Colombani - Arena : pas si opposés que ça
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production comme le préconise Joseph Colombani ; Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et
COLOMBANI-ARENA : PAS SI OPPOSÉS QUE ÇA
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production comme le préconise Joseph Colombani ; Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et vouloir associer toutes les forces vives de la ruralité, comme le souhaite Jean-Baptiste Arena, représentent effectivement deux approches différentes. Mais sont-elles vouées à rester antagoniques ? Cela n’est pas criant.
Le décret n° 2024-645 du 29 juin 2024 a mis fin à la division de la représentation des acteurs de l’agriculture et de la ruralité de notre île en portant création de la Chambre d'agriculture de région Corse dont le siège est situé à U Vescovatu, qui se substitue à la Chambre régionale d'agriculture de Corse et aux Chambres départementales d'agriculture de Corse-du-Sud et de Haute-Corse. Cette création prendra pleinement effet après les résultats de la première élection des membres puis du président de la chambre unique. Le scrutin a débuté le 15 de ce mois de janvier et prendra fin le 31. Il légitimera, pour une période de six ans, les représentants des acteurs du monde agricole, rural et forestier selon la répartition suivante : chefs d'exploitation et assimilés (36) ; propriétaires et usufruitiers (2), salariés (12) ; anciens exploitants et assimilés (2) ; groupements professionnels agricoles (14).
Le président du Centre régional de la propriété forestière et éventuellement des membres associés (ces derniers n’ayant que voix consultative) s’ajouteront aux membres élus pour assurer la gouvernance de l’institution. Établissement public placé sous la tutelle de l’État, la Chambre d'agriculture de région Corse représente un outil important. En effet, elle exerce des missions qui lui donnent un rôle loin d’être négligeable pour ce qui concerne l’évolution de l’activité agricole, des exploitations et des territoires ruraux. On retiendra : accompagnement par le développement, la formation, le conseil et la conduite de projets, ainsi que par la défense des intérêts matériels et moraux ; contribution à l’élaboration de la politique contractuelle État-Collectivité de Corse et des programmes européens ; promotion du développement agricole et agroalimentaire ; participation à la Chambres d’agriculture France (APCA) qui apporte un appui technique, juridique, économique et financier aux chambres d’agriculture, qui contribue à la définition et à la mise en œuvre des politiques agricoles, du développement rural et de l’environnement, qui représente l’ensemble des Chambres d’agriculture auprès des pouvoirs publics nationaux et internationaux, qui joue un rôle consultatif lors des négociations internationales. L’enjeu du scrutin est donc de taille.
Deux listes sont en lice. La liste « Terra nostra » est conduite par Joseph Colombani, éleveur dans le Fium’Orbu, président sortant de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse et de la Chambre régionale d’agriculture, proche de Nazione, et Stéphane Paquet, président de la Chambre d’agriculture de Corse-du-Sud. Elle est soutenue par les FDSEA et les CDJA de Haute-Corse et Corse-du-Sud, fédération et syndicat agricoles qui pèsent lourd dans l’Hexagone. Joseph Colombani et Stéphane Paquet se sont engagés, si leur liste l’emporte, à une présidence alternative et à une préparation de la relève durant les six ans de la mandature : après deux années de présidence, Joseph Colombani cédera la place à Stéphane Paquet pour deux ans, et tous deux sont convenus qu’un « jeune » qu’ils auront formé, assurera les deux dernières années de la mandature. La liste « A l'Iniziu, una Terra » est conduite par Jean-Baptiste Arena, vigneron, dans le Nebbiu, ainsi que maire de Patrimoniu et conseiller de Corse Core in Fronte. Elle est soutenue par la Confédération paysanne, structure syndicale agricole très minoritaire au niveau de l’Hexagone, ainsi que par Mossa Paisana et Via Campagnola, deux syndicats locaux.
