Langue sur ordonnance
Si le français est la langue la plus parlée dans l'Hexagone, les dialectes locaux, mais aussi certaines langues étrangères vivent au quotidien dans la bouche de millions de compatriotes.
Langue sur ordonnance
Si le français est la langue la plus parlée dans l'Hexagone, les dialectes locaux, mais aussi certaines langues étrangères vivent au quotidien dans la bouche de millions de compatriotes. Le développement de la langue française en tant que langue distincte a été façonné par une variété de facteurs historiques et culturels au fil des siècles. Avec des mots nouveaux. Les éditions 2024 des dictionnaires sont sous presse.
Langue sur ordonnance
L’ordonnance de Villers-Cotterêts signée en 1539 par François 1er
est souvent présentée comme l’acte qui a officialisé le français. Pourtant, ce texte de procédures est assez éloigné des intentions de linguiste puisqu’il n’avait d’autre objectif que d’accélérer le cours de la justice, en supprimant les formalités inutiles. Parmi les 192 articles de l'ordonnance, seul le 111 à une référence linguistique : les actes de justice devront dorénavant être rédigés « en langage maternel françois et non autrement ». Cette décision vise à exclure le latin, langue élitiste non maîtrisée par le peuple. L’ordonnance a ainsi démocratisé le droit, en rendant la justice moins obscure pour le peuple. Pour autant, la formule est suffisamment alambiquée pour que les linguistes se déchirent sur la signification. Est-ce que François 1er a voulu dire que le langage maternel françois correspond à toutes les langues maternelles parlées en France, ou bien seulement celle du roi ? Selon l’historien Charles Baud, cette ambiguïté était sans doute volontaire, pour contenter tout le monde et prévenir certaines contestations parlementaires pour ménager les particularismes provinciaux. Cette formulation a ensuite sonné le glas des langues régionales, puisqu’à la Révolution, les parlers régionaux deviennent anti-républicains. Les langues régionales ont suscité la méfiance tout au long du XIXe siècle. Le français n'est devenu langue officielle qu'en 1992, avec son insertion tardive dans la Constitution (article 2). Preuve des liens entre langue, politique et société.
Lente généralisation
La lente généralisation de la langue française en tant que langue dominante et prédominante dans certaines régions s'est étendue sur plusieurs siècles et a été influencée par divers facteurs historiques, culturels et politiques. Au Moyen Âge, le français a commencé à émerger en tant que langue littéraire, et s’est renforcé dans les domaines de la littérature, de la science et de la philosophie à la Renaissance. L'Académie française, fondée en 1635, a aussi joué un rôle majeur dans la standardisation de la langue française. Elle a contribué à établir des normes grammaticales et lexicales, favorisant ainsi l'unité linguistique. La langue française a été renforcée en tant que langue officielle par des décisions politiques, notamment par l'usage du français dans les institutions gouvernementales et administratives. Le français moderne a continué d'évoluer au cours des siècles, intégrant des influences culturelles, politiques et sociales. Si l’enseignement homogène de la langue et la standardisation des outils linguistiques sont heureux pour que l’on puisse se comprendre sur un même territoire, il ne faut pas oublier que la langue est soumise à des modes, comme d’autres pratiques sociales. On estime que la langue française compte un peu moins de 300 000 mots (noms propres et noms communs compris). Tous ne sont pas dans le dictionnaire et beaucoup ne sont presque jamais utilisés. En effet, le nombre de mots couramment utilisés en français tourne plutôt autour de 30 000 mots. Dans les années 80, on estimait qu'en France un adulte connaissait entre 20 000 et 50 000 mots, mais ces chiffres ont baissé ces dernières années.
Résistance des régionalismes
Pour ce qui est des langues régionales, le rapport Cerquiglini publié en 1999 en compte 75 toujours parlées. Ces langues régionales sont reconnues et protégées par la loi. L’occitan, l’alsacien et le picard sont les plus utilisées. Le nombre de locuteurs actifs de la langue corse est compris entre 99 000 et 112 000. Il y a 48 ans, la loi Deixonne reconnaissait le corse comme une langue régionale en France et non plus comme un « dialecte allogène proche de l’italien ». La diglossie franco-corse n’est plus une originalité ou un interdit. Il existe même plusieurs variantes régionales de la langue prouvant que plus une langue est parlée sur un territoire, plus elle se diversifie et s’enrichit. C’est ce que l’on appelle une langue vivante.
Maria Mariana