Scandola : le risque d'être mené en bateau
le risque d’être mené en bateau Il est un gouffre entre certains intérêts particuliers souhaitant exploiter touristiquement des sites naturels remarquables et la volonté d’en préserver optimalement la richesse écologique.
Scandula : le risque d’être mené en bateau Il est un gouffre entre certains intérêts particuliers souhaitant exploiter touristiquement des sites naturels remarquables et la volonté d’en préserver optimalement la richesse écologique.
« La Corse humiliée devant 47 pays ! ».
Ce titre polémique et le texte afférent ont précédé de quelques heures le traitement médiatique de la décision du Comité Permanent de la Convention de Berne de ne pas renouveler le Diplôme Européen des Espaces Protégés de la Réserve naturelle de Scandula, fait le buzz sur les réseaux sociaux et suscité de nombreux commentaires dont certains, qui ont visés les élus concernés, ont été des plus acerbes.
Puis sont venues les réactions desdits élus et aussi leurs tentatives d’éteindre l’incendie. Toutefois, malgré les explications données par ces derniers et l’affichage de leur volonté de réagir, la décision du Comité a représenté des pavés dans la mare de la majorité territoriale et celle d’un des principaux partenaires de celle-ci : Jacques Costa, le président du PNRC (Parc Naturel Régional de la Corse). Les remous provoqués par ces pavés ont été d’autant plus ressentis et remarqués que la personnalité marquante d’une des communes sur laquelle est située la Réserve, à savoir Osani, n’est autre que François Alfonsi, député européen Femu a Corsica et apparenté Europe Ecologie-Les Verts.
Le non-renouvellement n’a toutefois pas surpris grand monde car il était connu depuis des mois qu’un risque majeur existait. Il était en effet difficile de ne pas percevoir qu’une épée de Damoclès étaient en suspension au-dessus du Diplôme. Certains décideurs corses avaient exprimé leur mécontentement et leur indignation pour n’avoir pas été prévenus de la visite d’un expert ornithologue dépêché par le Comité Permanent de la Convention de Berne et formulés des critiques à l’encontre d’études scientifiques.
De plus, ces élus savaient très bien que les experts avaient constaté la dégradation de la situation environnementale sir le site de Scandula ainsi que le fait que plusieurs recommandations n’avaient pas été prises en compte depuis des années. La décision du Comité permanent du Conseil de l'Europe était donc plus que probable.
Image peu glorieuse de notre île et ses dirigeants.
Si qualifier d’humiliante cette décision a sans doute été excessif, celle-ci a pour le moins contribué à donner une image peu glorieuse de notre île et ses dirigeants. Surtout si l’on si l’on considère que cette décision est intervenue sous les regards des représentants des pays membres du Conseil de l'Europe. Surtout également si l’on prend en compte que seul un autre site a été sanctionné alors que 14 autres sites sur les 69 qui bénéficient du Diplôme Européen des Espaces Protégés, ont bénéficié des félicitations du jury. Le coup est donc rude.
D’autant que la Réserve de Scandula qui a été créée en 1975, est un fleuron des sites naturels corses, est inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO et est classée site Natura 2000. Mais le coup est justifié car, comme l’ont signalé et dénoncé depuis plusieurs années des médias et des associations, la Réserve de Scandula est menacée par l’afflux de bateaux de plaisance ou dédiés à l’excursion touristique dont les ancres détériorent les herbiers de posidonies, dont les bruit de moteur dérangent la faune et dont trop souvent les rejets polluent les eaux.
La Réserve a aussi été touchée par une pêche sauvage qui appauvrit les ressources halieutiques. Convient-il alors, comme beaucoup l’ont fait, d’impitoyablement clouer au pilori les élus concernés ? La réponse doit être mitigée car, s’ils n’ont pu éviter le non-renouvellement, ils n’ont pas été inactifs. François Alfonsi et François Sargentini ont sorti les dents pour le souligner.
François Alfonsi et François Sargentini toutes dents dehors
François Alfonsi a rappelé que l’été dernier, il avait adressé une lettre ouverte à la Secrétaire de la Convention de Berne au Conseil de l’Europe. Dans ce courrier, le député européen dénonçait le non-aboutissement de la procédure d’extension de la Réserve, une sur-fréquentation touristique incompatible avec la tranquillité et la préservation des espèces protégées, l’inaction de l’Etat pourtant en charge de la protection de la Réserve.
