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Retour sur le Festival Arte Mare

Des prix pour l'amour du cinéma

Festival Arte Mare
Des prix pour l’amour du cinéma



Une 42 è édition du festival Arte Mare très brillante par son Panorama Méditerranéen. Des pépites aussi du côté de la Compétition Méditerranéenne… De la diversité de ton, de propos, de styles… tous les ingrédients pour aimer le 7 è art.




« Crossing Istanbul »

Sans contestation possible « Crossing Istanbul », meilleur film de la Compétition, a emporté le Grand Prix Arte Mare – Allindi. Le réalisateur, Levan Akin, Géorgien d’origine, a grandi en Suède, ce qui ne l’empêche pas de nous montrer de superbes images d’Istanbul. La mégapole du Bosphore offre un visage métis comme nulle autre pareille. Loin des circuits touristiques Akin nous révèle des quartiers populaires agrippés à des montées abruptes qui abritent outre les locaux des arrivants des Balkans, de l’Asie centrale, du Caucase. Une ville où la vie est dure sans toutefois être trop misérable, où règnent flemmardant en majesté des chats qui trimbalent au bout de leurs pattes une ambiance de poésie.

Cette Istanbul, Lia, la Géorgienne, la parcourt pour retrouver sa nièce, Tekla, dont elle n’a plus de nouvelles. Lia sait que Tekla s’est réfugié quelque part, pour faire sa transition, dans cette immense et populeuse métropole. On la suit pas à pas dans sa quête, et au fur et à mesure – tout en douceur – on la voit évoluer, rétive au changement de sexe de sa nièce au début, elle adopte un point de vue moins tranché, plus tempéré, puis convaincu après la rencontre avec Evrim, homme devenu femme, qui joint à une élégante beauté des dons d’avocate. Emouvante… rencontre. Akin capte avec une extrême finesse la transformation intérieure de Lia. Les images du chef opérateur, Lisabi Fridell, sont d’une authenticité touchante. L’actrice, qui incarne Lia, Mzia Arabuli, est renversante de vérité. A chaque moment, à chaque instant la réalisation d’Akin est sobre. Elle mise avant tout sur la dignité t la sensibilité, voilà des points forts !



« No Other Land »

« Pas d’autre terre » est un documentaire collectif, dans ses rangs Basel Adra, Hamdan, Ballal, Yuval Abraham, Rachel Szor, soit des Palestiniens et des Israéliens Le film a été tourné des années durant en Cisjordanie, plus précisément au sud d’Hébron. A l’écran Basel, jeune de cette région de Palestine et Yuval de Beer-Sheva dans le Néguev. Tous deux se connaissent depuis longtemps et ont maintenu le dialogue malgré les difficultés causées par l’arrivée au pouvoir en Israël de l’extrême droite fascisante.

Basel raconte, que depuis sa plus tendre enfance, il a toujours eu sous les yeux le terrible spectacle toujours recommencé de la volonté d’élimination programmée des siens… Maisons des villageois détruites au bulldozer par l’armée israélienne. Expulsions massives de Palestiniens. Reconstruction à la hâte la nuit venue des logements qui peuvent l’être. Scénario de désastre constamment renouvelé. Ecole rasée, perte incommensurable et injuste. Poussière et gravats… Suivant les périodes les villageois trouvent refuge dans des grottes malsaines et trop humides où malades et blessés sont encore plus durs à soigner que dans les habitats ordinaires. Saga cauchemardesque avec ses lots de tués en Cisjordanie occupée. Les militaires frappent. Les colons cognent à mort… Mais les villageois résistent.

Les vues de la répression dans le village palestinien sont sèches et cruelles, se dégage d’elles une atmosphère asphyxiante, mais elles sont également leçon de courage en leur simplicité cinglante. Le montage du film est primordial en reflétant toujours le danger de l’anéantissement. Danger à dépasser. A surmonter. En soulignant l’importance de se projeter dans un futur, même incertain.

« No Other Land » a reçu le Prix des Jeunes.



