La grande révolte paysanne gagne l'Europe
Alors que faire ?
La grande révolte paysanne gagne l'Europe
Il était évident qu'arriverait un jour cette confrontation de la nécessité de mesures facilitant la transition énergétique et la masse paysanne souvent réduite à l'extrême pauvreté. Nous y sommes en Allemagne, en Belgique, aux Pays Bas et désormais en France. L'équation va s'étendre aux couches les plus précarisées de la société. D'ores et déjà, la colère paysanne grandit et s'étend à l'Europe entière. Alors que faire ?
Une nouvelle vague de Gilets jaunes
La révolte des Gilets jaunes a débuté en 2018 après l'annonce d'une augmentation du fuel. C'était surtout un mouvement inorganisé de couches de la population qui vivait en périphérie des grands centres urbains. Mais il fallait aussi l'analyser comme les prémisses d'un paradoxe dangereux : le poids démesuré que va faire peser la décarbonation du monde sur les plus fragiles. La promotion pour les voitures électriques en est un autre exemple. Quel foyer précaire peut se payer une voiture électrique ? Celui des immeubles passoires également. Les mesures pourtant indispensables exigeraient une meilleure répartition des richesses nationales pour être acceptables par tous. Les ménages les plus riches parviendront toujours à s'en sortir ; ceux qui se situent en bas de l'échelle connaissent une précarisation insupportable. C'est aujourd'hui au tour des paysans dont l'immense majorité ne gagne pas l'équivalent du SMIC. Ils protestent contre l'interdiction de certains produits qui dévastent le monde du vivant au nom de leur survie. Ils refusent là encore l'augmentation du prix du fuel pour ne pas sombrer. Les gouvernants ont donc à faire le choix du roi Salomon : qui et quoi vont-ils sacrifier pour ne pas faire face à une jacquerie européenne ?
Des risques d'embrasement généralisé ou de victoire de l'extrême droite
Autant les Gilets jaunes étaient désorganisés autant le monde paysan a déjà montré par le passé ses capacités tactiques voir stratégiques lorsqu'il entre en révolte. Si le feu prend dans les campagnes, les pêcheurs suivront mais également ce qui reste du monde ouvrier. On perçoit aujourd'hui un mécontentement, un ressentiment qui risque fort d'être le carburant d'un gigantesque incendie. Et pourtant, les gouvernants vont devoir faire des choix essentiels qui vont compter pour le futur. Qui satisfaire ? Les paysans au risque de mettre en péril le peu de mesures prises pour la transition énergétique ou satisfaire les paysans en lâchant du lest ? L'enjeu est essentiel. L'humanité a déjà raté le rendez-vous du degré et demi nécessaire pour stabiliser le réchauffement climatique. Continuer sur la voie actuelle c'est être assuré d'avoir un enchaînement de catastrophes qui viendront impacter la vie de tous les êtres vivants. Mais le temps n'est pas le même pour les plus pauvres qui existent dans la survie et les politiques qui ont le devoir de calculer sur le temps long. Compte tenu des intérêts des uns et des autres, il y a fort à parier que le gouvernement français va céder tout au moins face aux couches sociales les plus agressives ne serait-ce que pour éviter une victoire de l'extrême droite aux élections européennes.
Immigration, guerre et hausse des prix…
Il est vrai que nous assistons à une convergence des périls : guerre à l'Est, au Moyen Orient, crise économique généralisée, immigration, inflation, crise climatique. Tous les paramètres sont réunis pour provoquer une victoire planétaire des régimes les plus durs. Il est vrai qu'aujourd'hui les propositions de gauche rejoignent les théories libérales et n'apportent guère de solutions aux plus démunis. Enfin, la vague américaniste avec toutes ses aberrations déstabilise profondément une culture occidentale submergée par celle des États-Unis bien différente en vérité. Partagée entre un messianisme évangélique délirant et le délire tout aussi violent du wokisme, cette sous-culture occidentale participe au déclin généralisé de notre propre culture déjà mise à mal par une démographie descendante. Dans un tel contexte, les populismes qui promettent la lune et les étoiles emportent les plus désespérés. En France, les mois passent et le Rassemblement national se rapproche de l'Élysée. Non qu'il ait plus de solutions à proposer mais il n'hésite pas à proposer de réaliser les rêves les plus fous sans craindre le grand écart entre les besoins des plus pauvres et ceux d'une moyenne bourgeoisie en voie de déclassement.
L'enjeu planétaire
Les contradictions entre les besoins des plus pauvres et les attaques menées par les dirigeants les plus lucides au nom de la lutte contre le réchauffement produisent une montée inexorable des nationalismes et de la xénophobie. Au bout de cette impasse, il y a la guerre ou plutôt les guerres. Il est difficile dans de telles conditions d'être optimiste. Quand le désir de justice sociale se heurte aux impératifs de survie planétaire, il est difficile de prévoir l'avenir. Parviendra-t-on à des solutions de sagesse ? L'histoire est toujours surprenante. Il faut au moins l'espérer.
GXC