Déambulation Salvatore Viale, en musique et en chansons
La manifestation littéraire, « Histoire (s) en mai », affiche à chaque édition une promenade en l’honneur de Salvatore Viale,
Déambulation Salvatore Viale
En musique et en chansons
La manifestation littéraire, « Histoire (s) en mai », affiche à chaque édition une promenade en l’honneur de Salvatore Viale, poète et premier écrivain au XIX è siècle à faire œuvre en langue corse avec la Dionomachia. Organisée par Linda Piazza, responsable de la bibliothèque patrimoniale de Bastia, la balade s’est lovée dans ce beau cœur de ville qu’est la citadelle.
Cadre magnifique… Mais voilà que notre mai printanier se met de plus en plus à ressembler au mars des foucades météorologiques. Pluie très froide. Rafales de vent furieuses par à-coups. Les touristes trop optimistes et méconnaissant les caprices du temps local qui ont imprudemment opté pour shorts et marcels échancrés sont bien penauds et surtout frigorifiés. Les Bastiais plus au courant ont, eux, revêtus doudounes ou Kway, s’ils ne brandissent pas des parapluies. Dans la ville génoise les organisateurs vont alors privilégier les endroits abrités et délaisser ruelles et places… Les instruments de musique ne font pas bon ménage avec les intempéries ! Planning initial modifié avec bonheur puisque public de plus en plus nombreux et musiciens vont être au sec.
A l’abri au rez-de-chaussée du Pavillon des Nobles Douze, monument emblématique de la Corse, récemment restauré : l’orchestre à plectre, « Mandulina estudiantina bastiaise ». L’ensemble valorise la mandoline au sein de la culture corse avec un répertoire traditionnel et des morceaux originaux de compositeurs insulaires. Au groupe de mandolinistes s’ajoute un clavier et un mandoloncelle, qui est à la mandoline ce que le violoncelle est au violon. Créé par René Vallecalle l’ensemble compte dans ses rangs José, Pierre, Marilyne, les enfants du fondateur et des amoureux de la pratique d’un instrument qui a beaucoup rayonné en Corse dans les deux premiers tiers du XX è siècle et qui reprend actuellement beaucoup de couleurs. Des airs de tendre douceur. Des airs vivifiants. Des airs joyeux reflet d’un passé peut-être heureux et sans soucis !? Gageons que les Nobles Douze, qui représentaient les Corses auprès du gouverneur de Gênes, ont sans doute été ravis d’entendre ces sons qui avaient pu charmer leurs oreilles à leur époque. Qui sait ?
Entre deux bourrasques venteuses, « La Lyre bastiaise » se réfugie sous le porche qui mène à la citadelle. Vêture noire. Cuivres brillants. Cette fanfare, institution centenaire qui faillit sombrer, est ressuscitée depuis quelques années. « La Lyre » est plutôt masculine. Une seule femme. Un répertoire plein d’entrain qui ne suscite pas la mélancolie, qui ventile du punch dont une dynamique tarentelle. Des morceaux à vous requinquer… On en a besoin vu les désagréments d’un climat déjanté et en perte de repères.
Cortège de parapluies cheminant à petite marche en direction de la cathédrale. Il y a de plus en plus de monde attiré par la déambulation… de quoi émouvoir Salvatore Viale ? A moins qu’il ne lui vienne à l’esprit quelques réflexions satiriques ?
Pas obligé d’être mordu de piété pour entrer dans la cathédrale, les bancs de beau bois déclenchent des soupirs de satisfaction tant ils sont réconfortants après les maigrichonnes marches d’escalier inconfortables aux fondements les plus rembourrés du Pavillon des Nobles Douze et après les bas murets plâtreux du porche communicant avec le cours Favale.