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production
Joseph Colombani - tout en concédant que beaucoup reste à faire et en rappelant qu’il a toujours été, reste et restera un syndicaliste de terrain - a défendu fièrement son bilan. Outre évoquer une action quotidienne de soutien aux acteurs agricoles et ruraux ainsi que de recherche de solutions concernant les grandes problématiques du monde agricole (accès au foncier ; dérèglement climatique accentuant la nécessité d’une extension et d’une sécurisation de l’irrigation et d’une gestion responsable de l’eau ; structuration de la commercialisation locale rendue difficile par l’absence de marché de gros ; manque d’unités d’abattage ou de transformation ; financements des projets d’installation et des filières ; formation ; prévention et traitement des menaces sanitaires telles que Xylella fastidiosa, la fièvre catarrhale ou la punaise diabolique ; difficultés de transport des productions vers l’extérieur handicapant l’exportation ...), le président sortant a mis en exergue des réalisation qui lui paraissent avoir relevé d’une vision fonctionnelle ou d’avenir. L’intéressé a affirmé que l’implantation de la Chambre régionale dans de nouveaux locaux situés à U Vescuvatu que certains ont décrié, a : valorisé l’institution (bâtiments et aménagements intérieurs offrant une image de modernité et de professionnalisme) ; répondu à un besoin organisationnel et managérial (amélioration des conditions de travail des personnels et de l’accueil des différents visiteurs) ; ouvert des opportunités (antennes ou permanences de différents organismes professionnels, organisation in situ du Salon de l’agriculture corse « Agri’sgiani ») ; représenté un acte de bonne gestion (prélèvement évité de 1,4 million d’euros sur le fond de roulement). L’intéressé s’est félicité qu’en soutenant l’installation de jeunes agriculteurs, notamment dans le domaine Casabianca avec le concours de l’Office foncier, la Chambre ait agi pour conserver ou développer la vocation agricole des territoires concernés.
Joseph Colombani a aussi rappelé que durant sa mandature avait été réalisé un important travail prospectif élaboration d’un « Projet agricole pour la Corse » dans le cadre de la préparation du projet de Loi d’Orientation Agricole dont l’examen et le vote ont été stoppés par la dissolution de l’Assemblée Nationale ; concertation et propositions en vue de la remise d’un projet de politique agricole prenant en compte une évolution institutionnelle vers l’autonomie, pour répondre à une demande formulée par le Conseil Exécutif de Corse.
Joseph Colombani veut encore aller de l’avant. Si sa liste l’emporte, il entend que la Chambre d'agriculture de région Corse oriente son action selon les priorités suivantes : un revenu décent pour chaque exploitant ; une production de qualité pour toutes les catégories de la population corse et non pas uniquement pour des clientèles aisées ou touristiques ; aller vers l’autosuffisance alimentaire et les circuits courts tout en soutenant les filières exportatrices ; des pratiques de production durables et écologiques ; des productions dans toutes les régions de l’île essentiellement à partir d’exploitations familiales ; demander une répartition claire des compétences entre les différents acteurs institutionnels, économiques et syndicaux de l’agriculture et une « feuille de route » pluriannuelle comportant des objectifs précis et chiffrés ; défendre une politique agricole spécifique adaptée au contexte insulaire, au besoin en demandant des dérogations auprès de l’Union Européenne. En conclusion, au vu de son bilan et de ses propositions, on peut considérer que Joseph Colombani préconise une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production .
Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et vouloir associer toutes les forces vives de la ruralité
Jean-Baptiste Arena défend une démarche moins globalisante et moins tournée vers un objectif de production visant à alimenter régulièrement le marché local. En effet, il préconise d’agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie. Les interventions lors du meeting qu’il a tenu avec ses colistiers à Corti étaient particulièrement signifiantes. Elles ont effet loué la pertinence d’agir à partir des filière. Le président de l'AOP Castagna Corsa, à mis en exergue que « la capacité de résilience » de sa filière avait permis d’endiguer les ravages du cynips. Une colistière a regretté que la filière Plantes aromatiques soit « peu organisée ».
