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Autonomie : Anne, ma soeur Anne ne vois-tu rien venir ?

L'exécutif de la Corse à la recherche d'un signe positif

Autonomie : Anne, ma sœur Anne ne vois-tu rien venir ?


Tous les enfants ont appris cette question lancinante posée par l’épouse de Barbe Bleue, en danger de mort, qui attend son sauveur dans un conte de Charles Perrault. Et sa sœur de lui répondre : « « Je ne vois rien que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie. » Comment ne pas imaginer l’exécutif de la Corse perchée sur un donjon et scrutant avec angoisse le paysage politique français à la recherche d’un signe positif.



Avant la fin de l’année 2025



La ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, Catherine Vautrin a répondu à une question du député Castellani en des termes sibyllins : « L’objectif du gouvernement, c’est de continuer le dialogue, conscient de l’importance de l’autonomie de la Corse dans la République. » Selon la presse, elle a même décliné le calendrier des discussions : la Commission des lois du Sénat doit rendre son rapport fin du mois d’octobre pour ensuite le transmettre à l’Assemblée. La ministre espère la rédaction d’un projet de loi constitutionnelle qui serait éventuellement au Parlement dès l’année 2025. Mais pour espérer être soumis au Congrès, le projet de loi devra d’abord être voté dans les mêmes termes par l’Assemblée et le Sénat, et ensuite conquérir au Congrès, la majorité des trois cinquièmes. Et la ministre de conclure qu’un tel vote pourrait avoir lieu « avant la fin de l’année 2025 ». Que de conditions à remplir et que de prudence dans le propos.



Le président aux abonnés absents


La ministre a reçu Gilles Simeoni et a promis de venir en Corse avant la fin du mois d’octobre ce qui n’engage à rien. On l’aura remarqué : elle n’a jamais évoqué le texte qui devait être avalisé par le président Macron aujourd’hui relégué aux oubliettes par le nouveau premier ministre et les clans qui s’affrontent en vue des élections présidentielles de 2027. Le président de l’exécutif est dans son rôle et personne ne saurait lui reprocher son obstination à croire en un rêve qui semble s’éloigner toujours un peu plus. Le Sénat est tenu par une droite hostile au projet d’autonomie. Il n’est pas même certain que les socialistes y adhèrent soucieux qu’ils sont de maintenir la normalité du territoire français. Car, se disent-ils, après la Corse, il y aura le Pays basque, et la Bretagne, et l’Alsace. Aucun parti, si ce n’est LFI, ne veut être accusé de détricoter (le mot est à la mode) le centralisme républicain. Il y a beaucoup de chances que le projet autonomiste, dont il faut reconnaître qu’il n’est pas le problème majeur de la France aujourd’hui, soit ignoré ou traité par-dessus la jambe par une classe politique française qui se déchire à belles dents au-dessus d’un pays en déshérence.


Di fole in canzone


Le blocage des ports et aéroports de Corse durant une journée a représenté pour le gouvernement un avertissement quant au pouvoir de nuisance potentiel de la Collectivité de Corse. La France est suffisamment occupée par son abyssale dette, par les troubles calédoniens et martiniquais, pour ne pas en rajouter avec la Corse qu’on sait être éruptive. Plusieurs facteurs poussent à croire que Madame Vautrin « nous trimballe » pour parler prosaïquement en espérant calmer le fauve insulaire. Un : son gouvernement est sur un siège éjectable et il lui est facile de parler de l’année 2025 alors qu’elle a toutes les chances de ne plus être à son poste. Deux : quel gouvernement serait en ce moment assez fou pour se lancer dans la bataille de l’autonomie corse alors même que le pays part à vau-l’eau. C’est prendre le risque de faire la quasi-unanimité contre soi et de se retrouver avec seuls alliés ou presque les parias de la France insoumise offrant ainsi un jocker au Rassemblement national. Trois : le Premier ministre a annoncé vouloir supprimer cent mille postes dans les collectivités et économiser cinq milliards d’euros. C’est dire si on va tailler jusqu’à l’os. Or la Corse a un très mauvais bilan économique. La fusion de l’échelle régionale et des départements n’est toujours pas achevée. Notre île connaît un endettement croissant et va vraisemblablement demander plus de crédits pour affronter la crise des transports, des déchets, etc. Comment vont réagir les sénateurs et les députés devant ce paradoxe : demander plus sans grands résultats et cerise sur le gâteau, exiger de tenir la barre du gouvernail ? La France ne s’est pas mieux débrouillée ? Oui mais c’est elle qui tient les cordons de la bourse.

Revenir à l’essentiel


Il faut le répéter jusqu’à ce soit compris : l’idéologie n’a jamais rempli les marmites. L’essentiel est le bien-être de nos concitoyens, de tous nos concitoyens et non celui d’une minorité qui a largement profité de la collectivité unique. Le premier combat à mener est celui de l’économie. La Corse ne peut se permettre d’être passée au crible commun. Chaque euro va compter. Ensuite, il va falloir que la Collectivité fasse au mieux avec le concours de tous.


GXC
illustration : D.R










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