Ponte Storicu : le vin de la passion
Domaine Ponte Storicu
Ponte Storicu : le vin de la passion
Durant les années 1970-1980, au nom de la restructuration du vignoble et de l’amélioration de la qualité rendues nécessaires par les évolutions de la consommation de vin, et primes compensatoires à la clé, des milliers d’hectares de vignes corses ont été arrachés. Autour de Ponte Novu, sauf sur quelques arpents, le vignoble a alors quasiment disparu. Avec le Domaine Ponte Storicu, le cep et le vin y sont de retour.
Antoine Orsini est aujourd’hui vigneron. Cette activité, il la partage avec ses fonctions de directeur du Grand Site de France Conca d'Oru. Plus précisément, il se fait vigneron après ses heures passées au bureau, ainsi que durant ses week-ends et ses vacances. Il ne s’agit cependant pour lui ni de compenser un retrait du monde politique (il a notamment passé un quart de siècle à la tête de la commune de Castellu di Rustinu et quelques années à l’Assemblée de Corse), ni d’exercer un second métier, ni de préparer sa retraite. Dans sa vigne, Antoine Orsini vit des souvenirs d’enfance et une fidélité à une histoire familiale. En effet, n’ayant jamais oublié que jusqu’aux années 1980, Ponte Novu comptait plusieurs vignes, et étant fils d’agriculteur et de vigneron, il n’a pu se résigner à l’arrachage de la petite vigne familiale quand son père a souhaité mettre un terme à une vie de travail bien remplie : « Mon frère ne pouvait ajouter le travail de vigneron aux activités déjà très prenantes d’élevage et de production de fourrage. Laisser arracher aurait été un crève-cœur. C’était en 2019. Je n’avais pas l’intention de solliciter un nouveau mandat de maire l’année suivante. J’allais donc avoir du temps de libre. J’ai décidé d’y aller à fond ». Vouloir éviter un crève-cœur est d’ailleurs rapidement devenu une passion : « Je suis à la vigne et à la cave ».
La volonté de faire les choses bien
S’étant dit : « Je veux faire mon vin et faire les choses bien », Antoine Orsini y consacre beaucoup d’énergie et s’en donne les moyens. En effet, il s’attache à assurer et maîtriser l’entretien du sol et des ceps, la vendange, la vinification, la mise en bouteille, la promotion et la commercialisation. Pour ce faire, il s’appuie sur sa formation d’ingénieur agronome et son doctorat d’économie, sur la transmission familiale, sur les précieux conseils d’un ami œnologue, Dominique Lelu, malheureusement aujourd'hui décédé, sur la collecte d'informations auprès d’organismes professionnels comme la Chambre d’agriculture et le Conseil Interprofessionnel des Vins de Corse ainsi que sur les enseignements tirés de la pratique. Faire les choses bien, c’est aussi beaucoup investir (l’intéressé le fait sur ses fonds propres et les bénéfices tirés des ventes) : « J’ai remplacé des ceps manquants. Mon père vinifiait à l'ancienne. Il n'embouteillait pas. Il vendait en vrac à des proches et gardait le reste pour la consommation familiale. Je structure une cave. Progressivement, j’ai acquis des cuves en inox, des pompes, une machine à embouteiller, une étiqueteuse…»
Le vin, on ne le boit pas, on le déguste
Le domaine Ponte Storicu produit du blanc et des rouges classé IGP (Indication géographique protégée). Pourquoi ne pas produire du rosé ? « Le rosé, je n’aime pas trop » avoue Antoine Orsini. Pour les cépages, ce dernier veut le meilleur : « Pour le blanc, du Vermentinu. Pour le rouge, du Merlot que l’on retrouve dans le Pomerol et le Saint-émilion, du Niellucciu et du Sciaccarellu ». La production est déclinée en un blanc le Suertu (Vermentinu) et trois rouges le Fiume Rossu, le Battaglia (Niellucciu, Sciaccarellu) et le haut de gamme 0’Ghjuvà (Merlot, Niellucciu) dont le millésime 2023 a été pour la première fois soumis au nez et aux papilles des connaisseurs, fin juillet dernier, lors de la Fiera di u Pratu. Concernant la commercialisation, Antoine Orsini joue la diversification : « Les 10 000 bouteilles produites annuellement vont à des bars, des restaurants, à la grande distribution et on peut bien sûr les trouver à la boutique Ponte Storicu à Ponte Novu. Je garde un peu de vrac pour la famille. Ponte Storicu est présent dans les foires. A la Canonica, au col de Pratu, à A Santa di u Niolu...». Après cinq ans d’engagement, Antoine Orsini ne regrette rien. Au contraire, il savoure : « Le vin, ce n’est pas un produit comme un autre. C’est noble. C’est festif. Cela crée de la convivialité et du partage. Cela a un rapport au sacré depuis l’Antiquité. On ne le boit pas, on le déguste ».
Domaine Ponte Storicu :
Ponte Novu- Castellu di Rustinu / [email protected] / 06 87 73 92 42
Jean-Pierre Bustori
Crédit photos : Domaine Ponte Storicu