Un colistier éleveur a appelé, concernant les filières animales, à la mise en place d’une commercialisation localement et à l'exportation, ainsi qu’à l'obtention d'appellations pour « valoriser le travail des bergers » selon un prix de leur labeur qui soit « digne ». Jean-Baptiste Arena a de son côté évoqué les difficultés prévisibles de la viticulture et de l’agrumiculture. Il semble bien qu’inciter à partir d’une politique globale, à l’augmentation de la production agricole, à son extension à l’ensemble du territoire insulaire et à l’autosuffisance alimentaire, n’est pas une priorité. L’objectif semble davantage être un renforcement des filières au niveau de la production et de la commercialisation, à partir de leur propre dynamique. Notable différence avec ce que propose Joseph Colombani.
Jean-Baptiste Arena paraît par ailleurs vouloir opter pour une démarche ne privilégiant pas la préconisation de grandes priorités portées par des acteurs institutionnels de l’agriculture. Il semble, outre ces institutionnels, vouloir mobiliser et associer toutes les forces vives de la ruralité. En effet, il affirme que la survie de l’agriculture est intimement liée à celle du peuple corse sur sa terre et que la sauver et la développer nécessitent une synergie comprenant toutes les institutions, les activités économiques et ce qui reste de population dans les villages. C’est donc plus autour d’un projet de revitalisation rurale que d’un projet de développement agricole qu’il entend mobiliser la Chambre d’agriculture s’il en conquiert la présidence, est c’est autour de cette vision qu’il souhaite agréger les concours des différentes institutions concernées (Collectivité de Corse, communes, intercommunalités, socioprofessionnels, autres chambres consulaires).
En revanche, l’approche des problématiques structurelles de Jean-Baptiste Arena, ne diffère guère de celle de Joseph Colombani. Quelques exemples, il juge prioritaire d’agir : pour faciliter l’accession au foncier afin de favoriser l’installation de jeunes agriculteur ; pour l’amélioration et l’extension de l’irrigation afin d’être en mesure de développer la production et de faire face au dérèglement climatique ; pour la prévention et l’action contre les fléaux sanitaires ou invasifs (fièvre catarrhale, peste porcine, xylella fastidiosa, cynips, fourmis, frelons asiatiques…) ; pour réduire les coûts liés du transport...
Une même volonté viscérale, de la complémentarité
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production comme le préconise Joseph Colombani ; Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et vouloir associer toutes les forces vives de la ruralité, comme le souhaite Jean-Baptiste Arena, représentent effectivement deux approches différentes. Mais sont-elles vouées à rester antagoniques ? Cela n’est pas criant. En effet, les deux candidats à la présidence de la Chambre d'agriculture de région Corse, sont animés d’une même volonté viscérale : pérenniser et développer une agriculture au service de ses exploitants et d’une certaine idée de la Corse : la Corsica Nazione porteuse d’une identité et de valeurs spécifiques. Dans les démarches qu’ils se proposent de mener, tout est somme toute complémentaire : une démarche institutionnelle et une mise en synergie des forces vives de la ruralité peuvent se conjuguer ; une action globale d’accroissement de la production peut aller de pair avec le développement des filières. Enfin, on l’a vu précédemment, l’approche des problématiques structurelles de Jean-Baptiste Arena ne diffère guère de celle de Joseph Colombani. Et pourquoi ne pas l’écrire, l’expérience de Joseph Colombani et l’apport d’idées nouvelles par Jean-Baptiste Arena pourraient constituer un heureux mélange Considérant tout cela, on comprend d’ailleurs mieux que les deux candidats aient plusieurs fois indiqués être disposés à travailler ensemble quelle que soit l’issue du scrutin. Jean Baptiste Arena a même été particulièrement clair lors de son intervention à Corti : « Quels que soient les résultats, nous travaillerons ensemble, parce qu'il est hors de question de cliver l'agriculture corse. Il va falloir tous se retrouver, que ce soit entre syndicats, entre filières et avec des gens hors structures ».
