• Le doyen de la presse Européenne

Le padre soler

Un retour sur terre difficile
Le padre Soler

J’écoutai - on l'écouterait des nuits jusqu'à l’aube, enivré de havanes et abreuvé de fine Napoléon, de la célèbre maison Courvoisier qui n'ose plus, conis regnans, proposer aux connaisseurs « The Brandy of Napoleon », le Fandango du Padre Soler pour clavecin, et j'étais transporté.

Oui transporté dans un monde de beauté dans lequel la laideur auditive ne faisait pas la loi, où l'on était omis des odeurs nauséabondes de la malbouffe à l'huile de m…, un monde dans lequel la rue ne vociférait pas d'insanités dans des idiomes incompréhensibles, qui sont au phrasé de Mallarmé ce que le grognement est à la réflexion, et j'en étais ravi. Le Padre est de la génération de Scarlatti, cela se ressent dans sa rythmique, avec le rappel de la guitare pour laquelle ses pièces pourraient avoir été écrites quand elles l'ont été pour viole de gambe ou mandolines. Quelle beauté !

Le retour sur terre est difficile après de tels sommets, et pourtant que l'évasion est nécessaire en ces temps de désolations et de ruines. A quoi cela sert-t-il donc de voter encore, quand les idiots règnent sur les consciences et abreuvent les pauvres gens d'analphabêtises à manger du foin, et qu’à force de répétitions terrorisantes on arrive à rendre crédibles ? Lisez, Bon D…,! Lisez, Le voyage où il vous plaira de Musset, par exemple, illustré par Tony Johannot, et vous verrez les figures de cauchemar des imbéciles qui vous conduisent au plus noir de l’enfer, pour n'être plus que de pâles copies de la valetaille empressée qui s'agglutinait dans le couloirs des barbares couronnés, vainqueurs de la Rome Impériale. C'est simple, cette musique, c’est la télé. Il suffit de presser le bouton, d’aller sur YouTube, et toute la musique, la vraie, rapplique, si l'on sait la choisir, et l'on quitte l'ectoplasme des malfaisants qui vocifèrent en faisant les gros yeux dans les émissions où on les exhibe pour faire peur, tandis qu'on tue à tire-larigot des passants dans la rue en jurant qu'elle n'a jamais été aussi sûre ! N'écoutez plus les in-fos, c'est une came pour drogués à la frousse à la micron, restez sur la musique ! Si vous voulez vraiment voter, parce que tout ce monde vous empa-tiffouille, et même vous emberluche comme le disait Chéri-Bibi, alors mettez un bulletin dans l’urne qui ne fera pas la risette à tous ces imposteurs.

Et écoutez Rossini sur Youtube encore, le merveilleux concert de 1985 Rossini à Versailles, avec un acteur britannique incroyable qui est le sosie du Maître, Maryline Horne qui chante depuis le paradis, surtout la canzonetta spagnuola. Le bonheur au milieu de l’horreur des temps présents, qu'on espère de courte durée, avec le départ bientôt des malandrins. Rossini, le Padre Soler, c'est autre chose !Pendant ce temps là on se traine l’horrible histoire des otages du Hamas, et pour bien faire, le groupe Wagner menace de donner des armes terribles au Hezbollah. Ça devient la forêt de Bondy au niveau planétaire.

Des excités vous navrent à coup de couteaux au coin des rues, les terroristes les plus hideux jouent les patriotes dans la bande de Gaza, une fichue bande que celle-là, et quelques beaux esprits viennent vous parler de résistance !Rossini, vite ! Le Padre Soler, et mieux encore Lully avec les extraits remarquables du film, Le Roi danse. Que c’est beau quand c’est beau, comme disait une de mes vieilles tantes, elle avait raison, mais je voudrais ajouter, en pensant à elle bien sûr, mais aussi aux temps funestes que nous vivons, et au torrent d’insanités vulgaires et pornographiques qu’on déverse dans nos oreilles, mais que c’est laid quand c’est laid. Messieurs les chapitreurs du pire, et tartuffes de la bonne conscience, du balai !

Un peu d’azur pour finir, je l’emprunte à Paul Verlaine:

Mystiques barcarolles,
Romances sans paroles,
Chère, puisque tes yeux,
Couleur des cieux,
Puisque ta voix, étrange
Vision qui dérange
Et trouble l’horizon
De ma raison,
Puisque l’arôme insigne
De la pâleur de cygne,
Et puisque la candeur
De ton odeur,
Ah ! puisque tout ton être,
Musique qui pénètre,
Nimbes d’anges défunts,
Tons et parfums,
A, sur d’almes cadences,
En ces correspondances
Induit mon cœur subtil,
Ainsi soit-il !


Jean-François Marchi
Partager :