« Rabia »

Réalisé par Mareike Engelhardt « Rabia » est un film rare qui se saisit d’un problème brûlant. « Rabia » a été couronné par le Prix du Public. Une récompense logique tant le sujet du film est grave et dérangeant, tant il interpelle, tant il est d’une audace courageuse. Deux jeunes françaises vont s’enrôler en Syrie dans les forces de DAECH. Il est vrai que l’existence de ces jeunes dans l’hexagone n’est guère réjouissante, limitée qu’elle est aux emplois subalternes sans espoir de s’élever dans l’échelle sociale. Un quotidien étriqué mais de là à s’engager dans l’Etat islamique !... Caprice de filles proches de l’âge adulte ? Hostilité envers un monde occidental qui n’est pas porteur d’avenir et dénué d’idéal ? Volonté de s’assumer par un choix radical irrévocable ?

Sur place la déception de Laila et Jessica est terrible. Ne sont-elles pas claquemurées dans un gynécée étouffant où le valeureux champion de la « cause » qu’on leur avait promis comme époux, n’est qu’un minable porte-flingue ignorant et servile qui ne rêve, in fine, que d’un pavillon de banlieue et d’une épouse docile et ignare en matière de foi à son image ! Rapidement Jessica et Laila n’ont qu’une envie : s’échapper de ce bagne où les femmes ne sont que des pondeuses…

Sous la surveillance d’une garde-chiourme incarnée par l’excellente Lubna Azaral, dont le registre dramatique veut qu’elle puisse tout jouer, les deux jeunes filles vont tenter deux sortes d’évasion : tragique pour Laila, en étant finaude et retorse pour Jessica.

« Rabia » prend aux tripes.



« Les filles du Nil »

Ce docu-fiction, fruit d’un collectif, n’a récolté aucun prix : dommage ! La photo du film est soignée. Elle restitue avec bonheur visages et silhouettes de ces jeunes coptes prêtes à devenir des femmes sans cacher leurs imperfections physiques ou leurs tailles dodues encore proches de l’enfance. Leur qualité essentielle ? Une astuce qui se joue des codes de leur société. Leurs revendications féministes elles les expriment en s’emparant du théâtre de rue qui leur donne un recul suffisant pour exprimer ce qu’elles pensent tout en étant convaincantes. L’égalité, le droit à la culture, leur place dans la société, ces souhaits elles les avancent avec douceur en essayant de persuader les spectateurs que c’est justice.

Certaines vont se laisser prendre au piège de la tradition qui les amènera à se marier et à pouponner. D’autres n’ont pas encore arrêté de décisions. L’une d’elle ne renoncera pas au destin qu’elle s’est fixé : elle fera du théâtre. Le film laisse ouverte les portes du possible. Message de ce documentaire-fiction : rien n’est jamais perdu d’avance. Il faut oser…



« Seven blessings »

Cette réalisation de l’Israélienne, Ayelet Menahemi, a obtenu une mention spéciale du Jury Jeune. Pourquoi cet honneur à une vision folklorisante d’Israël ? Au total : une série d’agapes familiales ponctuées d’empoignades, des scènes répétitives, un cas de conscience qui peine à susciter l’adhésion… En prime un scénario caoutchouteux. Seul atout la pluralité des langues des personnages : on passe de l’hébreu au marocain (arabe) et au français d’une manière fluide fort intéressante. Cela sauve-t-il l’ensemble ?



Lettres siciliennes

Ils se sont mis à deux (Fabio Grassadonia et Antonio Piazza) pour bâtir une histoire où l’on se pédale dans des méandres vaseux, où l’on patauge entre comédie essoufflée et thriller dénué d’efficacité. Résultat… soporifique !



Honeymoon

Venue d’Espagne une leçon magistrale pour qui veut apprendre à louper un film : gags téléphonés, récit hors sol, direction d’acteurs aux abonnés absents et j’en passe et des meilleures… Pénible !

Michèle Acquaviva-Pache

*Photos transmises par les services de presse des films.
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