La Rédaction
Le FLNC a dit la sienne…
Dans un communiqué de quatre pages, le FLNC a dit la sienne concernant la situation et les perspectives de l’agriculture corse, sans toutefois évoquer ni les élections à la Chambre d'agriculture de région Corse, ni le duel Joseph Colombani - Jean-Baptiste Arena. Rappelant l’intérêt que, depuis la création de leur organisation en 1976, ils portent à la défense de la terre et au sort de l’agriculture, les clandestins dressent un état des lieux pessimiste voire alarmant. Ils déplorent que le changement climatique affecte l’élevage du fait de sécheresses qui « causent un appauvrissement des sols et une fragilisation des cultures » et « permettent de moins en moins de produire correctement du fourrage pour l’alimentation des bêtes » ; et aussi du fait d’inondations, souvent automnales, qui « privent les éleveurs de zones entières de pâturage et les contraignent à devoir faire l’achat de nourriture pour le bétail ». Les clandestins ajoutent que la pénurie de nourriture pour le bétail contribue à accroître les difficultés des éleveurs car elle entraîne une hausse de leurs coûts alors que les prix de vente de leurs productions n’augmentent pas. Les clandestins dénoncent aussi l’inaction de l’État face aux fléaux sanitaires et invasifs. Concernant la fièvre catarrhale, ils soulignent : « La responsabilité de l’État français est totale. C’est lui qui a en charge l’état sanitaire à travers son organisme de la direction des services vétérinaires » Les clandestins s’inquiètent du sort d’autres filières : « Faut-il attendre que nos vergers soient ravagés, que nos espèces endémiques disparaissent ? Que notre arboriculture multiséculaire d’oliviers et autres espèces soient rayées de notre histoire sur l’autel de la législation européenne de libre circulation ? » Enfin, les clandestins dénoncent une « prédation foncière » qu’ils qualifient de « sans précédent » et « ceux qui investissent, Corses ou pas, en transformant notre secteur primaire en vaste terrain de jeu spéculatif, profitant des quelques productions qui s’avèrent être encore rémunératrices » et « ainsi compromettent l’avenir de l’agriculture ». Pour conclure, les clandestins affirment rejeter la vision « productiviste et mondialisée »
de l’agriculture.
Crédit photos : JDC, Chambre d'agriculture Corse, liste a l'iniziu, una terra
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production comme le préconise Joseph Colombani ; Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et vouloir associer toutes les forces vives de la ruralité, comme le souhaite Jean-Baptiste Arena, représentent effectivement deux approches différentes. Mais sont-elles vouées à rester antagoniques ? Cela n’est pas criant.
Le décret n° 2024-645 du 29 juin 2024 a mis fin à la division de la représentation des acteurs de l’agriculture et de la ruralité de notre île en portant création de la Chambre d'agriculture de région Corse dont le siège est situé à U Vescovatu, qui se substitue à la Chambre régionale d'agriculture de Corse et aux Chambres départementales d'agriculture de Corse-du-Sud et de Haute-Corse. Cette création prendra pleinement effet après les résultats de la première élection des membres puis du président de la chambre unique. Le scrutin a débuté le 15 de ce mois de janvier et prendra fin le 31. Il légitimera, pour une période de six ans, les représentants des acteurs du monde agricole, rural et forestier selon la répartition suivante : chefs d'exploitation et assimilés (36) ; propriétaires et usufruitiers (2), salariés (12) ; anciens exploitants et assimilés (2) ; groupements professionnels agricoles (14).
Le président du Centre régional de la propriété forestière et éventuellement des membres associés (ces derniers n’ayant que voix consultative) s’ajouteront aux membres élus pour assurer la gouvernance de l’institution. Établissement public placé sous la tutelle de l’État, la Chambre d'agriculture de région Corse représente un outil important. En effet, elle exerce des missions qui lui donnent un rôle loin d’être négligeable pour ce qui concerne l’évolution de l’activité agricole, des exploitations et des territoires ruraux. On retiendra : accompagnement par le développement, la formation, le conseil et la conduite de projets, ainsi que par la défense des intérêts matériels et moraux ; contribution à l’élaboration de la politique contractuelle État-Collectivité de Corse et des programmes européens ; promotion du développement agricole et agroalimentaire ; participation à la Chambres d’agriculture France (APCA) qui apporte un appui technique, juridique, économique et financier aux chambres d’agriculture, qui contribue à la définition et à la mise en œuvre des politiques agricoles, du développement rural et de l’environnement, qui représente l’ensemble des Chambres d’agriculture auprès des pouvoirs publics nationaux et internationaux, qui joue un rôle consultatif lors des négociations internationales. L’enjeu du scrutin est donc de taille.
