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Comment meurent les Républiques françaises ?

La crise actuelle...........

Comment meurent les Républiques françaises…


La crise actuelle est aussi celle du système républicain français dont le cycle est celui des saisons depuis le printemps de la naissance jusqu’à l’hiver de la disparition. Il est particulièrement remarquable qu’on note dans les vies et les morts des cinq républiques un processus vital relativement identique de l’une à l’autre.


La Première République française


Toutes les Républiques françaises ont été baptisées dans le sang et ont été enterrées par des coups d’État. Amenée par la Révolution française, la Première République succède à la monarchie constitutionnelle qui disparaît le 10 août 1792 avec la prise du palais des Tuileries par les sans-culottes après le massacre des gardes suisses. Un mois plus tard se produisent les massacres de septembre à Paris après la proclamation officielle de la Première République française qui dure du 22 septembre 1792 au 18 mai 1804. La Terreur commence en 1793 avec l’exécution du roi Louis XVI puis de la reine Marie-Antoinette, et prend fin en 1794 avec l’exécution de Robespierre. Entre-temps, l’armée républicaine s’est lancée en Vendée et en Charente Poitou à de terribles exactions qui peuvent s’apparenter à un début de génocide. Le Consulat, qui se situe entre le 10 novembre 1799 et le 18 mai 1804, est issu du coup d’État du 18 brumaire et défini par la Constitution de l’an VIII. Le Consulat prend fin avec l’instauration du Premier Empire.

La Deuxième République française


La Deuxième République couvre la période du 24 février 1848, date de la proclamation provisoire de la République à Paris, jusqu’à la proclamation de Napoléon III comme empereur le 2 décembre 1852. C’est le dernier régime à avoir été mis en place par une révolution. Des ouvriers sont fusillés à Paris mais les républicains imposent le nouveau régime. Le suffrage universel masculin est instauré en France et l’esclavage dans les colonies françaises est définitivement aboli. En juin 1848, face à la montée de la contestation populaire, la République envoie son armée dirigée par le général Cavaignac contre les émeutiers qui réclament le maintien des Ateliers nationaux. 400 barricades sont érigées dans Paris. L’armée tire tuant 4000 insurgés. La bourgeoisie est rassurée sur la capacité de la République à maintenir l’ordre. Louis Napoléon est élu président de la République en décembre 1848 comme champion du parti de l’ordre. Parce que la Constitution lui interdit de se représenter, il fomente le coup d’État du 2 décembre 1851. Puis grâce à un plébiscite, il reçoit la dignité impériale un an après. La seconde république laisse la place au Second Empire.

La Troisième République française


Elle couvre la période du 4 septembre 1870, la chute de l’Empire après le désastre de Sedan face aux Prussiens et va jusqu’au 10 juillet 1940 quand le Parlement vote les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain. Le 4 septembre, alors que le Corps législatif se réunit, le palais Bourbon est envahi par une foule d’émeutiers. Les députés républicains prononcent la déchéance de l’empereur et, conduits par Léon Gambetta et Jules Favre, se rendent à l’hôtel de ville de Paris pour y proclamer la République. Le 18 janvier 1871, Bismarck réalise l’unité allemande. Des élections ont lieu qui paradoxe troublant donne une assemblée très largement majoritairement monarchiste. Le nouveau chef du pouvoir exécutif républicain, Adolphe Thiers est un monarchiste négocie les clauses de la défaite avec Bismarck qui impose des clauses très lourdes parmi lesquelles. la cession de l’Alsace à l’exception de Belfort, de l’essentiel de la Moselle, d’une partie de la Meurthe et des Vosges. Une émeute éclate à Paris quand Thiers tente de faire saisir les 227 canons de la Garde nationale le 18 mars 1871. Thiers donne alors un gage d’ordre à la France profondément monarchiste en exerçant une répression d’une sauvagerie inouïe contre les Communards en faisant exécuter 30 000 au cours de la semaine sanglante. C’est là encore un terrible paradoxe que de constater que c’est cette répression qui a consolidé le régime républicain. La troisième république est née de la confrontation avec l’Allemagne et s’achève dans une nouvelle confrontation avec l’Allemagne puisqu’après la défaite de juin 1940, la chambre de Front populaire élue en juin 1936, vote très majoritairement les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain qui juste après supprime la république le 10 juillet 1940 exécutant un coup d’État sans effusion de sang, car la guerre a déjà tué 400 000 Français.

