Sondage Ipsos Sopra / Steria : le match n'est pas plié
L'électorat corse est désormais considéré comme n'étant plus en capacité de se battre pour arracher le droit à se construire un destin original.
Sondage Ipsos Sopra / Steria : le match n'est pas plié
A partir des questions posées et des réponses obtenues concernant les préoccupations majeures et les attentes prioritaires, l’enquête a fait émerger une réalité : l’électorat corse est désormais considéré comme n’étant plus en capacité de se battre pour arracher le droit à se construire un destin original.
Sans remettre en cause la sincérité ou l’expertise de l’institut Ipsos Sopra / Steria, il convient de mettre en situation l’enquête réalisée par cet institut pour France 3 Corse Via Stella portant sur le premier tour des élections territoriale, et plus particulièrement pour ce qui concerne le volet Intentions de vote. L’état des forces annoncé est celui du début du mois de juin alors qu’aucun débat entre les têtes de liste n’avait eu lieu.
La marge d’erreur de l’enquête est certainement supérieure à 2,5% pour plusieurs raisons : le nombre de personnes interrogées a été inférieur à 1000 ; de nombreux électeurs ne résident pas à l’année dans la commune où ils sont inscrits ; l’incidence du vote par procuration et du vote des résidents secondaires est difficilement évaluable ; l’influence des maires reste forte dans les petites communes ; la proximité incite à la dissimulation ou au non choix quand on est interrogé ; seuls 56% des sondés ont assuré être certains de leur choix et affirmé qu'ils ne changeront pas d'avis (de plus en plus d’électeurs ne fixent leur choix que durant les derniers jours voire les dernières heures précédant leur vote. L’enquête a néanmoins apporté des indications importantes.
Ce que suggèrent les intentions de vote
Il est évident que la première place au soir du premier tour et la victoire à l’issue du second se joueront entre Gilles Simeoni et Laurent Marcangeli respectivement crédités de 25% et 23%. Ce qui est d’ailleurs conforté par le fait que l’image de Gilles Simeoni suscite 71% d'opinions favorables devant celle de Laurent Marcangeli (57%). Il se dessine que ni Gilles Simeoni dont certains partisans disaient qu’il était en mesure de « plier le match » dès le premier tour, ni Laurent Marcangeli qui peine àmobiliser l’électorat de droite (en décembre 2017, Jean-Martin Mondoloni et Valérie Bozzi avaient à eux deux totalisé plus de 28% des suffrages exprimés au premier tour), ne seront en mesure d’obtenir seuls une majorité absolue en sièges au second tour. II apparaît que pour gagner Laurent Marcangeli devra impérativement rendre crédible qu’il peut faire mieux et plus vite que la majorité nationaliste sortante car le bilan de celle-ci est favorablement jugé (8% des personnes interrogées le jugent excellent, 56 % bon). Jean-Christophe Angelini crédité de 11% (un peu en deçà de ce qu’il espère) et Jean Charles Orsucci pour peu qu’il réalise dans les urnes les 8% que le sondage lui promet (alors que beaucoup disaient que les 7% du maintien au second tour seraient inatteignables par sa liste) seront en position d’être des alliés à la fois précieux et exigeants pour un prétendant à la victoire finale.
Il semble que la mouvance se réclamant du nationalisme soit aujourd’hui répartie en deux parties sensiblement égales (pesant respectivement 25%) : celle qui adhère à la vision siméoniste d’un dépassement total des enjeux nationalistes pour rassembler un maximum d’électrices et d’électeurs ; celle qui comprenant le Partitu di a Nazione Corsa, Corsica Libera et Core in Fronte, souhaite élargir l’audience nationaliste sans renoncer à évoquer des fondamentaux issus de cinquante ans de luttes sur tous les terrains.
On peut se dire qu’étant respectivement situés à un niveau de 7%, Corsica Libera et Core in Fronte peuvent à la fois nourrir l’espoir d’un maintien au second tour ou craindre d’être éliminés. Il doit être acté la marginalisation de la gauche traditionnelle, celle-ci n’étant plus présente qu’avec une liste communiste qui peinera à dépasser les 5%.
