Lionel Mortini, Président de l'ODARC
Il faudra se relever de cette crise et créer des conditions pour faire changer les choses
Particulièrement touchée comme l’ensemble des secteurs de l’île, l’agriculture insulaire paye un lourd tribut avec la crise sanitaire actuelle. Une crise qui vient s’ajouter aux problèmes quotidiens rencontrés par la profession. Lionel Mortini, président de l’ODARC fait pour nos lecteurs, le point sur la situation. Il évoque, également, les dernières élections municipales à Isula Rossa et les nouvelles perspectives pour l’intercommunalité dont il est le président…
Quelle est, actuellement, la situation de l’agriculture corse face à la crise du Covid ?
On a tous souffert comme de nombreuses régions liées à l’agriculture. Il n’y a pas eu de miracle en Corse même si l’Odarc et la Collectivité de Corse se sont efforcés de rester présents auprès de l’ensemble des filières. Le pire est sans doute encore devant nous malheureusement.
Pourquoi ?
Les effets secondaires de la crise sont à craindre à partir de l’automne. Avec la baisse du pouvoir d’achat, les gens vont surtout rechercher des produits bon marché même si c’est au détriment de la qualité. Nous allons attendre l’hiver et notamment la situation de filières telles que la viticulture et les agrumes. L’agriculture représente, en Corse, 300 millions d’euros dont 80 % dédiés au végétal. Nous serons forcément face à des difficultés dans l’ensemble des filières même si certaines seront plus touchées que d’autres. Pour autant nous n’allons pas baisser les bras ! L’Office restera présent en s’efforçant de maintenir tout le monde hors de l’eau. Mais il est certain que cette crise nous interpelle, notamment sur l’importance de revoir nos modèles et de développer les circuits courts.
Qu’en est-il des foires dont la quasi-totalité est annulée ?
Avec la crise et la nécessité des gestes barrière et du maintien de la distanciation sociale, nous n’avons guère eu le choix. Ces foires sont la vitrine importante de l’agriculture insulaire et de son savoir-faire. Le travail accompli, depuis des années, par « A strada di i sensi », avec le concours de la Collectivité de Corse est considérable. C’est l’exemple à suivre. Notre mission va consister, à court terme, à trouver des solutions pour maintenir ce tissu économique intact. Il y aura de nombreux stocks d’invendus, d’où un préjudice important pour les producteurs. Dans cette crise nous avons aussi su faire preuve de solidarité à travers des dons aux associations caritatives (Croix Rouge Restos du Cœur…)
Quelle politique comptez-vous mettre en place pour lutter contre la crise ?
Nous avons pris des mesures d’urgence : collecte de lait des fermiers par laiterie, compensation de lait collecté, rachat d’agneaux et cabris, rachat de veaux et de fromage pour la banque alimentaire et autres associations caritatives, partenariat GMS et opération Jeunes bovins de Corse, gratuité des frais d’abattage et de transport des carcasses en avril, mai et juin, campagne de communication et de promotion des produits corses et des circuits courts, aide à l’achat de cuverie pour la filière viticole, création d’un dispositif de rachat en vrac de vins de caves particulières par les coopératives, dispositifs d’accompagnement financier, soutien aux propriétaires de subéraies. L’objectif, à travers ces mesures, consiste à maintenir un certain cap.
« Le monde rural est en situation de mort clinique »
Et d’une manière générale ?
J’ai été élu pour changer les choses et c’est ce que nous nous efforçons de faire au sein du Conseil Exécutif de Corse. Au-delà de la politique, nous comptons amener certaines valeurs et mettre en exergue la notion de travail et de savoir-faire. L’idéal, dans un premier temps, sera d’avoir une seule Chambre d’Agriculture sur tout le territoire insulaire. Nous sommes fiers de faire ce métier. Nous devons réfléchir à une utilisation différente de l’argent public, il ne sera peut-être pas toujours là. On songe, par ailleurs, à la mise en place de formations plus pointues. Il faut aussi aider le monde rural et cela passe aussi par le maintien des services publics.
Faut-il repenser les modèles économiques ?
Une chose est certaine, le monde rural est en situation de mort clinique, les filières sont en danger et les nombreux changements climatiques n’arrangent pas les choses. Il faudra certainement s’adapter et repenser notamment les pratiques d’élevage. Ce métier est une passion, il est peu rémunéré, ce n’est pas un métier où l’on croit gagner de l’argent sans travailler. Pour ce qui est du modèle économique on met beaucoup de choses derrière cette terminologie. L’Odarc, qui est sous tutelle de la CdC, devra certainement s’adapter en étant moins dans l’administratif, plus sur le terrain plus dynamique et dans les projets. La profession doit être représentée et tout le monde doit se retrouver autour d’un nouveau modèle. On ne va pas tout révolutionner d’un coup de baguette magique, il faudra faire des choix politiques et continuer dans la voie que nous nous sommes fixés depuis 2015.
