• Le doyen de la presse Européenne

Un pays au bord de la crise de nerfs

Le peuple a horreur des faibles
Un pays au bord de la crise de nerfs

S'il est bien une constante dans l'histoire de France, c'est que le peuple a horreur des faibles. Chaque république s'est achevée dans les bras d'"un homme providentiel" et aujourd'hui la Ve République à bout de souffle se cherche son Bonaparte, son sauveur suprême. Mais contrairement à ce qu'affirme le proverbe la gangrène ne commence pas par la tête mais bien par la périphérie : les îles, les marges sociales du pays… En règle générale, cela commence par un début de guerre civile avant que ne surgisse le démiurge d'un monde d'apparence nouvelle et pourtant vieux et conservateur.



L'État fort contre la guerre civile


L'État moderne s'est structuré pour sortir des guerres civiles : Louis XI contre la puissante Bourgogne, l'absolutisme monarchique pour s'extraire des guerres de Religion, vaincre la Fronde, I'Empire napoléonien pour mettre un terme à la guerre civile générée par la Révolution, la IIIe République pour enterrer la Commune, la Ve République pour mettre fin à la tragédie algérienne qui d'une certaine manière prolongeait la France de Pétain. Aujourd'hui, la France est un pays infiniment malade qui a à sa tête un président ondoyant, virevoltant mais certainement pas rassurant. Il y avait eu la révolte des Gilets Jaunes, en fait celle d'une France qui se sent abandonnée, la France des marges, celle qui vraisemblablement va offrir au RN sa victoire. Il y a eu la bataille des retraites combattue et battue grâce au 49-3, une défaite qui a vraisemblablement en grande partie décrédibilisé la gauche.
Aujourd'hui, la violence a éclaté à Mayotte où les désespérés instrumentalisés par les gangs ont semé la désolation, rappelant le chaos haïtien. Puis voilà que la Nouvelle Calédonie explose en un conflit au sein duquel se mélange le problème colonial, racial et socio-économique. Car, contrairement à l'idée généralement admise, la question du grand remplacement pourrait bien n'être qu'une vue de l'esprit. À bien étudier les statistiques, on réalise que les Kanaks sont et restent l'ethnie la plus nombreuse sur l'archipel. Les Blancs sont largement minoritaires d'autant que les métropolitains, ces oiseaux migrateurs, quittent les lieux par milliers. En Nouvelle Calédonie le mal est situé au nord de Nouméa dans les quartiers où s'entassent des Kanaks qui ont quitté les terres coutumières pour venir remplir des lieux misérables. À Nouméa, cette partie de la population coexiste avec les quartiers sud peuplés dans leur immense majorité de Blancs fortunés. Le mélange est explosif. Le problème est qu'on le retrouve à Tahiti et d'une certaine manière aux Antilles et de plus en plus en Corse.

Un problème social qui vient se juxtaposer à une question identitaire


On a tellement glosé sur la question coloniale qu'on en a presque oublié l'universalité de la pauvreté. À Nouméa, avec bien entendu des conditions particulières, il s'est passé le même phénomène que dans les banlieues : des identités vacillantes ou floues confrontées à des pouvoirs qui réagissent à la petite semaine sans jamais s'attaquer aux disparités sociales mais aussi à la question de l'intégration. Le modèle dominant dans le monde est celui du communautarisme. Or, à cause d'une dérive droitière de l'humanité confrontée à une crise majeure, la question de l'identité a occulté en partie les préoccupations quotidiennes : vie chère, écarts de fortune, logement…

Une France au bord de l'explosion


C'est en affectant aux maux les mauvais mots qu'on s'interdit de les dominer. La vérité est que la France va très mal. Elle additionne les conflits sans jamais parvenir à toucher du doigt leurs réelles origines. Or le temps joue contre la paix civile. Le président Macron avec une morgue inédite a multiplié les faux pas "de classe" donnant un sentiment de mépris social insupportable. Pourtant, pour n'avoir pas su anticiper les drames, il a dû à chaque reprise reculer devant l'ampleur de la violence causée par ses impairs. La crise de Gilets Jaunes a coûté 274 milliards au contribuable. Il a reculé devant les paysans sacrifiant au passage les maigres avancées en matière d'écologie. En Corse, le ministre Darmanin a prononcé le mot magique d'autonomie après deux nuits d'émeute consécutives au décès d'Yvan Colonna. On peut s'attendre à une succession de nouvelles crises toujours en périphérie jusqu'à ce que la contamination touche le cœur du pays vraisemblablement au cours d'une crise politique sans précédent depuis la guerre d'Algérie. C'est le contrat social global qui est à revoir : trop d'injustices sociales finissent par mettre le feu aux poudres. Les citoyens descendent dans la rue non par un effet mafieux ou un caprice d'enfants. Ils le font quand ils estiment qu'ils n'ont pas été entendus et qu'ils n'existent plus d'autre moyen pour faire entendre leurs voix. Quand le seigneur du château est sourd comme un pot, les cris du peuple, fussent-ils accompagnés de désordres, deviennent le seul langage possible.

GXC
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