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Municipales 2026 : bataille de Bastia, c’est parti !

Des opposants sont déjà en campagne, d’autres devraient suivre. Les déclarations musclées des uns et des autres, énonçant des critiques anciennes et des griefs nouveaux, ...
Municipales 2026 : bataille de Bastia, c’est parti !


Des opposants sont déjà en campagne, d’autres devraient suivre. Les déclarations musclées des uns et des autres, énonçant des critiques anciennes et des griefs nouveaux, laissent présager que ces opposants et ceux qui se dévoileront dans les semaines ou les mois qui viennent, ne feront pas de quartier. Pour Pierre Savelli, s’il est candidat au renouvellement de son mandat, la prochaine élection municipale ne sera pas une promenade de santé.


Julien Morganti, leader d’A Mossa (Le Mouvement, Un Futur pour Bastia), entend créer les conditions d’une alternative. Lors d’une interview accordée à notre titre en décembre, il l’a affirmé très clairement et a affiché deux axes stratégiques. Premier axe : susciter un rassemblement et construire un projet d’alternative pour Bastia à partir de ses propositions et celles d’autres forces politiques : « Nous prônons des démarches de rassemblement dès le premier tour […] Pour cela, il faut envoyer des signes d’union bien avant les élections […] La tête de liste n’est pas un préalable à l’union mais doit être incarnée par celui qui peut rassembler le plus. La plateforme de convergence sera la base des discussions selon trois aspects : le projet, les accords politiques […] Les contacts avec les autres formations politiques ont débuté [...] C’est uniquement dans cet esprit de l’on arrivera à réunir tous ceux qui veulent une alternative à Bastia ». En ce sens, ces dernières semaines, dans un courrier qu’il leur a adressé, Julien Morganti a invité les opposants au maire de Bastia siégeant au conseil municipal (notamment Jean Zuccarelli et Jean-Martin Mondoloni) et les partis nationalistes opposés à la majorité territoriale siméoniste (Partitu di a Nazione Corsa, Core in Fronte), à contribuer à la construction d’un rassemblement et d’une alternative. Deuxième axe : s’opposer frontalement. C’est clair, Julien Morganti ne fait pas de cadeaux. Dès décembre dernier, dans nos colonnes, sa critique de l’action du maire de Bastia était à la fois globale et sectorielle : « Bastia va mal. C’est le mandat du temps perdu […]
Il y a trois problèmes. Le premier est le manque de vision : déficit de stratégie sur les grands projets, déclassement avec la collectivité unique, perte du statut de capitale économique. Le deuxième est le manque de gestion du quotidien : saleté, problèmes de circulation et de stationnement, domaine public anarchique, pas de stratégie environnemental. Le troisième est financier : la mairie n’a plus la capacité d’investir […] Tous les travaux en cours à la ville de Bastia dérapent soit en matière de coût financier, soit dans les délais de réalisation.Il y a un manque de rigueur qui nuit à la crédibilité de la ville. […] En 2014, la dette de la ville était de 30 millions. Aujourd’hui, elle est de 50 millions […] La mauvaise gestion à un coût : celui de la hausse des impôts ».
Ces derniers mois, Julien Morganti a ajouté de nouvelles critiques. En mars, il a vertement critiqué le PLU (Plan Local d'Urbanisme), le décrivant comme manquant d'ambition, truffé d’incohérences, de nature à faire fuir les classes moyennes, ratant le virage écologique. Il y a quelque jours, il a dénoncé une progression de la pauvreté, du communautarisme et de l’insécurité dans les quartiers plus modestes de Bastia.


Retour offensif de Sylvain Fanti


Ayant été candidat en 2014, Sylvain Fanti avait fait l'impasse en 2020. Dans un communiqué publié le 18 juin dernier, alors que la campagne des élections législatives battait son plein et que la droite bastiaise n’avait pas été en mesure de présenter un candidat dans la première circonscription de Haute-Corse, donc à Bastia, il a appelé son camp au sursaut et annoncé sa candidature à l’élection municipale de Bastia en 2026, en usant d’un discours énergique et conquérant. En ce sens, il a écrit sur sa page X : « La droite, dans la première circonscription, ne doit plus avoir peur ! » Ces quelques jours, Sylvain Fanti confirme, sur le terrain et par une présence dans les médias, sa volonté forte de porter haut les couleurs de la droite libérale bastiaise lors de la prochaine bataille municipale. Sur le terrain, il a organise la distribution de milliers d’exemplaires d’un tract intitulé « Bastia Capitale, avec Sylvain Fanti » qui affiche l’exorde « Ne plus avoir peur, construire ensemble notre avenir ». Ce tract comporte un QR Code invitant les Bastiaises et les Bastiais à se connecter sur un questionnaire en ligne et à répondre en faisant part de leur sentiment sur l’état de la ville et et leurs attentes dans différents domaines (Circulation et stationnement / Développement économique et social / Culture, identité et qualité de vie / Enseignement et sport / Grands projets / Petites actions / Développement durable). Il s'agit sans conteste d’une première étape d’entrée en campagne. D’autant que sur le tract sont aussi indiquées cinq valeurs que Sylvain Fanti attribue à Bastia (sous-entendu, selon lesquelles il entend agir) : Identité (tout ce qui fait de Bastia une ville unique et capable d’embrasser le changement) / Travail et création de richesse (développement économique, création d’opportunités et d’emplois) / Changement climatique (faire de Bastia une ville durable, respectueuse de son environnement) / Capacité de faire (mener à bien des projets réalistes pour améliorer le quotidien) / Esprit de conquête (faire de Bastia une ville leader). S’étant déclaré candidat, Sylvain Fanti ne s’affiche pas encore tête de liste même si, manifestement, il y pense en se rasant le matin. Il commence d’ailleurs à s’en donner les moyens relationnels et politiques. « J'ai rencontré toutes les personnalités de la droite à Bastia, de Jean-Martin Mondoloni à Jean-Louis Milani »a-t-il récemment confié à Corse Matin. Pour l’heure, cependant, Sylvain Fanti la joue modeste et respectueuse. Il se borne à prôner « un rassemblement », laissant ainsi à Jean-Martin Mondoloni l‘initiative de lui passer le témoin (tablant sans doute que la stature et l’audience acquises par ce dernier durant le processus Beauvau, l’inciteront à se réserver et se préserver en vue du combat du scrutin territorial 2028).
En attendant d’être adoubé, on l’a vu, Sylvain Fanti se prépare au combat et commence même un travail de sape contre la gestion de Pierre Savelli, notamment en qualifiant Bastia de
« ville à la traîne qu’il convient de redynamiser ».