Quelles sont les filières les plus en difficulté ?
Tout dépend des microrégions. Les filières telles que l’élevage ou l’apiculture connaissent des difficultés. Mais cela n’est pas uniquement dû à la crise sanitaire. Comme je l’ai mentionné plus haut, le changement climatique constitue, également, un préjudice important. C’est la raison pour laquelle nous devons revoir les circuits de production. Un changement s’impose mais il implique que les Corses nous maintiennent leur confiance de manière à poursuivre le travail accompli depuis cinq ans. On a su démontrer que l’on ne lâcherait rien ! Mais l’Etat et Bruxelles doivent comprendre la spécificité de la Corse en matière d’agriculture et le pastoralisme ancestral qui lui est inhérent et que nous souhaitons maintenir. Les aides de la PAC sont, par exemple dérisoires en Corse par rapport à d’autres régions.
Qu’adviendra-t-il si la crise venait à subsister ?
On peut, effectivement, imaginer qu’elle continue, les indicateurs semblent aller malheureusement dans ce sens. Nous avons mis en place une cellule de crise à l’Odarc et nous réfléchissons à cette éventualité. Il est certain que si un agriculteur ne parvient pas à vendre ses produits, ce sera un ravage économique. Il faudra se relever de cette crise et créer les conditions pour faire changer les choses. Nous ferons un point à la rentrée en veillant à être le plus efficace possible, y compris aux côtés des services de l’Etat.
D’un point de vue électoral, quelle analyse faites-vous de la victoire d’Angèle Bastiani aux dernières élections municipales à Isula Rossa ?
C’est une excellente chose pour elle, son équipe et la ville. Isula Rossa va rentrer dans une toute autre dynamique. Cela va nécessairement nous faciliter la tâche au niveau de l’intercommunalité. La majorité municipale de la ville y est positionné en force. Vingt communes, sur les vingt-deux que compte le territoire sont parties prenantes de nos projets, cela représente 90%. Nous allons travailler dans de bonnes conditions.
Quelles perspectives justement pour l’intercommunalité ?
Nous allons développer d’importants projets en veillant à harmoniser l’ensemble autour d’un équilibre territorial, en créant de l’emploi et en travaillant au développement durable. Il faut prendre conscience que l’on ne doit plus polluer la terre. Les choses avancent, c’est un territoire extrêmement actif…
Quelle est, actuellement, la situation de l’agriculture corse face à la crise du Covid ?
On a tous souffert comme de nombreuses régions liées à l’agriculture. Il n’y a pas eu de miracle en Corse même si l’Odarc et la Collectivité de Corse se sont efforcés de rester présents auprès de l’ensemble des filières. Le pire est sans doute encore devant nous malheureusement.
Pourquoi ?
Les effets secondaires de la crise sont à craindre à partir de l’automne. Avec la baisse du pouvoir d’achat, les gens vont surtout rechercher des produits bon marché même si c’est au détriment de la qualité. Nous allons attendre l’hiver et notamment la situation de filières telles que la viticulture et les agrumes. L’agriculture représente, en Corse, 300 millions d’euros dont 80 % dédiés au végétal. Nous serons forcément face à des difficultés dans l’ensemble des filières même si certaines seront plus touchées que d’autres. Pour autant nous n’allons pas baisser les bras ! L’Office restera présent en s’efforçant de maintenir tout le monde hors de l’eau. Mais il est certain que cette crise nous interpelle, notamment sur l’importance de revoir nos modèles et de développer les circuits courts.
Qu’en est-il des foires dont la quasi-totalité est annulée ?
Avec la crise et la nécessité des gestes barrière et du maintien de la distanciation sociale, nous n’avons guère eu le choix. Ces foires sont la vitrine importante de l’agriculture insulaire et de son savoir-faire. Le travail accompli, depuis des années, par « A strada di i sensi », avec le concours de la Collectivité de Corse est considérable. C’est l’exemple à suivre. Notre mission va consister, à court terme, à trouver des solutions pour maintenir ce tissu économique intact. Il y aura de nombreux stocks d’invendus, d’où un préjudice important pour les producteurs. Dans cette crise nous avons aussi su faire preuve de solidarité à travers des dons aux associations caritatives (Croix Rouge Restos du Cœur…)
Quelle politique comptez-vous mettre en place pour lutter contre la crise ?
