Libertés en danger
Réduire les libertés de manifester
Libertés en danger…
Interdire au nom d'un jugement de valeur
Récemment, une polémique a opposé la première ministre au ministre de l'intérieur à propos d'une manifestation de l'extrême-droite radicale à Paris. Un demi-millier de néonazis ont arpenté le pavé de la capitale pour célébrer la disparition il y a vingt ans d'un de leurs militants qui s'était tué en fuyant la police. Le préfet de Paris avait autorisé la démonstration soulevant un tollé de l'opposition. Celle-ci avait fait remarquer qu'il y existait une contradiction entre interdire la moindre casserolade, le moindre rassemblement destiné à conspuer le président et un de ces ministres et autoriser une marche de fascistes. Le problème est le principe même de liberté requiert la neutralité. Si ces nazillons ne se répandent pas en mots d'ordre susceptibles de les mener devant les tribunaux, il n'y a pas à interdire leur rassemblement aussi odieux soit-il. Car si le ministre de l'Intérieur détient le droit divin de décider ce qui est bien ou ce qui ne l'est pas, demain, il mettra un veto sur toute action de l'opposition.
Un mouvement planétaire
Mais la raison pour laquelle on doit résister au désir bien humain de vouloir toujours plus de coercition est qu'aujourd'hui les démocraties se trouvent en grand danger. La pente autoritaire est très forte dans bien des pays devenus stratégiques avec l’émergence d’un monde multipolaire. C’est le cas de l’Inde du premier ministre Narendra Modi comme de la Turquie d'un Erdogan dont on se demande s'il accepterait d'être battu aux prochaines élections. Nous sommes aujourd'hui confrontés au retour de la guerre à nos portes, alors que nous pensions que l'Union européenne nous préservait à jamais d'un tel malheur. Nous ne pouvons que constater également la montée en puissance d’un populisme d’extrême droite en Suède, en Italie comme en France, où le Rassemblement national devient désormais une option plus que vraisemblable.
C'est encore plus vrai dans l'Europe orientale où les anciennes républiques socialistes ont été remplacées dans bien des cas par des états où prédomine un populisme xénophobe et raciste. Pourtant, les échecs successifs des partisans du Brexit au Royaume-Uni ont démontré la vanité d'une tentative de reprendre le contrôle d’un destin national soi-disant libéré des contraintes bruxelloises. Il faudrait ajouter à ces exemples celui d'Israël aujourd'hui dominé par une coalition laico-religieuse d'extrême qui fait face à un monde arabe, palestinien compris, toujours plus esclave là aussi d'un totalitarisme religieux. Et comment ne pas parler du trumpisme américain, de la récente victoire au Chili des nostalgiques du général Pinochet… Bref les démocraties semblent être vouées à disparaître si on n'y prend pas garde.
Et en France…
Les pouvoirs ont toujours tendance à justifier leurs échecs par des causes exogènes à leur propre gestion :la crise mondiale, l'immigration, le terrorisme, la violence etc. Aujourd'hui, le ministre Darmanin qui n'hésite plus à contrer la première ministre, ambition présidentielle oblige, fait feu de tout bois : lois liberticides, nouvelles mesures de contrôle des citoyens, usage de la force de façon disproportionnée à l'encontre des manifestants. Mais plus graves, généralement ces mesures sont approuvées voire demandées par des citoyens angoissés par la montée des périls ou du moins par ce qu'en dit la presse qui, il faut le rappeler est en France entièrement la propriété de milliardaires. Je ne vais prendre qu'un exemple : celui de nos collectifs antimafia qui, au lieu d'avoir une réflexion globale sur l'évolution de la société, se focalisent sur leur unique centre d'intérêt et n'ont de cesse d'exiger un durcissement de la loi.
Peut-être de nouveaux moyens seront-ils nécessaires pour juguler la montée mafieuse. Mais isoler ce mal du fonctionnement plus général de la société, ne pas comprendre qu'il est intrinsèque au capitalisme, c'est jouer avec le feu et contribuer inconsciemment pour certains, moins pour d'autres, à la réduction de l'espace des libertés accordées au citoyen pour s'exprimer. Le passé nous a hélas démontré qu'une loi élaborée à la va-vite contre une attitude précise finissait toujours par se retourner contre la contestation populaire.
Réflexion ne signifie pas inaction mais simplement prudence.
GXC