Enfin, il faut souligner l’irruption des écologistes qui, s’ils réalisent le résultat de l’enquête les situant au niveau 8%, seront des acteurs avec lesquels il faudra compter durant toute la future mandature.
Place au terre-à-terre
Outre des indications portant sur ce que pourraient être les résultats du premier tour et sur l’état du champ politique, l’enquête a permis d’identifier ce que sont les principales préoccupations des électeurs. Cependant, il importe tout d’abord de constater que les thématiques Evolution institutionnelles et Revendications identitaires ou spécifiques (autonomie, coofficialité de la langue corse, statut de résident corse, statut fiscal dérogatoire….) sont absentes des préoccupations des personnes interrogées. Qu’une question n’est semble-t-il pas été été posée concernant ces thématiques n’est pas anodin. Cela révèle que les auteurs de l’enquête après avoir analysé le bilan de la majorité nationaliste sortante, découvert les propositions des principales listes et pris le pouls de l’opinion n’ont pas jugé qu’elles représentaient des préoccupations majeures de la population corse.
Il apparaît donc que les personnes sondées sont d’abord préoccupées par ce que seront leurs conditions de vie au quotidien. En effet, le pouvoir d'achat arrive en tête de leurs préoccupations devant les transports, le système de santé, le chômage et l'environnement. Il est aussi révélé que ces personnes sont dans l’attente que, quelle que soit la future majorité territoriale, il soit rapidement apporté des solutions concrètes dans des domaines influant eux-aussi directement sur leur quotidien : le traitement des déchets, l'aménagement du territoire au profit de la ruralité, l’offre de formation, les soins de proximité. A partir des questions posées et des réponses obtenues concernant les préoccupations majeures et les attentes prioritaires, l’enquête a fait émerger une réalité : l’électorat corse est désormais considéré comme n’étant plus en capacité de s’extraire du terre-à-terre et de se batte pour arracher le droit à se construire un destin original.
Sommes-nous sommes-nous en train de devenir une population ?
Pierre Corsi
A partir des questions posées et des réponses obtenues concernant les préoccupations majeures et les attentes prioritaires, l’enquête a fait émerger une réalité : l’électorat corse est désormais considéré comme n’étant plus en capacité de se battre pour arracher le droit à se construire un destin original.
Sans remettre en cause la sincérité ou l’expertise de l’institut Ipsos Sopra / Steria, il convient de mettre en situation l’enquête réalisée par cet institut pour France 3 Corse Via Stella portant sur le premier tour des élections territoriale, et plus particulièrement pour ce qui concerne le volet Intentions de vote. L’état des forces annoncé est celui du début du mois de juin alors qu’aucun débat entre les têtes de liste n’avait eu lieu.
La marge d’erreur de l’enquête est certainement supérieure à 2,5% pour plusieurs raisons : le nombre de personnes interrogées a été inférieur à 1000 ; de nombreux électeurs ne résident pas à l’année dans la commune où ils sont inscrits ; l’incidence du vote par procuration et du vote des résidents secondaires est difficilement évaluable ; l’influence des maires reste forte dans les petites communes ; la proximité incite à la dissimulation ou au non choix quand on est interrogé ; seuls 56% des sondés ont assuré être certains de leur choix et affirmé qu'ils ne changeront pas d'avis (de plus en plus d’électeurs ne fixent leur choix que durant les derniers jours voire les dernières heures précédant leur vote. L’enquête a néanmoins apporté des indications importantes.