Deux listes sont en lice. La liste « Terra nostra » est conduite par Joseph Colombani, éleveur dans le Fium’Orbu, président sortant de la Chambre d’agriculture de Haute-Corse et de la Chambre régionale d’agriculture, proche de Nazione, et Stéphane Paquet, président de la Chambre d’agriculture de Corse-du-Sud. Elle est soutenue par les FDSEA et les CDJA de Haute-Corse et Corse-du-Sud, fédération et syndicat agricoles qui pèsent lourd dans l’Hexagone. Joseph Colombani et Stéphane Paquet se sont engagés, si leur liste l’emporte, à une présidence alternative et à une préparation de la relève durant les six ans de la mandature : après deux années de présidence, Joseph Colombani cédera la place à Stéphane Paquet pour deux ans, et tous deux sont convenus qu’un « jeune » qu’ils auront formé, assurera les deux dernières années de la mandature. La liste « A l'Iniziu, una Terra » est conduite par Jean-Baptiste Arena, vigneron, dans le Nebbiu, ainsi que maire de Patrimoniu et conseiller de Corse Core in Fronte. Elle est soutenue par la Confédération paysanne, structure syndicale agricole très minoritaire au niveau de l’Hexagone, ainsi que par Mossa Paisana et Via Campagnola, deux syndicats locaux.
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production
Joseph Colombani - tout en concédant que beaucoup reste à faire et en rappelant qu’il a toujours été, reste et restera un syndicaliste de terrain - a défendu fièrement son bilan. Outre évoquer une action quotidienne de soutien aux acteurs agricoles et ruraux ainsi que de recherche de solutions concernant les grandes problématiques du monde agricole (accès au foncier ; dérèglement climatique accentuant la nécessité d’une extension et d’une sécurisation de l’irrigation et d’une gestion responsable de l’eau ; structuration de la commercialisation locale rendue difficile par l’absence de marché de gros ; manque d’unités d’abattage ou de transformation ; financements des projets d’installation et des filières ; formation ; prévention et traitement des menaces sanitaires telles que Xylella fastidiosa, la fièvre catarrhale ou la punaise diabolique ; difficultés de transport des productions vers l’extérieur handicapant l’exportation ...), le président sortant a mis en exergue des réalisation qui lui paraissent avoir relevé d’une vision fonctionnelle ou d’avenir. L’intéressé a affirmé que l’implantation de la Chambre régionale dans de nouveaux locaux situés à U Vescuvatu que certains ont décrié, a : valorisé l’institution (bâtiments et aménagements intérieurs offrant une image de modernité et de professionnalisme) ; répondu à un besoin organisationnel et managérial (amélioration des conditions de travail des personnels et de l’accueil des différents visiteurs) ; ouvert des opportunités (antennes ou permanences de différents organismes professionnels, organisation in situ du Salon de l’agriculture corse « Agri’sgiani ») ; représenté un acte de bonne gestion (prélèvement évité de 1,4 million d’euros sur le fond de roulement). L’intéressé s’est félicité qu’en soutenant l’installation de jeunes agriculteurs, notamment dans le domaine Casabianca avec le concours de l’Office foncier, la Chambre ait agi pour conserver ou développer la vocation agricole des territoires concernés.
Joseph Colombani a aussi rappelé que durant sa mandature avait été réalisé un important travail prospectif élaboration d’un « Projet agricole pour la Corse » dans le cadre de la préparation du projet de Loi d’Orientation Agricole dont l’examen et le vote ont été stoppés par la dissolution de l’Assemblée Nationale ; concertation et propositions en vue de la remise d’un projet de politique agricole prenant en compte une évolution institutionnelle vers l’autonomie, pour répondre à une demande formulée par le Conseil Exécutif de Corse.
