"L'oeil" du Palais Fesch . Philippe Costamagna
Philippe Costamagna n'est pas étranger au renouveau d'un lieu patrimonial << Le Palais Fesch >>
« L’oeil » du Palais Fesch !
Directeur du Palais Fesch- musée des Beaux Arts d’Ajaccio- et conservateur des musées de la ville, Philippe Costamagna n’est pas étranger au renouveau d’un lieu patrimonial qu’il a largement contribué à restaurer. Et dont l’image et l’aura ne sont, aujourd’hui, plus les mêmes. Cet homme de 59 ans, en poste depuis quinze ans dans la Cité Impériale est aussi l’auteur de nombreux ouvrages notamment sur l’art italien dont il est l’un des grands spécialistes. Philippe Costamagna est enfin renommé pour être un « oeil » affuté…
Les initiés connaissent parfaitement le langage de l’art et notamment ces hommes dont on dit, en peinture, qu’ils ont l’oeil. Non pas le mauvais ou l’ochju mais ce don si particulier d’identifier, d’un simple regard, une œuvre et son auteur. Un terme équivalent au « nez » pour reconnaître le parfum ou le vin. Et quand on sait qu’il existe seulement une dizaine de ces personnes au monde, on mesure tout le talent de Philippe Costamagna, responsable du Palais Fesch depuis 2006, inclut dans dans ce Top 10. Lui, humble, reste très cartésien et se veut réservé. « Cela demande d’observer simplement de nombreux tableaux, souligne t-il, on emmagasine des tas d’images dans notre cerveau, puis les détails d’une œuvre l’authentifie. »
Très simple selon le conservateur mais unique tout de même. C’est avec la même humilité que Philippe Costamagna refuse toute paternité dans la renaissance du musée Fesch depuis qu’il en est aux commandes. Si cette renommée internationale est très certainement le fruit d’une démarche collective, il en est à l’origine de par, entre autres, ses connaissances en matière de peintures italiennes et plus particulièrement de la Renaissance florentine.
Une renommée internationale
Nommé en 2006 à la Direction du Palais Fesch, Philippe Costamagna y découvre les trésors légués par le Cardinal Fesch notamment les primitifs italiens ou les natures mortes et contribue très largement à la restauration d’un édifice quelque peu « poussiéreux » qui n’attire, à l’époque, pas grand monde. Sa carte de visite fait état d’une thèse en histoire de l’art soutenue en 1994 à l’université Paris IV- Sorbonne- consacrée à Jacopo Carucci dit Pontormo et de nombreux ouvrages tels que Le Cardinal Fesch et l’art de son temps (Gallimard, 2007, co-auteur), « Histoires d’oeil » (Grasset, 2016), Avventure di un occhio (en italien, Johan et Levy, 2017) Les goûts de Napoléon (Grasset, 2021).
En Corse et plus particulièrement dans la région de Vico où il a ses racines (commune de Coggia), on lui doit la découverte de quelques perles : un Francesco Longhi ou un Vasari retrouvés et identifiés il y a une dizaine d’années dans l’église de Vico...Un an avant d’être nommé en Corse, il retrouve un Christ perdu de Bronzino au musée des Beaux Arts de Nice. Dernier chantier en date, la création d’un musée dédié entièrement à l’Empereur
et dont il est l’un des grands artisans...Bref, une « pointure » comme on dit dans le jargon.
Philippe Costamagna : « Ajaccio est la ville napoléonienne par excellence, il suffit de se promener dans les rues pour s’ apercevoir que tout est lié à la famille Bonaparte »
Vous êtes conservateur du musée Fesch depuis quinze ans. Comment mesurez - vous cette évolution aujourd’hui ?
Elle est considérable ! Nous avons procédé à de nombreux changement, des travaux de réhabilitation, une grande campagne de restauration soutenue par les municipalités successives, le tout favorisant l’exposition de plus de tableaux. On a pu donner, à travers cette politique d’exposition, une place importante au niveau national et international au musée. Il était, de par son côté insulaire et malgré l’importance des collections, quelque peu oublié...Sa collection italienne et son fonds napoléonien en font aujourd’hui un lieu à la notoriété internationale. Le musée est cité en exemple dans de nombreux ouvrages spécialisé. Il occupe même une place scientifique très importante.
La « popularisation » des musées à travers « la nuit des musées » ou son ouverture au jeune public n’ajoute t -elle pas à cette notoriété ?
Le fait de populariser se situe à la base. C’est une constante très ancienne qui s’est développée au fil du temps. Ceci étant, nous considérons le secteur pédagogique comme le plus important et nous accueillons de nombreux scolaires tout au long de l’année si les conditions sanitaires le permettent bien sûr. Par ailleurs, diverses actions dans les prisons ou les hôpitaux permettent de familiariser le public corse à l’importance du musée. Mais je pense que les gens en ont conscience…
Le tryptique bibliothèque patrimoniale, musée Fesch et maison Bonaparte, axe culturel et historique majeur de la cité impériale travail t il en commun ?
Il est difficile d’établir un tryptique tant les collections sont différentes. On essaie, toutefois, de travailler ensemble. La bibliothèque accuse toujours du retard dans ses restauration ainsi que ses ouvrages. Quant à la maison Bonaparte, elle vit un peu de son côté.
