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Le paradoxe du béton

Le secteur du BTP corse tire la sonnette d'alarme.....

Le paradoxe du béton



Le secteur du BTP corse tire la sonnette d'alarme désignant une baisse des permis de construire de 30%. Or jamais la Corse n'a été aussi "bétonné" cette vague submersive ayant débuté paradoxalement en 2015, un an après le dépôt des armes du FLNC, le vote du PADDUC et l'arrivée triomphale d'une majorité nationaliste toutes tendances confondues. La loi littoral, loin d'empêcher cette invasion bétonnière, l'a favorisé à travers les autorisations dans la continuation des villages existants, tandis que les associations de défense de l'environnement se focalisaient sur les quelques infractions qu'elles portaient devant les tribunaux. Pendant ce temps, deux maux majeurs montaient en puissance : le logement pour les Corses, l'accès utiles aux terres ancestrales pour les jeunes Corses interdits d'y habiter et d'y travailler.


Les trois piliers de l'économie corse


La Corse vit essentiellement de la manne étatique à travers les subventions ou les emplois publics. Mais elle dispose également du tourisme et du bâtiment. Or il est devenu évident que parce qu'en Corse nous ne maîtrisons plus aucun secteur de l'économie, ces deux secteurs se sont transformés en poisons violents. A petite dose et contrôlés, ils apportaient leur part de richesse. Désormais ils posent bien des problèmes que nous ne savons pas traiter : spéculation, locations hors radars fiscaux, déchets, surconsommation énergétique etc. Toutes les régions hyper touristiques connaissent les mêmes maux mais ici la part du toursisme dans le PIB local est telle que les effets pervers sont dramatiquement ressentis.

Une gentrification désordonnée


La Corse gagne près de 4000 habitants par an. Là encore le paradoxe est total. On sait qu'une économie ne saurait fonctionner en dessous d'un certain seuil de consommation. Or la Corse ne forme un marché unique mais un archipel de marchés relativement imperméables les uns aux autres. Et on serait dans l'erreur en omettant le marché sarde dans la partie mériodionale de notre île et le marché toscan au septentrion sans oublier ceux de Marseille et de Toulon. C'est dire s'il est difficile de prévoir en toute assurance. Ce qui est certain c'est que ce nouvel apport de population, très mélangé en vérité, apporte dans l'île une richesse qui profite essentiellement à une nouvelle bourgeoisie solidement adossée au mouvement autonomiste ou alors totalement extérieure à la Corse. C'est le cas de ces retraités continentaux qui achètent des appartements pour y vivre une partie de l'année, les louer une autre partie et éventuellment les revendre avec une belle plus-value. Cette gentrification désordonnée profite peu à la Corse sinon ponctuellement à travers les activités du secteur immobilier. La réalité est là : les Corses dans leur immense majorité sont de plus en plus exclus d'une dialectique économique qui enrichit ceux qui possèdent déjà un patrimoine financier.

Des contradictions qui s'exacerbent


Bien malin celui qui peut prévoir l'endroit précis et le moment exact de l'éclatement d'un contenant surgonflé. C'est ce qui se passe dans les sociétés dont les contradictions sont repoussés dans les coins grâce à de faux semblants. L'idéologisme n'a de puissance populaire que s'il appuie des réalisations sociales. Sinon il n'est qu'un fard appliqué sur une face ridée. Le nationalisme avait pour fondement l'identité corse qui contrairement à ce qu'ont pu déclarer les partis traditionnels n'était pas qu'une vue de l'esprit.Mais in fine il faut manger.Le nationalisme est aujourd'hui incapable d'offrir une espérance réelle aux plus démunis dont le nombre ne cesse de croître. Personne ne peut prévoir par qui et par quoi il va être remplacé. Mais va se faire, croûte par croûte jusqu'à ce que le roi soit nu. Ça n'est pas pour autant que la question identitaire sera effacée. Mais elle réapparaîtra sous des formes nouvelles peut être de gauche plus vraisemblablement de droite dans une île qui penche naturellement de ce côté là de l'échiquier politique.
Comment arrêter le massacre ?

L’affaire Peretti est emblématique en ce sens qu’elle met en exergue une légalité qui autorise le sac de la Corse ou plutôt de certains endroits, les plus prisés, par la spéculation et l’argent à tel point qu’aujourd’hui acheter un bien dans ces endroits est un luxe inouï et que par contagion les prix flambent partout. Et en face, elle oppose un monde ancestral condamné par la justice à disparaître après plaintes d’associations qui affirment défendre l’environnement. Qu’est-ce qu’une culture ? C’est un mélange subtil de traditions, de sentiment d’appartenance à un lieu, à un mode de vie, mais aussi le mariage de la nostalgie et du désir de s’en extirper. La loi générale nivelle les différences, broie les identités. C’est tout cela qu’il faut remettre sur le métier pour faire en sorte qu’en Corse, mais aussi partout en France la loi épouse les contours des divers particularismes. C’est à ce prix et à ce prix seul que la paix civile sera garantie.



GXC

Illustration : GXC
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