Joseph Colombani veut encore aller de l’avant. Si sa liste l’emporte, il entend que la Chambre d'agriculture de région Corse oriente son action selon les priorités suivantes : un revenu décent pour chaque exploitant ; une production de qualité pour toutes les catégories de la population corse et non pas uniquement pour des clientèles aisées ou touristiques ; aller vers l’autosuffisance alimentaire et les circuits courts tout en soutenant les filières exportatrices ; des pratiques de production durables et écologiques ; des productions dans toutes les régions de l’île essentiellement à partir d’exploitations familiales ; demander une répartition claire des compétences entre les différents acteurs institutionnels, économiques et syndicaux de l’agriculture et une « feuille de route » pluriannuelle comportant des objectifs précis et chiffrés ; défendre une politique agricole spécifique adaptée au contexte insulaire, au besoin en demandant des dérogations auprès de l’Union Européenne. En conclusion, au vu de son bilan et de ses propositions, on peut considérer que Joseph Colombani préconise une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production .
Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et vouloir associer toutes les forces vives de la ruralité
Jean-Baptiste Arena défend une démarche moins globalisante et moins tournée vers un objectif de production visant à alimenter régulièrement le marché local. En effet, il préconise d’agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie. Les interventions lors du meeting qu’il a tenu avec ses colistiers à Corti étaient particulièrement signifiantes. Elles ont effet loué la pertinence d’agir à partir des filière. Le président de l'AOP Castagna Corsa, à mis en exergue que « la capacité de résilience » de sa filière avait permis d’endiguer les ravages du cynips. Une colistière a regretté que la filière Plantes aromatiques soit « peu organisée ».
Un colistier éleveur a appelé, concernant les filières animales, à la mise en place d’une commercialisation localement et à l'exportation, ainsi qu’à l'obtention d'appellations pour « valoriser le travail des bergers » selon un prix de leur labeur qui soit « digne ». Jean-Baptiste Arena a de son côté évoqué les difficultés prévisibles de la viticulture et de l’agrumiculture. Il semble bien qu’inciter à partir d’une politique globale, à l’augmentation de la production agricole, à son extension à l’ensemble du territoire insulaire et à l’autosuffisance alimentaire, n’est pas une priorité. L’objectif semble davantage être un renforcement des filières au niveau de la production et de la commercialisation, à partir de leur propre dynamique. Notable différence avec ce que propose Joseph Colombani.
Jean-Baptiste Arena paraît par ailleurs vouloir opter pour une démarche ne privilégiant pas la préconisation de grandes priorités portées par des acteurs institutionnels de l’agriculture. Il semble, outre ces institutionnels, vouloir mobiliser et associer toutes les forces vives de la ruralité. En effet, il affirme que la survie de l’agriculture est intimement liée à celle du peuple corse sur sa terre et que la sauver et la développer nécessitent une synergie comprenant toutes les institutions, les activités économiques et ce qui reste de population dans les villages. C’est donc plus autour d’un projet de revitalisation rurale que d’un projet de développement agricole qu’il entend mobiliser la Chambre d’agriculture s’il en conquiert la présidence, est c’est autour de cette vision qu’il souhaite agréger les concours des différentes institutions concernées (Collectivité de Corse, communes, intercommunalités, socioprofessionnels, autres chambres consulaires).
En revanche, l’approche des problématiques structurelles de Jean-Baptiste Arena, ne diffère guère de celle de Joseph Colombani. Quelques exemples, il juge prioritaire d’agir : pour faciliter l’accession au foncier afin de favoriser l’installation de jeunes agriculteur ; pour l’amélioration et l’extension de l’irrigation afin d’être en mesure de développer la production et de faire face au dérèglement climatique ; pour la prévention et l’action contre les fléaux sanitaires ou invasifs (fièvre catarrhale, peste porcine, xylella fastidiosa, cynips, fourmis, frelons asiatiques…) ; pour réduire les coûts liés du transport...
