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Le grand banditisme se restructure

La nature ayant horreur du vide et le grand banditisme appartient à la nature humaine,il y a tout lieu de croire que la nuit rouge au cours de laquelle plusieurs établissements de loisirs et de construction ont été victimes de sinistres
Le grand banditisme se restructure

La nature ayant horreur du vide - et le grand banditisme appartient à la nature humaine - il y a tout lieu de croire que la nuit rouge au cours de laquelle plusieurs établissements de loisirs et de construction ont été victimes de sinistres, signifie l’ouverture d’une campagne de racket par une nouvelle bande.


Le grand vide de la criminalité organisée en Corse


Le juge Falcone avait déclaré à une journaliste du Nouvel Obs combien chaque victoire sur la mafia le réjouissait et le terrorisait en même temps. La joie était aisément compréhensible. La peur était celle que faisait naître l’inconnu. Les branches coupées de la mafia étaient dûment répertoriées, disséquées et finalement détachées du corps criminel. Mais les jeunes pousses, qui avaient souvent contribué à la chute des vieux sarments, étaient à entièrement découvrir afin de les combattre.
Contrairement à ce que répètent ad nauseam beaucoup de Corses sur l’État, les services d’enquête sont remarquablement efficaces… quand ils le désirent. Car j’ai tendance à croire que, dans bien des cas, ils ont préféré laisser les protagonistes s’entre-tuer plutôt que d’intervenir quand ça n’était pas la guerre entre différents services qui empêchait les enquêtes d’aboutir. Mais il faut avouer que depuis quelque temps, les succès policiers s’enchaînent.

La bande ajaccienne attribuée à Guy Orsoni n’existe plus et le Petit Bar a quasiment été mis hors d’état de nuire. Mais, ces succès ajoutés à l’anéantissement de la Brise de Mer, créent un vide sidéral qui suscite hélas des vocations.

Une culture de la compromission


Les sociétés méditerranéennes sont restées pour partie à l’état tribal. On n’y pense pas intérêt général, mais profits particuliers. Et le particulier est chez nous très affectif. Il est celui de la famille, des amis, de la microrégion, du parti (entendons par là le clan).
La Corse n’est pas une exception dans le monde méditerranéen. Cette réalité existe en Italie méridionale, en Grèce, dans les Balkans, en Afrique du Nord et plus généralement en Orient. Mais en Corse, le phénomène est rendu plus prégnant à cause de notre faiblesse démographique.
Si on veut bien mettre de côté les nouveaux arrivants qui ne comprennent rien à notre mentalité (comme ces journalistes continentaux spécialistes de la Corse), notre population avoisine les 200 000 personnes (voire moins) archipelisées en diverses micro régions.
Même le FLNC s’était retrouvé sectorisé une fois passée l’exaltation des premières années. Et cette sectorisation était devenue un ferment de discorde puis de guerre intestine. Notre culture est donc pétrie de conflits et paradoxalement de compromissions. Parce que nous voulons éviter les confrontations, nous acceptons parfois l’insupportable jusqu’à l’instant de l’inévitable rupture.

Un phénomène régional


Le plus étonnant dans cette nuit rouge est sa surface géographique qui couvre la Corse entière. Jusqu’alors la grande criminalité endogène se cantonnait à des secteurs bien délimités. La Brise de Mer œuvrait sur Bastia et descendait jusqu’à Porto Vecchio territoire sans véritable puissance criminelle.
 Les Ajacciens s’en tenaient plus ou moins à leur environnement et de petites bandes criminelles tenaient le Valinco et le Sartenais avec certes des débordements et des transversalités, mais limitées.
Si on en croit les apparences, la nuit rouge a été imaginée et programmée sur la Corse entière. Jusqu’alors, seul le FLNC avait démontré une telle capacité et encore limitée à de rares nuits bleues. On voit mal une nouvelle génération de jeunes voyous soudainement capables de ce qui avait été impossible à leurs aînés.
Le raisonnement que je tiens est évidemment basé sur une intuition et non sur des faits probants. Mais j’ai remarqué combien la criminalité était cohérente. Elle n’est pas mue par le désordre, mais par une série de petits engrenages logiques qui éclairent le mystère de grands effets. Plusieurs cibles visées par les incendies appartenaient à des propriétaires capables de répondre à l’agression. S’attaquer à eux et se signaler par une demande de racket est à coup sûr prendre le risque d’une riposte sanglante.
Il me semble donc qu’il s’agit plutôt d’un message de puissance adressé à de futures victimes qui, elles, seront incapables de résister. Parce que je doute de la capacité de la jeunesse criminelle à parvenir à s’entendre sur un projet d’ensemble, je vois derrière cette nuit rouge la patte de vieux routiers du racket et il ne m’étonnerait pas qu’on trouve là d’anciens soldats perdus du nationalisme perclus de rhumatismes liés par intérêt à de petites mains qui demain, si Dieu leur prête vie, tiendront la Corse.
Mais je le répète mes élucubrations ne reposent sur rien de probant. Cependant je crois que nous assistons à l’émergence d’une nouvelle bande aux ambitions insulaires ce qui est nouveau. Peut-être suis-je totalement dans le faux. L’avenir le dira...

Mais voilà du grain à moudre pour les collectifs antimafia.


GXC
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