<< A Mafia Nô >> : dix pages de trop !
Le dernier livre de Léo battesti
« A Mafia Nò » : dix pages de trop
Au fait, le livre dont il est question ici, a pour titre « A Mafia Nò ».
Dommage que dix pages cash, voire trash, captent un peu trop la lumière.
Beaucoup a déjà été dit, écrit et montré concernant ce livre. Les révélations sur quinze années d’action militante de l’auteur, Léo Battesti qui assume avoir été un dirigeant du FLNC, et l’appel à la mobilisation contre les dérives mafieuses que l’intéressé délivre dans son ouvrage, ont en effet déjà fait couler beaucoup d’encre, user beaucoup de salive et produire beaucoup d’images. Alors pourquoi avoir décidé d’écrire ces ligne et celles qui suivent ? La réponse est la suivante. Ce qui est écrit dans ce livre suscite une envie de réagir, de louer, de critiquer et aussi, quand on parcourt certaines pages, de crier « Vous dépassez les limites ! », « Vous confondez la sincérité et la confession », « Vous avez écrit dix pages de trop ». L’auteur est cash et même trash. Il en arrive à dévoiler des événements, des comportements et des actes d’un parcours militant qui ne reflètent pas une image glorieuse ou même positive de sa personne. L’auteur en arrive à trop révéler aussi. Il relate, endosse et assume, sans cacher les conséquences terribles que cela a pu entraîner, qu’il n’a pas toujours osé, qu’il est arrivé qu’il ne sache dire ni oui ni non, qu’il a cautionné par la parole ou le silence, qu’il a incité.
Ce qui, encore à ce jour, reste inopportun
Tout cela est estimable et même courageux. Mais aussi, tout cela rouvre des cicatrices, réveille des traumatismes, ravive des douleurs de l’âme. Ce qui, à mon sens, encore à ce jour, reste inopportun. Il est des souvenirs et des vérités qu’il vaut sans doute mieux confier à son journal intime, et laisser aux historiens le soin de les exploiter après que les protagonistes (dont soi-même) et leurs proches aient quitté ce bas monde. Certes l’auteur explique qu’il a choisi de se mettre en avant pour préserver d’autres personnes : « Pour décrire l’affaissement éthique que je dénonce, nul besoin d’aller fouiner ailleurs. Mieux vaut m’exposer que livrer en pâture d’anciens frères d’armes ». Mais les informations et les précisions qu’il apporte, du fait que certains savent des choses pour les avoir vécues ou en avoir eu connaissance, permettent des identifications ou pire des suppositions.
Au fait…
Au fait, le livre dont il est question ici, a pour titre « A Mafia Nò ». A priori, il a été écrit pour donner à voir et dénoncer la dérive mafieuse qui ronge la société corse. Au fait aussi, l’auteur est un des fondateurs et des animateurs du collectif A Mafia Nò, A Vita Iè. Ce qui suggère que sa motivation première est de sensibiliser le lecteur au danger que représente, aujourd’hui chez nous, l’influence pernicieuse et la pression destructrice d’un système mafieux sur l‘activité économique, les relations sociales, les valeurs morales, la vie démocratique. Ce qui incite à penser que l’auteur propose des pistes pour agir et réagir. En fait, tout cela est écrit. Dommage que dix pages cash, voire trash, captent un peu trop la lumière.
JPB
Cash et trash
« Mon silence équivaut à une sentence de mort. Nous sommes une dizaine de délégués du Cunsigliu, la direction du FLNC » / « De nombreux assassinats colle celui-ci ne seront jamais revendiqué » / « A nouveau, je me suis tu. A nouveau le vote fut unanime. A nouveau, le verdict fut implacable. A nouveau, la sentence fut exécutée » / « Se sachant poursuivi par le Front, le voyou a pris la poudre d’escampette. Je n’ai donc pas ce meurtre sur la conscience mais j’ai pu mesurer jusqu’où nous étions et jusqu’où j’’tais capable d’aller » / « Mon hostilité à la peine de mort aurait dû m’amener à rompre avec une organisation usant de l’assassinat comme méthode » / Le seul fait de siéger au Cunsigliu signait mon adhésion. En bon soldat, j’avais étouffé toutes autres considérations » / « L’argent sale de la mafia italienne servira donc, en partie, à investir dans du matériel de propagande ».