Pas le temps de contempler l’harmonieuse façade de Sante Marie restaurée en un blanc pur souligné par un discret trait noir faisant ressortir l’élégance de l’édifice. L’intérieur est un havre. On y respire la paix liée à un bien-être de l’âme. Au pied du chœur le clavier de Manu Marrini et le pupitre de Sandrine Luigi, pilotes de l’association, « Arte Musica », qui propose des cours de musique, de danse, de théâtre, de chant. Des enseignants de qualité accompagnent les projets créatifs des élèves. Programmés aussi des événements culturels. La guitariste et la pianiste offrent au public un panel, plein de sensibilité de musique de films. Prestation touchante. Emouvante d’Ennio Morricone à Ludovico Einaudi.
Ceux qui affirment que l’orgue de Sainte Marie n’est qu’un leurre juste bon à faire de la figuration sont de fieffés menteurs, la preuve par Pierre Vallecalle. Et l’organiste d’interpréter avec un remarquable brio des pièces du répertoire baroque et renaissance. En majesté et en puissance l’instrument. En souplesse encore. Des musiques célestes. Des musiques bienfaisantes.
A deux pas dans une ruelle pentue l’Oratoire Sainte Croix. L’église du XVI è siècle est d’une originalité époustouflante. Elle est de style rococo. Dans l’espace français on n’en dénombre que deux : l’autre est à Nice. C’est donc une rareté. A l’intérieur les stucs redorés depuis peu proposent un ballet ondoyant de grâce à l’œil du spectateur. Charpente, toiture, réhabilitées. L’oratoire a une acoustique magique qui va parfaitement bien servir les violonistes du Conservatorio Niccolò Paganini de Gênes.
Ils ont noms Teresa Valenza, Elena Martini, Vittorio Marchese. Ce dernier mène une carrière internationale qui le conduit dans les plus célèbres orchestres. En solo Teresa Valenza joue un Bach extraordinaire. Elena Martini se distingue dans une pièce d’Ysaye. Puis en duo Marchese et Valenza produisent un Haendel tout de finesse. Réunis en trio les violonistes génois exécutent une page magistrale de Dvorak. Applaudissements enthousiastes à la fin de cette performance musicale.
Sous les dorures de Sainte Croix vient le tour de Patrizia Poli et de Pascal Arroyo. On connait la subtilité puissante de la chanteuse. On sait sa fibre poétique étincelante. On n’ignore rien de son art à sculpter les mots en corse. Il y a chez elle beaucoup de délicatesse et d’affirmation dans ses convictions. Patrizia Poli est une chanteuse rare qui refuse l’esbrouffe, qui marie la percutance et la tendresse. Elle croit en ce qu’elle chante. Elle chante ce en quoi elle croit. Pas de compromission chez elle, même si elle peut reconnaitre la vertu du compromis s’il est la clé de l’apaisement.
Pascal Arroyo bassiste, arrangeur est un accompagnateur fervent au piano pour les sublimes chansons corses de Patrizia Poli. Il exprime en ces moments sa personnalité qui donne une touche particulière au récital.
Le mérite de la Déambulation Salvatore Viale est d’associer des musiques plurielles. C’est là la raison de sa réussite.
Michèle Acquaviva-Pache
Au programme de la balade musicale il faut citer la participation de l’ensemble vocal, « E Cantid’elle Citadell’Anima », composé de douze chanteuses qui font leur miel de la polyphonie et chantent en roumain, italien, grec, togolais…
Sans omettre « L’Archetti Bastiacci » groupe de jeunes violonistes du conservatoire de Corse qui ont de 10 0 16 ans. Le groupe a à son répertoire des musiques traditionnelle corses, irlandaises, basques.
Nous parlerons plus longuement d’eux prochainement.
Contacts
Arte Musica : [email protected]
Mandulina estudiantina bastiaise : joseph.vallecalle72@la poste.net
Vittorio Marchese : [email protected]
Patrizia Poli : [email protected]
E Cantid’Elle : [email protected]
La Lyre bastiaise : [email protected]