La Quatrième République française


Elle est proclamée le 13 octobre 1946 et dure jusqu’au 28 septembre 1958. Elle naît un an après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le conflit qui a causé les plus grandes pertes de toute l’histoire de l’humanité. Lors de ses premières élections législatives, le parti communiste possède une majorité relative avec 27 % des voix. Les femmes votent alors pour la première fois. Elle met en place d’importantes avancées sociales comme la sécurité sociale ou encore la mise en place du Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG). Mais la république est minée par les conséquences de la guerre froide et de la crise coloniale. De plus le régime favorise les combinaisons politiques et donc fragilise les gouvernements successifs. La quatrième république ne survit pas au conflit algérien qui a début en novembre 1954. Une crise gouvernementale particulièrement grave a lieu le 15 avril 1958 avec la chute du gouvernement dirigé par Félix Gaillard. La dérive des finances publiques avait fait perdre à Guy Mollet le soutien des modérés. À partir du 15 mai, le Comité de salut public d’inspiration gaulliste réclame le retour de De Gaulle, en qui ils voient probablement l’homme providentiel du 18 juin capable de sauver la situation notamment en Algérie où la population européenne craint l’indépendance. L’armée va jusqu’à menacer le gouvernement d’une attaque aéroportée en métropole. Le général de Gaulle se déclare « prêt à assurer les pouvoirs de la République ». Deux semaines plus tard, le président de la République, René Coty, contraint par le coup d’État algérien, appelle le général à la présidence du Conseil. Un projet de constitution à l’exacte mesure de de Gaulle est rédigé par Michel Debré. Le 28 septembre 1958, la nouvelle constitution est adoptée par voie référendaire donnant naissance à la Cinquième république.

Une constitution taillée sur mesure pour le général


La Constitution de la Cinquième république avait été faite pour la stature du général de Gaulle, un monarchiste persuadé que la France éternelle devait être gouvernée par un homme possédant une vision historique. Jugeant qu’il avait désavoué par le peuple en 1969, il démissionne avec panache et laisse la place à Georges Pompidou qui était un grand homme d’État. Le président Giscard d’Estaing à l’instar de Napoléon III était un réformiste persuadé que la société française devait quitter ses habits désuets et s’ouvrir sur l’extérieur. Vaincu en 1981 par une union de la gauche fortement secondée par le gaullisme bâtard de Chirac, il est remplacé par Mitterrand qui devient ainsi le dernier monarque républicain français avec cependant des allures de parvenu, plus Louis XV que Louis XIV. Or la Constitution exige cette osmose entre un personnage providentiel, le peuple français et des conditions historiques particulières. Depuis la Constitution, déjà rapiécée vingt-cinq fois, n’a de cesse de paraître de plus en plus endossable par la succession de présidents régents. Chirac, puis Sarkozy, Hollande et enfin Macron le Rastignac de la série… Les uns et les autres ont échoué à maintenir le niveau de la France à l’étage supérieur tout simplement parce qu’il a manqué la grandeur qui avait été offerte à de Gaulle en 1940.

Une monarchie républicaine face à la mondialisation


La force de la Cinquième république était son affirmation d’un pouvoir national face aux deux grandes puissances. La chute du mur de Berlin en 1989 puis la recomposition planétaire ont sapé la base de l’empire français en Afrique. Les Français ont, injustement mis sur le compte des présidents une faiblesse qui est en partie causée par le déclin de la vieille Europe en face des géants américains et chinois. Là où il faudrait non seulement cette fameuse vision du destin national, il faut composer avec l’Europe sans qu’il y ait de possibilités de faire autrement. On l’a constaté lors de la crise de la dette souveraine de 2012 conséquence de la crise financière de 2008. Le peuple français a besoin inconsciemment d’un monarque ou plutôt d’un Bonaparte quand la crise menace. C’est aujourd’hui ce qui se joue. La cinquième n’est pas faite pour un régime parlementaire et partidaire comme l’était la Quatrième. Désormais le conflit permanent entre le Premier ministre et le président réduit le rôle de ce dernier à celui des présidents de la Quatrième, un sage chargé de juger les affaires de haute volée tandis que le Premier ministre a réellement la main sur ce qui touche à la vie des Français. La France est un pays qui psychologiquement n’est pas adapté aux règles d’une mondialisation soumise aux émotions de la finance. Le président Macron est en sursis. Il ne va vraisemblablement pas supporter les contraintes de la cohabitation et tenter de s’opposer au Premier ministre. Puis la crise s’aggravant, il va devoir démissionner après quelques mois d’un chaos accentué par l’attitude des syndicats et de la gauche. L’aventure ouverte par la dissolution est loin d’être terminée d'autant que le programme du RN est aussi peu compatible avec l'économie libérale mondialisée que celui du Nouveau Front populaire. La cinquième république voit son déclin s'accélerer en attendant la femme ou l'homme providentiel. Nous vivons une sorte de parousie qui voit le Christ remplacé par l'éternelle figure du Commandeur.

GXC
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