Partout des foules en déshérence , robots de la numérisation du monde
Des foules abruties dans un environnement pollué.......
Partout des foules en déshérence, robots de la numérisation du monde...
Partout, ces foules abruties dans un environnement pollué par les nouvelles technologies et la numérisation.Partout, les objets connectés et les téléphones portables qui s’insèrent, tels une camisole douce, dans nos vies.
Avec le règne de la vitesse, une image chassant l’autre pour faire accroire que sinon on ne vit pas. Car il faut éloigner la méditation, éloigner le retour sur soi, éloigner l’instant de silence et de paix intérieure.Tout doit toujours être en mouvement.On a réussi à isoler l’être humain du réel pour le priver peu à peu de son humanité. Comme nous le savons avec Jacques ELLUL, la technique n’est pas neutre. La démonstration en est faite en ces temps de déliquescence.
Pourtant le plus grand nombre - illusionné par l’idée du progrès et du mythe, auquel on a réussi à le faire adhérer, selon lequel le progrès est un bien - reste comme anesthésié.Mais le progrès n’est qu’un mouvement, rien d’autre qu’un mouvement. Il peut être ainsi, et aussi, un mouvement vers le néant et la destruction.La grande tromperie de notre époque (mais cela dure depuis quelques décennies, si ce n’est davantage...) est d’avoir imprégné les esprits de l’idée qu’il faut être nécessairement pour le progrès car sinon on refuserait la modernité.C’est ainsi qu’on nous affirme que la modernité est liée indissociablement au progrès, et que pour être au monde il faut être moderne.
On s’approche de la « pensée stupide », car la modernité n’étant juste qu’un moment du temps qui devient, dans le même mouvement, passé. C’est l’éternel recommencement de l’immédiateté pour ne laisser jamais place à un temps immobile.Belle imposture alors. Car, par exemple, les pyramides d’Égypte et leur mystère doivent-ils cesser de nous fasciner parce que non modernes ?
La réalité est que l’on veut chasser le temps immobile, celui qui est propice au retour sur soi, à la vie intérieure, qui est nécessairement celle du temps long. Ainsi haro sur le repos, propice à la méditation, haro sur la lenteur et les pauses.
Il n’est pas insignifiant que dans nos sociétés de l’immédiat, du mouvement permanent, les fins de semaine appelées autrement « week-end » soient stigmatisées comme du temps perdu que l’on doit transformer en temps utile par, notamment, l’ouverture des espaces de consommation. Car l’homme qui ne consomme pas n’est plus dans le mouvement, il doit pouvoir le faire constamment, sans limites. Tout est fait pour que nos vies ne soient que désir, désir de consommer, par exemple, mais aussi désir – permanent – d’autre chose, sans que l’on sache trop quoi, nécessairement. Tout cela qui nous interdit de tenter de parvenir à la plénitude de l’être qui suppose le silence, le recueillement et le temps arrêté, car le désir est intrinsèquement mouvement.
Et d’aucuns poursuivent leur œuvre de destruction de ce que nous sommes, avec l’usage du concept souverain des « valeurs » qui vient compléter l’édifice délétère. C’est le moyen qu’emploient les sachants de « l’ère du vide » pour tenter d’imposer un monde dont leurs esprits dégénérés rêvent. Si on ne les arrête pas, ils viendront bientôt nous dire que les œuvres des peintres primitifs italiens doivent être brûlées car elles portent la marque d’un temps où les « valeurs » démocratiques n’étaient pas respectées. On caricature à peine.
Les « valeurs » sont ainsi la nouvelle jauge absolue du Bien, elles servent de mètre étalon à la mesure de toute chose et doivent nous permettre d’identifier le Bien. Elles sont plus fortes que les nations, plus fortes que la volonté des peuples, plus fortes que la souveraineté des États, car elles sont nécessairement universelles, car le Bien est universel. Le nouveau totalitarisme est celui qui use de tous ces moyens pour assurer toujours et partout notre Bien, valeur absolue contre laquelle le commun des mortels ne peut même pas envisager d’opposer quoi que ce soit.
C’est donc la tyrannie du Bien, dont on ne peut que constater aujourd’hui que nombre d’États en usent avec vigueur pour empiéter sur les libertés individuelles et assujettir les citoyens à leur pouvoir. Il suffit d’observer ce qui se passe autour de nous avec l’ampleur des réglementations dans tous les domaines, et la volonté de faire de plus en plus intrusion dans nos vies. C’est l’ère bureaucratique mâtinée de numérisation. C’est ainsi que la liberté n’est plus la règle. Ce qui était, nous disait-on, l’apanage des sociétés démocratiques…
Jean-François Poli