Par ailleurs, il proposait de resserrer le dispositif de gestion de la Réserve en le dotant d’un moyen de régulation (qui, dans le droit maritime français, fait totalement défaut), de limiter l’attribution de licences professionnelles sous condition d’engagement à de bonnes pratiques environnementales (proposition écartée pour des raisons d’ordre juridique par les représentants de l’Etat).
François Sargentini, président de l’Office de l’environnement de la Corse, a de son côté défendu son action : envoi au Comité Permanent de la Convention de Berne d’un dossier détaillant ce qui avait été réalisé durant les deux dernières années ; élaboration avec le PRNC d’un comptage des passagers aux embarcadères ; programmation d’une protection des nids ; incitation au vote par l’Assemblée de Corse d’un rapport prévoyant l’extension de la Réserve.
Par ailleurs, devant les maires des communes concernées et le président du PNRC, François Sargentini a présenté un projet d’extension de la Réserve et insisté sur l’importance de mieux maîtriser le flux de touristes et de mieux protéger les espèces menacées. Tous les participants ont donné leur accord. Par ailleurs, dans la foulée, une concertation devrait être proposée aux bateliers et aux pêcheurs.
Des règles précises et non interprétables doivent être formulées
Ce qui été défendu ou préconisé par François Alfonsi et François Sargentini est indéniablement méritoire. Mais il reste certain que demeure et perdurera, à Scandula et ailleurs, un problème paraissant insoluble.
En effet, il est un gouffre entre les intérêts particuliers des uns qui souhaitent exploiter touristiquement des sites naturels et la volonté des autres d ’en préserver optimalement la richesse écologique.
Trouver un compromis équilibré entre l’exploitation commerciale et la préservation de la ressource naturelle et de la biodiversité, représente une entreprise très difficile. A Scandula, il semble toutefois que la préservation doive être érigée en priorité absolue. Il apparaît aussi que des règles contraignantes et non interprétables s’imposent.
Il n’est pas d’alternative car, ne pas agir ainsi, expose à se faire mener en bateau par des opérateurs qui ont davantage l’ambition de faire de l’argent rapidement que de protéger la nidification des balbuzards.
Pierre Corsi
« La Corse humiliée devant 47 pays ! ».
Ce titre polémique et le texte afférent ont précédé de quelques heures le traitement médiatique de la décision du Comité Permanent de la Convention de Berne de ne pas renouveler le Diplôme Européen des Espaces Protégés de la Réserve naturelle de Scandula, fait le buzz sur les réseaux sociaux et suscité de nombreux commentaires dont certains, qui ont visés les élus concernés, ont été des plus acerbes.
Puis sont venues les réactions desdits élus et aussi leurs tentatives d’éteindre l’incendie. Toutefois, malgré les explications données par ces derniers et l’affichage de leur volonté de réagir, la décision du Comité a représenté des pavés dans la mare de la majorité territoriale et celle d’un des principaux partenaires de celle-ci : Jacques Costa, le président du PNRC (Parc Naturel Régional de la Corse). Les remous provoqués par ces pavés ont été d’autant plus ressentis et remarqués que la personnalité marquante d’une des communes sur laquelle est située la Réserve, à savoir Osani, n’est autre que François Alfonsi, député européen Femu a Corsica et apparenté Europe Ecologie-Les Verts.
Le non-renouvellement n’a toutefois pas surpris grand monde car il était connu depuis des mois qu’un risque majeur existait. Il était en effet difficile de ne pas percevoir qu’une épée de Damoclès étaient en suspension au-dessus du Diplôme. Certains décideurs corses avaient exprimé leur mécontentement et leur indignation pour n’avoir pas été prévenus de la visite d’un expert ornithologue dépêché par le Comité Permanent de la Convention de Berne et formulés des critiques à l’encontre d’études scientifiques.
De plus, ces élus savaient très bien que les experts avaient constaté la dégradation de la situation environnementale sir le site de Scandula ainsi que le fait que plusieurs recommandations n’avaient pas été prises en compte depuis des années. La décision du Comité permanent du Conseil de l'Europe était donc plus que probable.
