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La mort tranquille de Scapula, un repenti légendaire

François Scapula aussi appelé dans le milieu Scapula la Balance......

La mort tranquille de Scapula, un repenti légendaire



François Scapula aussi appelé dans le milieu Scapula la Balance est mort de sa belle mort non loin de son quartier de naissance à Marseille le 7 juillet 2024. Ultime pied de nez de ce "repenti" qui dénonça aux stups français et américains une partie du trafic d’héroïne post French Connection, il a fait savoir par un avis officiel de décès lui que l’on croyait mort aux États-Unis depuis sept années. Scapula avait notamment balancé le nom des assassins du juge Michel assassiné à Marseille le 21 octobre 1981 parmi lesquels son ami d’enfance, son alter ego, François Girard dit le Blond, libéré en 2017. Retour sur un personnage qu’on retrouve également proche du SAC de Marseille et ami de Jean-Marc Leccia ce chimiste de la post French Connection, accusé par le FLNC d’être l’un des assassins de Guy Orsoni en juin 1984 et exécuté dans sa cellule de la prison d’Ajaccio le 7 juin 1984.


Scapula un nom prédestiné


François Scapula était né des œuvres d’Ange, un Corse du Sartenais et d’une mère d’origine italienne. En langue corse et en latin a scapula était l’omoplate grâce à laquelle les anciens cherchaient à devenir l’avenir. Et par une facétie linguistique scapulà signifie également fuir, s’enfuir, disparaître. Un signe du destin ? Le destin hors norme de ce trafiquant de drogue international, devenu le second repenti de la grande criminalité française — après Richard Berdin en 1971 — a été longuement évoqué dans deux ouvrages portant sur la mort du juge Michel, ce magistrat qui avait mis à mal le système mafieux marseillais de Zampa, du Belge et du Mat. Le premier, écrit par Eric Pelletier et Jean-Marie Pontaut s’intitule Qui a tué le juge Michel ? Le second dont l’auteur est l’excellent Thierry Colombié a pour titre La mort du juge Michel. Enfin on ne peut qu’être fasciné par l’enquête menée par Brendan Kemmet exposée dans la revue XXI et sortie durant l’hiver 2022. Étrange parution, très sérieuse très étayée qui donne des précisions étonnantes sur le périple du trafiquant, ses débuts, puis ses voyages à travers le monde. On le suit ainsi de la Turquie à la Sicile, de l’Asie à New York où il travaille avec la famille Genovese pour mettre en place un laboratoire dans l’Arizona où devait « travailler » Jean-Marc Leccia. Kemmet émet en novembre 2022 l’hypothèse selon laquelle Scapula serait mort en 2017 d’un cancer aux USA. Pourquoi ce reportage qui paraît ne s’appuyer sur aucune actualité ? Une hypothèse : le reporter a retrouvé Scapula qui vit à Marseille dans l’anonymat et a passé un deal avec lui. Il ne révèle pas son existence, mais il obtient une sorte d’exclusivité pour le lendemain de sa mort. De fait, Kemmet produit dès juillet 2024 aussitôt après le décès du fugitif d’impressionnantes révélations qu’il publie dans Paris Match, agrémentées d’une photo de Scapula (d’ailleurs méconnaissable) dans son cercueil.

Le SAC et la Corse au rendez-vous


Quand il se trouvait à Paris ou à Marseille, Scapula fréquentait le milieu corso-marseillais puisqu’à l’époque la grande criminalité insulaire existait, mais sur un territoire local et exigu. La Brise de Mer ne s’imposera qu’après les révélations de Scapula et la chute de Zampa. Thierry Colombié révèle les relations du SAC de Marseille (qui sombrera au cours de la tuerie d’Auriol en 1981 quand la famille de Massié l’un des dirigeants sera massacré par son lieutenant Maria). Ça serait un de ses membres, Lionel Colard qui aurait placé la bombe dans l’aéroport d’Ajaccio, le 16 avril 1981, lors de la venue du président Giscard d’Estaing pour laisser croire à la responsabilité du FLNC. L’explosion, partie du bloc des consignes, avait blessé huit personnes et tué M. Peter Hitz, un touriste suisse de dix-neuf ans.

Ce sont les amis de Scapula et de Leccia qui avaient créé le mouvement barbouzard FRANCIA en 1977 avec l’aval de la direction nationale du SAC. Le SAC avait été créé en 1961 par des Corses parmi lesquels Charles Pasqua pour combattre l’OAS en recrutant des membres de la pègre. Pierre Bertolini et Alain Oliel, membre de Francia étaient aussi encartés au SAC et avaient créé l’évènement lors des évènements de Bastelica Fesch en janvier 1980. Les responsables du SAC, lors d’une réunion le 28 février 1981 en présence de Jacques Foccart, le roi de la barbouzerie, décidaient d’ailleurs la création d’un comité de soutien à Pierre Bertolini.

Scapula connaissait très Contini, l’autre assassin de Guy Orsoni qui avait été intégré au réseau de drogue auquel avait participé Jean-Marc Leccia et vraisemblablement son père Grégoire. Ainsi se rend-on compte que si système mafieux il y a eu, il se trouvait dans ce mélange de gros bras, de voyous et de gaullistes historiques. Avec la mort de Scapula c’est le trafic de drogue mené par les Corses qui prend fin. Désormais c’est la criminalité issue des banlieues qui tient la corde largement dominée par la Mocro maffia, celle dirigée par des ressortissants originaires du Maroc.

GXC
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