Barbara Pirina : La passion peinture
Peindre c’est ce qu’elle a toujours voulu faire du plus loin qu’elle se souvienne. Mais les aléas de la vie ont des années durant contrecarré cette passion. Enfin, est venu le moment de reprendre pinceaux, toiles, tubes de couleur…
Peindre c’est ce qu’elle a toujours voulu faire du plus loin qu’elle se souvienne. Mais les aléas de la vie ont des années durant contrecarré cette passion. Enfin, est venu le moment de reprendre pinceaux, toiles, tubes de couleur…
La Galerie Noir et Blanc de Bastia nous propose la première grande exposition de Barbara Pirina.
L’univers de Barbara Pirina chante dans des cercles magiques aux jaunes vif ou tendres, aux ocres chauds ou atténués, aux gris clairs ou amarante. Le cercle symbole solaire ou métaphore de la perfection. L’artiste semble ressentir une véritable et troublante fascination pour ce disque mythique.
La main de la plasticienne joue aussi avec les lignes verticales et horizontales découpant des allegros de triangles et autres formes géométriques à lire tel des puzzles du vivant.
Dans ses toiles Barbra Pirina réserve une place à part à l’arbre. Grand ordonnateur de l’harmonie, l’arbre, autant en majesté qu’en sveltesse déploie un feuillage stylisé en aplats verts ombreux ou Véronèse, presqu’argenté ou virant au kaki. Même puissant le tronc de l’arbre sculpte une danse qui pour être gracieuse et fragile, exprime, avec force, vitalité jamais altérée et sérénité retrouvée. Il y a de l’assurance et de la fragilité dans la peinture de la plasticienne. Elle suggère un processus de déconstruction d’un monde suivi subtilement et avec un certain entêtement, par une reconstruction plus en phase avec une manière de voir de l’artiste.
Elle nous offre ce qui ressemble à une vision très apaisée de l’environnement où la nature aurait repris tous ses droits. Des droits trop piétinés. Trop saccagés souvent… Est-ce si sûr cependant ? Toute œuvre étant créée pour interroger il s’agit peut-être chez Barbara Pirina de tirer un signal d’alarme en nous invitant à habiter avec sagesse et ménagements notre planète ! Pourquoi pas ? Quoiqu’il en soit il y a chez la plasticienne un côté terrien très enraciné et un désir de spiritualité.
L’artiste expose également dans la galerie bastiaise une série de travaux très différents puisqu’ils concernent des insectes communs à la Corse : fourmi, scarabée et cet étonnant papillon aux ailes délicates et colorées appelés, porte-queue. Des petits formats illustration de la finesse de son dessein et de son sens du réalisme. Elle explore d’ailleurs bien d’autres pistes que celles qui se découvrent à nous avec cette exposition.
Il est bon d’insister : la Galerie Noir et Blanc de Bastia dont les locaux ont été transférés place du Marché est un lieu rare qui mérite le déplacement. Au sous-sol, dans une magnifique salle voûtée, on peut admirer des artistes membres de l’association, « En Couleurs », pilier de la galerie ainsi que des œuvres de la Fondation Umani
Pour une vue plus globale du travail de l’artiste on peut consulter son site Instagram : bp.painti
Pourquoi avoir tarder à vous lancer dans la peinture ?
J’ai toujours été passionnée par les arts plastiques. J’ai suivi un cursus en ce sens à l’université de Corse puis je me suis formée à Paris en décoration d’intérieur. De retour à Porto-Vecchio j’ai dû mettre mes aspirations en parenthèses. Il fallait que j’aide ma mère malade. Puis il y a eu les enfants qui maintenant ont quitté le nid… La peinture elle est en moi depuis si longtemps… Pour reprendre les pinceaux je devais avoir du temps pour moi, et être bien avec moi-même. Le confinement a eu ça de bon que j’ai pu me remettre à peindre !
Comment a-t-on réagi autour de vous face à vos toiles ?
L’accueil a été très positif. Des amis, des gens, que je ne connaissais pas, ont accroché et j’ai réalisé des ventes. On m’a conseillé d’avoir un site sur Instagram et j’ai pu toucher plus de monde… Les réseaux sociaux ça sert finalement !
Quels peintres vous ont-ils inspiré ? Influencé ?
Indiscutablement Sonia Delaunay. Mais je suis curieuse de tous les styles… même si j’ai des préférences. Cela explique sans doute que j’ai du mal à définir ma propre façon de peindre. Ce que je refuse absolument c’est d’enfermer mon travail dans un genre. Sonia Delaunay me touche beaucoup ce qui ne m’empêche pas d’aimer Hokusai car chez lui j’adore le côté épuré, stylisé.