Image peu glorieuse de notre île et ses dirigeants.
Si qualifier d’humiliante cette décision a sans doute été excessif, celle-ci a pour le moins contribué à donner une image peu glorieuse de notre île et ses dirigeants. Surtout si l’on si l’on considère que cette décision est intervenue sous les regards des représentants des pays membres du Conseil de l'Europe. Surtout également si l’on prend en compte que seul un autre site a été sanctionné alors que 14 autres sites sur les 69 qui bénéficient du Diplôme Européen des Espaces Protégés, ont bénéficié des félicitations du jury. Le coup est donc rude.
D’autant que la Réserve de Scandula qui a été créée en 1975, est un fleuron des sites naturels corses, est inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO et est classée site Natura 2000. Mais le coup est justifié car, comme l’ont signalé et dénoncé depuis plusieurs années des médias et des associations, la Réserve de Scandula est menacée par l’afflux de bateaux de plaisance ou dédiés à l’excursion touristique dont les ancres détériorent les herbiers de posidonies, dont les bruit de moteur dérangent la faune et dont trop souvent les rejets polluent les eaux.
La Réserve a aussi été touchée par une pêche sauvage qui appauvrit les ressources halieutiques. Convient-il alors, comme beaucoup l’ont fait, d’impitoyablement clouer au pilori les élus concernés ? La réponse doit être mitigée car, s’ils n’ont pu éviter le non-renouvellement, ils n’ont pas été inactifs. François Alfonsi et François Sargentini ont sorti les dents pour le souligner.
François Alfonsi et François Sargentini toutes dents dehors
François Alfonsi a rappelé que l’été dernier, il avait adressé une lettre ouverte à la Secrétaire de la Convention de Berne au Conseil de l’Europe. Dans ce courrier, le député européen dénonçait le non-aboutissement de la procédure d’extension de la Réserve, une sur-fréquentation touristique incompatible avec la tranquillité et la préservation des espèces protégées, l’inaction de l’Etat pourtant en charge de la protection de la Réserve.
Par ailleurs, il proposait de resserrer le dispositif de gestion de la Réserve en le dotant d’un moyen de régulation (qui, dans le droit maritime français, fait totalement défaut), de limiter l’attribution de licences professionnelles sous condition d’engagement à de bonnes pratiques environnementales (proposition écartée pour des raisons d’ordre juridique par les représentants de l’Etat).
François Sargentini, président de l’Office de l’environnement de la Corse, a de son côté défendu son action : envoi au Comité Permanent de la Convention de Berne d’un dossier détaillant ce qui avait été réalisé durant les deux dernières années ; élaboration avec le PRNC d’un comptage des passagers aux embarcadères ; programmation d’une protection des nids ; incitation au vote par l’Assemblée de Corse d’un rapport prévoyant l’extension de la Réserve.
Par ailleurs, devant les maires des communes concernées et le président du PNRC, François Sargentini a présenté un projet d’extension de la Réserve et insisté sur l’importance de mieux maîtriser le flux de touristes et de mieux protéger les espèces menacées. Tous les participants ont donné leur accord. Par ailleurs, dans la foulée, une concertation devrait être proposée aux bateliers et aux pêcheurs.
Des règles précises et non interprétables doivent être formulées
Ce qui été défendu ou préconisé par François Alfonsi et François Sargentini est indéniablement méritoire. Mais il reste certain que demeure et perdurera, à Scandula et ailleurs, un problème paraissant insoluble.
En effet, il est un gouffre entre les intérêts particuliers des uns qui souhaitent exploiter touristiquement des sites naturels et la volonté des autres d ’en préserver optimalement la richesse écologique.
Trouver un compromis équilibré entre l’exploitation commerciale et la préservation de la ressource naturelle et de la biodiversité, représente une entreprise très difficile. A Scandula, il semble toutefois que la préservation doive être érigée en priorité absolue. Il apparaît aussi que des règles contraignantes et non interprétables s’imposent.
Il n’est pas d’alternative car, ne pas agir ainsi, expose à se faire mener en bateau par des opérateurs qui ont davantage l’ambition de faire de l’argent rapidement que de protéger la nidification des balbuzards.
Pierre Corsi