisant que les cigarettes étaient vendues moins cher en Corse que dans l’Hexagone).
Les deux amendements qu’il a déposé en ce sens ont été acceptés par la Commission des finances de l’Assemblée Nationale et pouvaient donc être soumis au vote des députés lors de la discussion de la loi de finances de 2017. Il a fallu que le président du Conseil exécutif Gilles Simeoni et les députés corses montent au créneau pour que ces amendements soient retirés en séance par la Rapporteure générale du Budget. Gilles Simeoni n’avait alors pas mâché ses mots : « On connaît Monsieur De Courson qui fait partie […] d’un certain nombre d’élus de la classe politique française, qui se sont distingués de façon constante par des comportements obsessionnels et des attitudes systématiques hostiles aux intérêts de la Corse et des Corses. » Laurent Marcangeli n’avait pas été en reste : « Il ne faut pas que De Courson oublie que son département a bénéficié, dans le temps, avec la vignette automobile d’un effet d’aubaine qui lui a octroyé des avantages que n’avait pas le reste du territoire national. » (le Conseil général de la Marne dont Charles Amédée Simon du Buisson de Courson était un des élus, votait un tarif plancher annuel très inférieur à celui des autres départements et, attirant ainsi l’immatriculation de la quasi-totalité des véhicules de location de France, réalisait de belles recettes). Charles Amédée Simon du Buisson de Courson n’est pas un copain d’avant.
Bon copain de circonstance. Ami, mouais...
Le 17 Octobre 2018 : évolution ! A l’initiative des trois députés nationalistes corses élus l’année précédente qui ont obtenu l’adhésion de 13 députés de différentes sensibilités (centristes, radicaux, écologistes...), est créé le groupe parlementaire Libertés et Territoires. Parmi les 13 : Charles Amédée Simon du Buisson de Courson ! Celui-ci fait alors siens les trois fondamentaux du groupe : valeurs communes, respect de la liberté et…. prise en compte de la voix des territoires dont la revendication de l’autonomie pleine et entière de la Corse. Tout peut arriver un jour… Jean-Félix Acquaviva le confirme d’ailleurs : « Nous avons eu des discussions de fond sur la nécessité de comprendre que ce qu’il se passait en Corse aujourd’hui est un fait incontournable.
De Courson reconnaît que cette vision n’est pas incompatible avec sa vision de la République et votera sur les propositions que le groupe fera en matière d’autonomie de la Corse et de révision constitutionnelle. » Le 28 juin 2022 est constitué le groupe parlementaire Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT). Parmi les 20 membres qui outre déclarer vouloir contribuer à répondre aux urgences dans différents enjeux nationaux (pouvoir d'achat, énergie, emploi, santé, lutte contre le réchauffement climatique et adaptation à ses effets, revitalisation de la démocratie), soutiennent la mise en place de « solutions ambitieuses, concertées, justes et adaptés aux spécificités des territoires », on retrouve les trois députés nationalistes corses et Charles Amédée Simon du Buisson de Courson. Celui qui voulait moins de dix ans auparavant que « le régime de droit commun soit appliqué sur tout le territoire français, y compris la Corse », est apparemment devenu un bon copain de circonstance. Ces derniers jours, le bon copain a même semblé vouloir être considéré comme un ami. Dans une interview publiée par Corse Matin, il a en effet couvert de louanges Gilles Simeoni et sa politique, et affirmé être très favorable à ce que la Corse obtienne un véritable statut d’autonomie et une reconnaissance de ses spécificités : « Je pense que plus on donnera d'autonomie à l'île, avec en contrepartie une responsabilisation des élus insulaires, mieux la Corse et la France se porteront.
C'est l'intérêt national, celui du territoire insulaire également, de trouver, au regard des spécificités de l'île, une large autonomie dans le cadre de la République. » Alors, Charles Amédée Simon du Buisson de Courson a t-il vraiment changé ? Pas si sûr ! Si l‘on prend le peine d’analyser certaines de ses réponses à Corse Matin, il ressort qu’il considère que la Corse coûte cher à la France et que les élus corses ont toujours fait dans la facilité et la sébile, et qu’il juge nécessaire que la République laisse les Corses se débrouiller entre eux et avec leurs propres ressources et mette les élus corses au pied du mur : « Chacun doit pouvoir s'occuper de ses affaires […]
Il s'agit de renforcer les compétences de l'Assemblée territoriale dans une série de secteurs et ne pas se contenter d'attribuer des dotations. Je suis plutôt de ceux qui sont favorables à une certaine autonomie fiscale pour la Corse. […] Il n'est pas sain pour la Corse, cela ne l'est pas non plus pour les départements et régions auxquels on a supprimé pratiquement tous leurs impôts, de vivre de subventions de l'État. Vivre des dotations d'un État qui est en faillite, comme le disait le Premier ministre Fillon, c'est de la folie. » Par ailleurs, l’intéressé n’exprime aucun regret concernant la démarche qui a été la sienne quelques années auparavant. En effet, à la question « Révolue l'époque où vous vilipendiez les dérogations accordées à la Corse, à commencer par celles liées aux droits de succession ? », il a répondu : « Vous évoquez probablement le fameux Arrêté Miot. Je rappelle que ce que l'on appelait une exonération n'était pas une exonération en droit, c'était une exonération de fait puisque les pénalités n'avaient pas été instaurées, elles avaient été supprimées dans l'île, ce qui est malsain et tout le monde le reconnaît. Même s'il a fallu dix ans pour remettre de l'ordre, on va y arriver et tant mieux.» Drôle d’ami !
Pierre Corsi
Qui est- t-il ?
Né il y a sept décennies dans le très huppé et plutôt réactionnaire 16ème arrondissement de Paris ; deux particules ; issu de grandes familles de la noblesse européenne ; comptant parmi ses ascendants plusieurs personnalités politiques dont deux avaient un caractère bien trempé (l’une, député de la noblesse, a voté en 1793 la mort de Louis XVI ; l’autre, son grand-père, député de la République, a refusé en 1940 de voter les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, a été déporté et est décédé dans un camp de concentration) ; haut fonctionnaire (ancien conseiller référendaire de la Cour des comptes, magistrat ayant pour mission de contrôler les comptes publics et d’assurer la régularité des opérations financières de l’État), député depuis 1993 (7 mandats, 30 ans passés à l’Assemblée Nationale, durée de présence dans l’Hémicycle équivalant à plus d’une génération) et conseiller départemental de la Marne ?