« Les couleurs c’est du bonheur ! »
Barbara Pirina
Comment procédez-vous pour peindre ?
Je trace des formes géométriques puis je dessine dessus. A ce stade je laisse aller le mouvement de mes doigts, en ne pensant à rien. En vidant ma tête. Parfois un premier jet suffit pour achever une toile. Parfois je ne cesse d’y revenir. Il peut m’arriver ainsi de me relever la nuit pour compléter, préciser le travail. Je peux aussi ne pas prendre un pinceau pendant une semaine ou entreprendre plusieurs œuvres à la fois.
Dans votre exposition il y a des arbres pratiquement dans tous vos tableaux. C’est une obsession ?
C’est simple : j’adore les pins parasols. Ils sont élégants et majestueux. C’est l’arbre par excellence du sud de l’île où je vis. C’est l’arbre de mon enfance : on ramassait les pignons pour les manger. On récoltait les pommes de pins pour le feu de bois. On faisait des colliers avec des épines de l’arbre. J’aime également les oliviers mais leurs feuillages cadrent moins avec mes toiles. Les plantes grasses par leurs nuances de vert et de bleu m’attirent aussi… La montagne. La mer. La plaine… Quelle chance de vivre en Corse !
Vos toiles sont très colorées. Quelles sont les couleurs avec lesquelles vous préférez travailler ?
Les verts y compris les kakis. Les ocres du plus clair au plus foncé. Toutes les gammes de bleu. Les couleurs c’est du bonheur. Quand je les mélange cela m’apporte énormément de joie. En procédant toujours par tâtonnements peut surgir, sans que je m’y attende, une teinte magnifique que je dois utiliser sur le champ, car le lendemain je suis souvent incapable de la retrouver. Il faut savoir saisir l’opportunité.
Consacrez-vous beaucoup de temps au dessin ?
Une fois que je tiens mon sujet, la réalisation du dessin est rapide. Je précise que je pars d’une photo. Fréquemment c’est la luminosité du cliché qui est déclencheur chez moi.
Vous êtes adepte des formes géométriques. Mais pourquoi la permanence du cercle ?
C’est l’influence de Sonia Delaunay je pense ! Et puis le cercle c’est le soleil. La chaleur. Le signe astrologique du Lion et je suis du Lion. Les cercles chez moi peuvent se décliner au mitan de la journée lorsque l’astre solaire brille le plus intensément ou au déclin du jour par temps gris. Pourquoi le cercle ? Pourquoi le soleil ?... Faut-il une raison à tout ? Pas forcément à mon avis ! Le soleil, l’arbre sont en moi, voilà tout. La peinture j’en ai si longtemps rêvé que je ne veux pas me brimer et que je souhaite laisser libre cours à mon ressenti.
Quels sont vos matières, vos supports ?
Je peins à l’acrylique parce qu’il n’y a pas de problème de séchage. La peinture à l’huile me tenterait mais il faudrait que j’en maîtrise parfaitement la technique, je devrais donc m’y mettre. Petit inconvénient l’huile implique le recours à la térébenthine, or cette odeur me dérange. Pour ce qui est du support j’utilise la toile. Maintenant je suis très attirée par les collages, les superpositions de couches, les effets de matières, d’épaisseurs. Dans ce domaine je dois expérimenter et me perfectionner.
Seriez-vous tenté par l’abstraction ?
Je m’y suis déjà essayer dans un tableau que j’ai appelé, « Black and White » composé en noir et blanc avec stucco pour suggérer un effet de relief… Les formes géométriques, cercles, lignes, que l’on retrouve dans mon travail m’approchent également beaucoup d’une forme l’abstraction.
Prêtez-vous un soin particulier aux titres de vos tableaux ?
J’essaie… Je constate que ce n’est pas mon point fort ! Exemples : j’intitule une toile avec des poissons, « Des ronds dans l’eau », un autre avec des chaises, « B32 », de leurs références dans une catalogue. Difficile pour moi l’exercice des titres alors que j’y suis très sensible chez les autres. En outre j’hésite encore à signer… par crainte de déséquilibrer l’harmonie de la composition d’une œuvre…
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Propos recueillis par M.A-P
Nota bene : Dans le titre de l’article sur le Bastia Blue Band et Dumè Ferrari il fallait lire instrumentiste au lieu d’instrument !