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Paradoxale Corse !

Une campagne rapide et atome

Paradoxale Corse !



La Corse vote donc très largement pour le mouvement nationaliste corse qui n’est jamais en reste quand il s’agit de stigmatiser les manquements de l’État. Mais cette même Corse en demande d’autonomie ne cesse de tendre la main en direction de ce même état afin d’obtenir des rallonges budgétaires souvent provoquées par son incurie gestionnaire. Et, cerise sur le gâteau, cette même Corse accorde une large majorité au Rassemblement national et ses épigones d’extrême droite pour les élections présidentielles et européennes, cette extrême droite qui se refuse même à envisager une légère autonomie. La Corse réussit donc, comme en physique quantique, à être à la fois dans un état donné et dans son exact contraire. D’où ce lancinant sentiment de ne jamais aboutir qui épuise les plus résistants.

Une campagne rapide et atone


Lorsque cet article paraîtra, nous nous trouverons à la veille du scrutin des législatives. La dissolution du Parlement décidé par surprise aura pris de court toutes les tendances politiques. Il faut dire que le président Macron a fait fort : dimanche à 18 heures la tête de liste du RN demande la dissolution. Trois heures après que Bardella a exprimé son rêve, Macron l’a exaucé. En Corse, chacun a conscience que c’en est bel et bien fini du processus d’autonomie voir de l’autonomie tout court. Pourtant aucun des trois candidats nationalistes n’en parle. On discute, on pratique la pulitichedda mais on ne tire aucun bilan de la période passée pas plus dans le Sud que dans le Nord. Et cela vaut également pour l’aréopage de droite converti à l’autonomisme. Laurent Marcangeli se représente comme s’il écrivait une page blanche et Valérie Bozzi choisit de ne porter aucune étiquette. À Bastia, le député Castellani vante son bilan local sans jamais aborder la question de l’autonomie. Quant à Jean Félix Acquaviva en pleine perdition, il n’en est plus là. Ça aura donc été une étrange campagne qui clôt des années d’illusions sur laquelle personne ne s’exprime.

Une société conservatrice et en définitive bel et bien clanique


La société corse porte depuis toujours à droite même lorsqu’elle se parait des couleurs du radicalisme de gauche. Car elle est, elle-même, profondément paradoxale. Alors qu’elle donne le sentiment de sans cesse transhumer en troupeaux claniques, elle abrite autant d’individualités que d’individus qui ne rêvent que de leurs intérêts personnels. Il faut le dire et le répéter : ici le bien commun peut se résumer à la somme des biens privés. Il existe évidemment des personnes vertueuses. Mais au bout du compte, on hésite, on louvoie et on revient à l’écurie première. Même les résiduels collectifs antimafia sont victimes d’une proximité qui interdit de véritables conflits. Incapables de dénoncer des situations précises, ils s’en tiennent à de grandes généralités. Mais quand on se rapproche de leur entourage même on comprend mieux leur incapacité à dévoiler ce qu’il dénonce. Par parenté ou amitiés directes ou indirectes, ils sont tenus à une forme de silence. Tout cela contribue à un immobilisme dont on ne parvient à sortir que de l’extérieur. Soyons un peu marxistes : le changement ne peut réellement opérer que s’il génère des changements économiques majeurs et ouvre la société insulaire sur l’extérieur sans craindre la concurrence au nom des intérêts dits nationaux. Qu’a-t-on pu noter depuis 2015 : un partage des pouvoirs et des territoires géographiques et économiques par un mouvement nationaliste agissant à visage découvert ou de façon plus cachée. Et ceux qui n’étaient pas de ce camp, ont compris que mieux valait faire patte de velours pour acquérir des marchés et survivre. En un mot comme en mille, la Corse n’a guère changé. Elle s’est adaptée. Elle a fait sa mue. Elle a quitté sa vieille peau clanique pour laisser la place à une nouvelle tout aussi clanique. L’être central est toujours le même qui cherche à tirer le maximum de profits de la puissance tutélaire évitant ainsi de développer de véritables forces productives sur place.

La gauche en sommeil


La gauche en Corse n’a rien su proposer d’autre que le programme nationaliste c’est-à-dire l’autonomie. Le Parti communiste est désormais ici comme au plan national réduit à la taille d’un groupuscule gauchiste. LFI n’existe pas puis que Femu a Corsica a passé avec elle un pacte de non-présentation de candidats. Passons sur les microglobules qui à la façon des gauchistes d’autrefois se croient les maîtres de la planète et administrent des leçons aux grandes puissances sans craindre le ridicule. Pourquoi la gauche a-t-elle quasiment disparu en Corse ? Mais parce qu’elle se heurte à une mentalité individualiste qui ne sied aucunement à des théories universalistes. C’est ainsi. Toutes les options sont donc ouvertes en Corse sans qu’on perçoive réellement le bout du tunnel tant qu’on s’en tiendra à des mantras idéologiques.

GXC
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