Napoléon et la papauté; une relation conflictuelle
Unifier la France......
Napoléon et la papauté ; une relation conflictuelle
Quand il devient Premier consul, prélude à son sacre impérial, Bonaparte décide de faire la paix avec les représentants de l’Église réfractaire c’est-à-dire le pape dont la Révolution a fait un de ses ennemis. C’est le début d’une relation houleuse et chaotique.
Unifier la France
Lors des séances du Conseil d’État des 28 thermidor an VIII (16 août 1800) et 14 brumaire an IX (5 novembre 1800), Napoléon déclare vouloir réformer la France sans sectarisme religieux : « Ma politique est de gouverner les hommes comme le grand nombre veut l’être. C’est là, je crois la manière de reconnaître la souveraineté du peuple (…). Moi, je suis philosophe. (…) C’est en me faisant catholique que j’ai fini la guerre de Vendée, en me faisant musulman que je me suis établi en Égypte, en me faisant ultramontain que j’ai gagné les esprits en Italie. Si je gouvernais le peuple juif, je rétablirais le temple de Salomon ». Dans une lettre datée du 10 juillet 1800, Pie VII écrit au cardinal Consalvi chargé des négociations : « Vous pouvez dire au premier consul que nous nous prêterons avec bonheur à une négociation dont le but est si respectable, si convenable à notre ministère apostolique, si conforme aux vœux de notre cœur ».
De l’autre côté ; Napoléon conseille au diplomate Cacault : « Traitez-le comme s’il avait deux cent mille hommes ». Un accord est trouvé : le catholicisme n’est plus religion d’État, mais la religion « de la majorité des citoyens français » ; la papauté ne demande pas la rétrocession des biens nationaux acquis durant la Révolution française alors que précédemment 10 % de la fortune française appartenait à l’Église. L’Église assure la démission des évêques de l’ancien régime. Ils seront remplacés par 60 nouveaux évêques choisis par le Premier Consul et auxquels le pape donnera l’investiture apostolique, fussent-ils d’anciens constitutionnalistes. L’État exerce un contrôle sur l’organisation du culte ; et la liberté religieuse est garantie. Ainsi le culte juif sera reconnu en 1808.
Le Concordat est enfin signé le 15 juillet 1801 et ratifié par Pie VII le 15 août. Toutefois les militaires, anticléricaux, voire athées, s’y montrent hostiles, de même que les membres du Sénat et du Corps législatif.
Des articles contestés et de nouvelles humiliations
Le texte, auquel est adjoint un règlement des Églises protestantes, est voté et promulgué par le Corps législatif le 18 germinal an X (8 avril 1802) sous le nom de Loi des Cultes. Notre-Dame de Paris est rendue au culte catholique pour l’occasion, très précisément pour la fête de Pâques de 1804. Mais en bon gallican, Bonaparte veut pousser son avantage plus loin et soixante-dix-sept articles sont rajoutés par le gouvernement français qui place le clergé sous sa dépendance totale. C’est en partie dans l’espérance d’obtenir l’abrogation de ces articles que le pape accepte de venir sacrer Napoléon Bonaparte le 2 décembre 1804.
La papauté connaît alors deux affronts qui ne sont toujours pas oubliés. Lors de la rencontre organisée dans la forêt de Fontainebleau, Napoléon ne respecte le cérémonial. Ensuite durant le cérémonial, Napoléon se couronne lui-même reléguant le Pape au rang de spectateur. De plus, il n’a rien obtenu à propos des soixante-dix-sept articles. Et lorsqu’en 1809, la papauté refuse d’appliquer le blocus continental contre l’Angleterre, l’Empereur fait envahir les États pontificaux ce à quoi le Pape répond en excommuniant Napoléon au moyen d’une bulle le 10 juin 1809. Le pape est alors arrêté sans que l’Empereur en ait formellement donné l’ordre.
Le Pape emprisonné puis libéré
Le Pape est enfermé durant trois ans dans une forteresse à Savone puis transféré à Fontainebleau en mai 1812. Le 10 juin 1812, alors que Napoléon prépare son invasion de la Russie, il ordonne le déplacement du pape à Fontainebleau, en pleine nuit. Il quitte la ville de Savone et prend la direction de la France. Âgé de 70 ans, il est pris de grandes douleurs au moment de traverser les Alpes. Ce n’est que le 19 janvier 1813 que Napoléon vient enfin le voir. Il lui demande de s’installer à Paris ce à quoi le souverain pontife répond : « Comediante » tandis que l’Empereur lui rétorque : « Tragediente ». Après cinq jours de pression, le 25 janvier 1813, le pape signe Concordat de Fontainebleau par lequel il abdique sa souveraineté temporelle, une partie de son autorité spirituelle et consent à venir résider en France pour se rétracter trois jours plus tard. Mais la situation s’aggrave pour l’Empire et en janvier 1814 c’est au tour de Napoléon de céder. En janvier 1814, il restitue ses États au pape.
Le 23 janvier, Pie VII quitte enfin le château de Fontainebleau et les cardinaux sont libérés. Le 24 mai 1814, il fait une entrée triomphale à Rome. Le pape accueillera cependant après la chute de l’Empire la famille Bonaparte, à commencer par la mère de Napoléon démontrant ainsi son refus d’une quelconque rancune.
GXC
Photo: D.R