• Le doyen de la presse Européenne

Le paradoxe identitaire de la gauche décoloniale

La question identitaire au coeur de la crise mondiale

Le paradoxe identitaire de la gauche décoloniale



La gauche décoloniale n’a de cesse de stigmatiser les identitaristes occidentaux les taxant parfois à juste titre de fascistes. Le thème du grand remplacement, créé par Renaud Camus et repris par les suprémacistes blancs est dénoncé à longueur de colonnes. Et pourtant voilà qu’au détour de l’affaire calédonienne, il est brandi par ceux qui le pourfendent quand il est agité par des blancs. Parce qu’une fois encore, c’est bien de cela qu’il s’agit dans un sens ou un autre : la couleur de la peau. Pour les décolonialistes de tous poils, tout ce qui est blanc est détestable depuis le red neck américain jusqu’au juif accusé de perpétrer un « génocide à Gaza ». Mais dès la victime revendique ses droits sur la terre de ces ancêtres, la question identitaire devient une variable majeure du discours.


« Un peuple en ces lieux refuse de périr »


On croirait lire du Battini dans le texte : « Un peuple en ces lieux refuse de décliner, de dépérir, de s’éteindre. Ils sont ainsi les peuples : attachés à leurs racines, leurs cultures, leurs mythes ». Eh bien non il s’agit d’une déclaration de Christiane Taubira, l’ancienne ministre garde des Sceaux, à la parole bien trempée dans le discours décolonialiste notamment pour ce qui concerne son « département » de naissance, la Guyane. Dans un article, Eugénie Bastié faisait remarquer que déjà en 2006, celle-ci évoquait sans craindre le paradoxe idéologique « « Guyanais de souche en train de devenir minoritaires sur leurs sol » afin de mieux lutter contre l’immigration illégale en Guyane. On croit rêver, mais tout cela est vrai. La même personne défendait le droit de vote des immigrés aux élections municipales en France — ce que je trouve être une bonne idée —, mais s’opposait dans un même temps au vote d’un certain électorat en Nouvelle-Calédonie.

Le sang et la terre


Dans le même ordre d’idée, Edwy Plenel, fondateur de Mediapart, que j’ai connu autrefois dans les rangs de la Ligue communiste, a témoigné de façon extrêmement émouvante sur le drame des Kanaks et l’infamie du massacre de la grotte d’Ouvea. Il se bat pour que les Kanaks retrouvent leur droit sur la terre qu’ils habitent depuis 3 000 ans. Dans Mediapart, il poste sur son blog le 18 mai 2024, un article intitulé « En Kanaky, la terre est le sang des morts ». Plenel qui est un homme extraordinairement cultive ne saurait ignorer que le rapprochement des thèmes mort et terre est un étendard de la droite maurrassienne et a été mis en exergue par Maurice Barrès dans son célèbre ouvrage La terre et les morts. Que nous dit cet écrivain ? Que nous devons aimer nos morts, glorieux ou anonymes. Non point les honorer par quelque obsession mortifère, mais à travers eux célébrer la communauté vivante qui plonge dans le passé national. Auguste Comte n’est pas loin. La Terre nous parle. C’est en elle que s’enracine la conscience collective : « Les ancêtres ne nous transmettent intégralement l’héritage accumulé de leurs âmes que par la permanence de l’action terrienne. » Mais revenons à Plenel qui tire son titre d’un article de Jean Guiart. Ce dernier ouvre celui-ci ainsi : « La terre est faite du sang des morts, et nous voulons cette terre parce que nous devons pouvoir nous retrouver face à face avec nos morts, qui constituent, avec le lien qui nous lie à la terre qu’ils composent, le soubassement de notre société et notre tradition essentielle. » On ne peut qu’être d’accord avec cet anthropologue et approuver son combat en faveur du peuple kanak. Mais pourquoi diable les peuples à peau blanche seraient exclus d’un tel raisonnement. D’autant que l’extrême gauche a soutenu la lutte du peuple basque ou celle du peuple irlandais, mais en pataugeant dans une rhétorique là encore louvoyant entre la lutte des classes et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, logomachie qui en définitive ne veut pas dire grand-chose.

La question identitaire au cœur de la crise mondiale

La lecture de l’extrême gauche dépend d’une grille victimaire qui l’amène à soutenir le Hamas tout en s’en défendant comme hier elle avait soutenu la révolution islamiste de Khomeny contre le chah d’Iran au nom de la juste lutte des opprimés contre les oppresseurs. D’une part c’est nier les oppressions intrinsèques aux peuples dits premiers. Le droit coutumier kanak est extrêmement tyrannique pour les femmes. On ne peut défendre toutes les valeurs anciennes au nom de l’anticolonialisme ou alors il faut accepter la pratique des mutilations sexuelles, le voile intégral, le viol collectif en Inde, etc. La mauvaise conscience d’une partie de la gauche amène à une attitude mortifère et masochiste. Car il ne fait aucun doute que les lesbiennes, les homosexuels, les transgenres ne feraient pas de vieux os dans les pays dominés par des cultures rétrogrades. Car on ne peut se battre pour les droits de l’homme et ignorer quand ceux-ci sont bafoués par des « victimes de l’histoire ».


GXC
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