La Nouvelle Calédonie avant-goût de la Corse ?
C'est le même processus qui sera adopté pour la Corse.
La Nouvelle Calédonie avant-goût de la Corse ?
La majorité des sénateurs a voté en faveur du projet de loi constitutionnelle visant à dégeler le corps électoral calédonien, mardi 2 avril. Le texte doit désormais cheminer vers l'Assemblée nationale. Il faudra qu'il soit adopté dans les mêmes termes avant que les parlementaires se réunissent en Congrès à Versailles pour définitivement l'adopter. Avec la réforme du gouvernement, ce sont 25 000 personnes supplémentaires qui auraient le droit de voter dès les prochaines élections locales convoquées avant le 15 décembre. C'est le même processus qui sera adopté pour la Corse. Mais la décision des sénateurs laisse augurer des résultats contraires à l'espérance de la majorité nationaliste.
Une gauche en opposition et une droite qui fulmine
Le changement de corps électoral est une obligation constitutionnelle qui était parfaitement prévisible après l'échec du non à l'indépendance. Rappelons qu'il s'était imposé à la suite du refus des indépendantistes d'y participer. La gauche s'est montrée violemment hostile au texte de loi, qu'elle a tenté sans résultat de vider de sa substance par le biais d'amendements. L'argument était que l'élargissement du corps électoral mettrait en péril la paix. Mais le non-élargissement serait aussitôt condamné par le Conseil constitutionnel. Or indépendantistes et loyalistes ne parviennent pas à s'entendre. Sonia Backès, présidente de la Province Sud et cheffe de file des Loyalistes, parti politique affilié à la majorité présidentielle, a même été jusqu'à tenir des propos particulièrement provocateurs devant ses sympathisants. « Je vais leur dire à eux [les indépendantistes] : on a été gentils, trop gentils. Mais c'est terminé. (...) On va plus se laisser faire ! On ne partira pas, on va se battre. Je le dis à Paris aujourd'hui, aux parlementaires qui tremblent. Le bordel, c'est nous qui le mettrons si on essaie de nous marcher dessus ! » Voilà qui rappelle l'Algérie des années 1960-1961.
Le miroir de la Corse
La majorité nationaliste n'a cessé de prendre le statut de la Nouvelle Calédonie en exemple. Le paradoxe veut que même la situation causée par la réforme constitutionnelle serait un rêve pour les partisans corses de l'autonomie. Statut de résidence à dix ans, apprentissage des langues mélanésiennes, statut tribal etc.… Mais une santé en ruines, des pensions et des retraites en grand danger, une crise du nickel sans précédent et surtout une situation extérieure à la Communauté européenne. D'où un manque criant de subventions que la France ne cesse de pallier. Néanmoins le vote du Sénat pose une question criante pour la Corse ? Ne serait-ce pas là un geste qui risque d'être similaire pour la Corse ? Certes le rapport de force sera différent puisqu'une partie de la Macronie votera pour ? Mais cela suffira-t-il vraiment à permettre un vote positif au Sénat ? On peut en douter.
Un budget castrophique et un paysage économique en mauvais état
Le budget de la Collectivité de Corse a été adopté sous un feu roulant de critiques. Le PNC l'a même qualifié de « pire budget » de tous les budgets. Il est vrai que les investissements indispensables à notre économie ont été sacrifiés au profit du fonctionnement. Or celui-ci a considérablement augmenté à cause du recrutement pléthorique clientélaire. Désormais le déséquilibre est comblé par l'emprunt et, si toutes les règles étaient adoptées, la Corse devrait être placée sous tutelle. Ce qu'elle ne sera pas mais une telle situation financière risque d'inciter les parlementaires hésitants à ne pas faire confiance à une direction insulaire dépensière et incapable de gérer les affaires courantes. Qu'en serait-il si l'autonomie était déclarée ? Car la situation de la France est également catastrophique et elle va avoir du mal à sans cesse remettre de l'argent pour les régions déficitaires. Elle envisage même de ponctionner les régions riches. C'est dire.
Les élections européennes dans la ligne de mire
Si on en croit les sondages, le RN deviendra le premier parti de France après les élections européennes. La situation est donc grave pour Emmanuel Macron qui n'a eu de cesse de pencher vers la droite pour tenter d'endiguer cette crue mémorable. La France se porte très mal économiquement parlant. Mais en plus elle doute d'elle-même. Elle va donc se rabattre vers les candidats qui vont leur chanter à nouveau le Chant du départ et les gloires passées du centralisme. Il est alors difficile d'imaginer un Sénat soudain pénétré par les promesses du giriondisme. La droite va de surcroît vouloir régler son compte à la majorité pour tenter d'aborder les présidentielles de 2027 dans la situation la moins mauvaise possible. Le vote des sénateurs en faveur de l'élargissement de l'électorat calédonien pourrait dans de telles conditions avoir un avant-goût ce qui va advenir du vote corse.
GXC