Les droites identitaires veulent en découdre


Les droites identitaires veulent elles aussi en découdre. Nicolas Battini, le leader de Mossa Palatina, avant même le lancement officiel de son parti qui revendique être porteur d’un nationalisme identitaire et autonomiste revendiquant avoir sa place reconnue et respectée au sein de la République française, a désigné la bataille de Bastia comme étant la mère des batailles municipales, et la municipalité bastiaise comme étant une cible prioritaire. Ses propos dans différents médias ont été plus que clairs : « Mossa Palatina aura vocation à s'investir dans la totalité des échéances électorales et partout où elle sera en capacité de dresser des listes […] Je mènerai à la mairie de Bastia une croisade qui restera dans les annales ».
Pourquoi ce ciblage par un leader et un parti s’affichant nationalistes, d’une équipe municipale qui est héritière de la première grande victoire électorale de la mouvance nationaliste ? Selon l’intéressé et les membres de son parti, l’actuelle politique bastiaise doit être combattue du fait que, selon eux, elle favorise un wokisme destructeur pour l’identité corse et une approche sociale et sociétale faisant de Bastia, une proie facile pour l’immigration massive, la clochardisation, les incivilités, l’insécurité et le trafic de stupéfiants. En avril dernier, Christophe Canioni, qui a été un des responsables corses du Front National et un élu de ce parti à l'Assemblée de Corse, et est aujourd’hui un des leaders de Forza Nova, parti qui se définit comme le premier mouvement nationaliste corse de droite, a lui aussi déclaré qu’à l’occasion des élections municipales de 2026, il conduirait une liste à Bastia. Selon l’intéressé et son parti, il s’agira de prioritairement porter les messages suivants : mettre fin à un déclin économique caractérisé par de nombreuses fermetures de commerces, lutter contre l'insécurité et le trafic de stupéfiants, mettre en cause une responsabilité partagée de l’État, de la Ville de Bastia et de la Communauté d’Agglomération de Bastia en matière de politique du logement social car, selon Forza Nova, le contingent préfectoral des logements sociaux est quasi-exclusivement affecté à l'immigration extra-européenne et « les élus pourtant étiquetées nationalistes » ne s’y opposent pas ou font de même.
Ces derniers jours, une conférence de presse a confirmé la candidature de Christophe Canioni et précisé quelle serait celle d’une « union des droites », notamment du fait du ralliement d’Alexis Fernandez, un ancien candidat Rassemblement National aux élections législatives, leader d’un petit part identitaire et souverainiste. Cette union des droites sera, selon ses initiateurs, ouverte à tous ceux qui se reconnaissent dans une série de principes dont la lutte contre le "wokisme" , la défense de l’identité corse, la lutte contre la paupérisation, la priorité donnée aux Corses pour l’accès aux logements sociaux, la sécurité des citoyens. Ils n’ont pas exclu qu’elle comprenne les antennes corses des partis nationaux Reconquête et Rassemblement National.
A droite, cela se décante. Côtés centre gauche, gauche et nationalistes, cela devrait bientôt commencer à se dessiner. A ce jour : Jean Zuccarelli n’a pas renoncé ; Jean-Sébastien de Casalta, qui devrait sortir blanchi de l’abracadabrantesque affaire Victoria, est incité par des amis à repartir au combat ; des militants proches de La France Insoumise et pourquoi pas le Parti communiste pourraient confier à Sacha Bastelica, candidat qui a réalisé un score plus qu’honorable à Bastia lors du premier tour des élections législatives (10,39 %), la mission de porter les couleurs de la gauche ; Core in Fronte et Nazione seront sans doute de la partie.
Pour Pierre Savelli, s’il est candidat au renouvellement de son mandat, la prochaine élection municipale ne sera pas une promenade de santé.


Pierre Corsi
Crédit photo : Journal de la Corse
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