Ce que suggèrent les intentions de vote
Il est évident que la première place au soir du premier tour et la victoire à l’issue du second se joueront entre Gilles Simeoni et Laurent Marcangeli respectivement crédités de 25% et 23%. Ce qui est d’ailleurs conforté par le fait que l’image de Gilles Simeoni suscite 71% d'opinions favorables devant celle de Laurent Marcangeli (57%). Il se dessine que ni Gilles Simeoni dont certains partisans disaient qu’il était en mesure de « plier le match » dès le premier tour, ni Laurent Marcangeli qui peine àmobiliser l’électorat de droite (en décembre 2017, Jean-Martin Mondoloni et Valérie Bozzi avaient à eux deux totalisé plus de 28% des suffrages exprimés au premier tour), ne seront en mesure d’obtenir seuls une majorité absolue en sièges au second tour. II apparaît que pour gagner Laurent Marcangeli devra impérativement rendre crédible qu’il peut faire mieux et plus vite que la majorité nationaliste sortante car le bilan de celle-ci est favorablement jugé (8% des personnes interrogées le jugent excellent, 56 % bon). Jean-Christophe Angelini crédité de 11% (un peu en deçà de ce qu’il espère) et Jean Charles Orsucci pour peu qu’il réalise dans les urnes les 8% que le sondage lui promet (alors que beaucoup disaient que les 7% du maintien au second tour seraient inatteignables par sa liste) seront en position d’être des alliés à la fois précieux et exigeants pour un prétendant à la victoire finale.
Il semble que la mouvance se réclamant du nationalisme soit aujourd’hui répartie en deux parties sensiblement égales (pesant respectivement 25%) : celle qui adhère à la vision siméoniste d’un dépassement total des enjeux nationalistes pour rassembler un maximum d’électrices et d’électeurs ; celle qui comprenant le Partitu di a Nazione Corsa, Corsica Libera et Core in Fronte, souhaite élargir l’audience nationaliste sans renoncer à évoquer des fondamentaux issus de cinquante ans de luttes sur tous les terrains.
On peut se dire qu’étant respectivement situés à un niveau de 7%, Corsica Libera et Core in Fronte peuvent à la fois nourrir l’espoir d’un maintien au second tour ou craindre d’être éliminés. Il doit être acté la marginalisation de la gauche traditionnelle, celle-ci n’étant plus présente qu’avec une liste communiste qui peinera à dépasser les 5%.
Enfin, il faut souligner l’irruption des écologistes qui, s’ils réalisent le résultat de l’enquête les situant au niveau 8%, seront des acteurs avec lesquels il faudra compter durant toute la future mandature.
Place au terre-à-terre
Outre des indications portant sur ce que pourraient être les résultats du premier tour et sur l’état du champ politique, l’enquête a permis d’identifier ce que sont les principales préoccupations des électeurs. Cependant, il importe tout d’abord de constater que les thématiques Evolution institutionnelles et Revendications identitaires ou spécifiques (autonomie, coofficialité de la langue corse, statut de résident corse, statut fiscal dérogatoire….) sont absentes des préoccupations des personnes interrogées. Qu’une question n’est semble-t-il pas été été posée concernant ces thématiques n’est pas anodin. Cela révèle que les auteurs de l’enquête après avoir analysé le bilan de la majorité nationaliste sortante, découvert les propositions des principales listes et pris le pouls de l’opinion n’ont pas jugé qu’elles représentaient des préoccupations majeures de la population corse.
Il apparaît donc que les personnes sondées sont d’abord préoccupées par ce que seront leurs conditions de vie au quotidien. En effet, le pouvoir d'achat arrive en tête de leurs préoccupations devant les transports, le système de santé, le chômage et l'environnement. Il est aussi révélé que ces personnes sont dans l’attente que, quelle que soit la future majorité territoriale, il soit rapidement apporté des solutions concrètes dans des domaines influant eux-aussi directement sur leur quotidien : le traitement des déchets, l'aménagement du territoire au profit de la ruralité, l’offre de formation, les soins de proximité. A partir des questions posées et des réponses obtenues concernant les préoccupations majeures et les attentes prioritaires, l’enquête a fait émerger une réalité : l’électorat corse est désormais considéré comme n’étant plus en capacité de s’extraire du terre-à-terre et de se batte pour arracher le droit à se construire un destin original.
Sommes-nous sommes-nous en train de devenir une population ?
Pierre Corsi