Nous avons pris des mesures d’urgence : collecte de lait des fermiers par laiterie, compensation de lait collecté, rachat d’agneaux et cabris, rachat de veaux et de fromage pour la banque alimentaire et autres associations caritatives, partenariat GMS et opération Jeunes bovins de Corse, gratuité des frais d’abattage et de transport des carcasses en avril, mai et juin, campagne de communication et de promotion des produits corses et des circuits courts, aide à l’achat de cuverie pour la filière viticole, création d’un dispositif de rachat en vrac de vins de caves particulières par les coopératives, dispositifs d’accompagnement financier, soutien aux propriétaires de subéraies. L’objectif, à travers ces mesures, consiste à maintenir un certain cap.
« Le monde rural est en situation de mort clinique »
Et d’une manière générale ?
J’ai été élu pour changer les choses et c’est ce que nous nous efforçons de faire au sein du Conseil Exécutif de Corse. Au-delà de la politique, nous comptons amener certaines valeurs et mettre en exergue la notion de travail et de savoir-faire. L’idéal, dans un premier temps, sera d’avoir une seule Chambre d’Agriculture sur tout le territoire insulaire. Nous sommes fiers de faire ce métier. Nous devons réfléchir à une utilisation différente de l’argent public, il ne sera peut-être pas toujours là. On songe, par ailleurs, à la mise en place de formations plus pointues. Il faut aussi aider le monde rural et cela passe aussi par le maintien des services publics.
Faut-il repenser les modèles économiques ?
Une chose est certaine, le monde rural est en situation de mort clinique, les filières sont en danger et les nombreux changements climatiques n’arrangent pas les choses. Il faudra certainement s’adapter et repenser notamment les pratiques d’élevage. Ce métier est une passion, il est peu rémunéré, ce n’est pas un métier où l’on croit gagner de l’argent sans travailler. Pour ce qui est du modèle économique on met beaucoup de choses derrière cette terminologie. L’Odarc, qui est sous tutelle de la CdC, devra certainement s’adapter en étant moins dans l’administratif, plus sur le terrain plus dynamique et dans les projets. La profession doit être représentée et tout le monde doit se retrouver autour d’un nouveau modèle. On ne va pas tout révolutionner d’un coup de baguette magique, il faudra faire des choix politiques et continuer dans la voie que nous nous sommes fixés depuis 2015.
Quelles sont les filières les plus en difficulté ?
Tout dépend des microrégions. Les filières telles que l’élevage ou l’apiculture connaissent des difficultés. Mais cela n’est pas uniquement dû à la crise sanitaire. Comme je l’ai mentionné plus haut, le changement climatique constitue, également, un préjudice important. C’est la raison pour laquelle nous devons revoir les circuits de production. Un changement s’impose mais il implique que les Corses nous maintiennent leur confiance de manière à poursuivre le travail accompli depuis cinq ans. On a su démontrer que l’on ne lâcherait rien ! Mais l’Etat et Bruxelles doivent comprendre la spécificité de la Corse en matière d’agriculture et le pastoralisme ancestral qui lui est inhérent et que nous souhaitons maintenir. Les aides de la PAC sont, par exemple dérisoires en Corse par rapport à d’autres régions.
Qu’adviendra-t-il si la crise venait à subsister ?
On peut, effectivement, imaginer qu’elle continue, les indicateurs semblent aller malheureusement dans ce sens. Nous avons mis en place une cellule de crise à l’Odarc et nous réfléchissons à cette éventualité. Il est certain que si un agriculteur ne parvient pas à vendre ses produits, ce sera un ravage économique. Il faudra se relever de cette crise et créer les conditions pour faire changer les choses. Nous ferons un point à la rentrée en veillant à être le plus efficace possible, y compris aux côtés des services de l’Etat.
D’un point de vue électoral, quelle analyse faites-vous de la victoire d’Angèle Bastiani aux dernières élections municipales à Isula Rossa ?
C’est une excellente chose pour elle, son équipe et la ville. Isula Rossa va rentrer dans une toute autre dynamique. Cela va nécessairement nous faciliter la tâche au niveau de l’intercommunalité. La majorité municipale de la ville y est positionné en force. Vingt communes, sur les vingt-deux que compte le territoire sont parties prenantes de nos projets, cela représente 90%. Nous allons travailler dans de bonnes conditions.
Quelles perspectives justement pour l’intercommunalité ?
Nous allons développer d’importants projets en veillant à harmoniser l’ensemble autour d’un équilibre territorial, en créant de l’emploi et en travaillant au développement durable. Il faut prendre conscience que l’on ne doit plus polluer la terre. Les choses avancent, c’est un territoire extrêmement actif…