Une même volonté viscérale, de la complémentarité
Conduire essentiellement une démarche de développement agricole globalisante et institutionnelle, centrée sur l’accroissement de la production comme le préconise Joseph Colombani ; Agir essentiellement à partir des filières et de leur mise en synergie et vouloir associer toutes les forces vives de la ruralité, comme le souhaite Jean-Baptiste Arena, représentent effectivement deux approches différentes. Mais sont-elles vouées à rester antagoniques ? Cela n’est pas criant. En effet, les deux candidats à la présidence de la Chambre d'agriculture de région Corse, sont animés d’une même volonté viscérale : pérenniser et développer une agriculture au service de ses exploitants et d’une certaine idée de la Corse : la Corsica Nazione porteuse d’une identité et de valeurs spécifiques. Dans les démarches qu’ils se proposent de mener, tout est somme toute complémentaire : une démarche institutionnelle et une mise en synergie des forces vives de la ruralité peuvent se conjuguer ; une action globale d’accroissement de la production peut aller de pair avec le développement des filières. Enfin, on l’a vu précédemment, l’approche des problématiques structurelles de Jean-Baptiste Arena ne diffère guère de celle de Joseph Colombani. Et pourquoi ne pas l’écrire, l’expérience de Joseph Colombani et l’apport d’idées nouvelles par Jean-Baptiste Arena pourraient constituer un heureux mélange Considérant tout cela, on comprend d’ailleurs mieux que les deux candidats aient plusieurs fois indiqués être disposés à travailler ensemble quelle que soit l’issue du scrutin. Jean Baptiste Arena a même été particulièrement clair lors de son intervention à Corti : « Quels que soient les résultats, nous travaillerons ensemble, parce qu'il est hors de question de cliver l'agriculture corse. Il va falloir tous se retrouver, que ce soit entre syndicats, entre filières et avec des gens hors structures ».
La Rédaction
Le FLNC a dit la sienne…
Dans un communiqué de quatre pages, le FLNC a dit la sienne concernant la situation et les perspectives de l’agriculture corse, sans toutefois évoquer ni les élections à la Chambre d'agriculture de région Corse, ni le duel Joseph Colombani - Jean-Baptiste Arena. Rappelant l’intérêt que, depuis la création de leur organisation en 1976, ils portent à la défense de la terre et au sort de l’agriculture, les clandestins dressent un état des lieux pessimiste voire alarmant. Ils déplorent que le changement climatique affecte l’élevage du fait de sécheresses qui « causent un appauvrissement des sols et une fragilisation des cultures » et « permettent de moins en moins de produire correctement du fourrage pour l’alimentation des bêtes » ; et aussi du fait d’inondations, souvent automnales, qui « privent les éleveurs de zones entières de pâturage et les contraignent à devoir faire l’achat de nourriture pour le bétail ». Les clandestins ajoutent que la pénurie de nourriture pour le bétail contribue à accroître les difficultés des éleveurs car elle entraîne une hausse de leurs coûts alors que les prix de vente de leurs productions n’augmentent pas. Les clandestins dénoncent aussi l’inaction de l’État face aux fléaux sanitaires et invasifs. Concernant la fièvre catarrhale, ils soulignent : « La responsabilité de l’État français est totale. C’est lui qui a en charge l’état sanitaire à travers son organisme de la direction des services vétérinaires » Les clandestins s’inquiètent du sort d’autres filières : « Faut-il attendre que nos vergers soient ravagés, que nos espèces endémiques disparaissent ? Que notre arboriculture multiséculaire d’oliviers et autres espèces soient rayées de notre histoire sur l’autel de la législation européenne de libre circulation ? » Enfin, les clandestins dénoncent une « prédation foncière » qu’ils qualifient de « sans précédent » et « ceux qui investissent, Corses ou pas, en transformant notre secteur primaire en vaste terrain de jeu spéculatif, profitant des quelques productions qui s’avèrent être encore rémunératrices » et « ainsi compromettent l’avenir de l’agriculture ». Pour conclure, les clandestins affirment rejeter la vision « productiviste et mondialisée »
de l’agriculture.
Crédit photos : JDC, Chambre d'agriculture Corse, liste a l'iniziu, una terra