Quelles perspectives pour le musée Fesch à l’occasion du bicentenaire de la mort de l’Empereur ?
Nous avons mis en place une exposition assez exceptionnelle sur la légende napoléonienne car je souhaitais, à cette occasion, que la ville d’Ajaccio ait la place mémorable qui lui revient. Le musée de l’Armée a créé une exposition sur la mort de l’Empereur « Napoléon n’est plus », nous avons opté pour une exposition sur la légende, c’est ce que les gens connaissent le mieux de Napoléon. Plus de 250 œuvres sont donc exposées sur ce thème avec des prêts incroyables du musée d’Orsay, du Louvre, du musée des Armées...Toutes les icônes de la légende sont présentées à Ajaccio ce qui est assez extraordinaire.
La rentrée prochaine au musée Fesch ?
Elle dépend en grande partie de la situation sanitaire. On travaille comme si tout fonctionnait normalement. L’automne et l’hiver sont plutôt dédiés au pédagogique et au scolaire. Et nous travaillons surtout dans la perspective du musée Napoléon dont l’ouverture est prévue pour 2024.
Où en est ce musée à ce jour ?
Le dossier avance, les financements arrivent puisque l’État attribue le montant demandé, il reste la part de la Collectivité de Corse. Nous lançons, pour notre part, le concours. Le musée sera situé au rez-de – chaussée et au premier étage du bâtiment qui abrite la mairie. Le pré-programme et le programme sont d’ores et déjà prêts. À travers les collections et de nombreux dépôts de l’État, nous allons raconter la destinée des Bonaparte depuis Madame Mère jusqu’à la mort de l’Impératrice Eugénie. Nous allons porter le visiteur par l’outil multimédia à travers une histoire contée par Madame Mère.
Il est important de réhabiliter l’image de l’Empereur dans sa ville natale ?
Ajaccio est la ville napoléonienne par excellence, il suffit de se promener dans les rues pour s’ apercevoir que tout est lié à la famille Bonaparte. D’un point de vue économique, Napoléon est Corse pour le monde entier, c’est l’homme le plus connu au monde, il est incontournable. Et c’est donc un attrait supplémentaire. Même si l’on est profondément indépendantiste, n’oublions pas que Paoli n’a pas ignoré Napoléon...
Directeur du Palais Fesch- musée des Beaux Arts d’Ajaccio- et conservateur des musées de la ville, Philippe Costamagna n’est pas étranger au renouveau d’un lieu patrimonial qu’il a largement contribué à restaurer. Et dont l’image et l’aura ne sont, aujourd’hui, plus les mêmes. Cet homme de 59 ans, en poste depuis quinze ans dans la Cité Impériale est aussi l’auteur de nombreux ouvrages notamment sur l’art italien dont il est l’un des grands spécialistes. Philippe Costamagna est enfin renommé pour être un « oeil » affuté…
Les initiés connaissent parfaitement le langage de l’art et notamment ces hommes dont on dit, en peinture, qu’ils ont l’oeil. Non pas le mauvais ou l’ochju mais ce don si particulier d’identifier, d’un simple regard, une œuvre et son auteur. Un terme équivalent au « nez » pour reconnaître le parfum ou le vin. Et quand on sait qu’il existe seulement une dizaine de ces personnes au monde, on mesure tout le talent de Philippe Costamagna, responsable du Palais Fesch depuis 2006, inclut dans dans ce Top 10. Lui, humble, reste très cartésien et se veut réservé. « Cela demande d’observer simplement de nombreux tableaux, souligne t-il, on emmagasine des tas d’images dans notre cerveau, puis les détails d’une œuvre l’authentifie. »
Très simple selon le conservateur mais unique tout de même. C’est avec la même humilité que Philippe Costamagna refuse toute paternité dans la renaissance du musée Fesch depuis qu’il en est aux commandes. Si cette renommée internationale est très certainement le fruit d’une démarche collective, il en est à l’origine de par, entre autres, ses connaissances en matière de peintures italiennes et plus particulièrement de la Renaissance florentine.
Une renommée internationale
Nommé en 2006 à la Direction du Palais Fesch, Philippe Costamagna y découvre les trésors légués par le Cardinal Fesch notamment les primitifs italiens ou les natures mortes et contribue très largement à la restauration d’un édifice quelque peu « poussiéreux » qui n’attire, à l’époque, pas grand monde. Sa carte de visite fait état d’une thèse en histoire de l’art soutenue en 1994 à l’université Paris IV- Sorbonne- consacrée à Jacopo Carucci dit Pontormo et de nombreux ouvrages tels que Le Cardinal Fesch et l’art de son temps (Gallimard, 2007, co-auteur), « Histoires d’oeil » (Grasset, 2016), Avventure di un occhio (en italien, Johan et Levy, 2017) Les goûts de Napoléon (Grasset, 2021).
En Corse et plus particulièrement dans la région de Vico où il a ses racines (commune de Coggia), on lui doit la découverte de quelques perles : un Francesco Longhi ou un Vasari retrouvés et identifiés il y a une dizaine d’années dans l’église de Vico...Un an avant d’être nommé en Corse, il retrouve un Christ perdu de Bronzino au musée des Beaux Arts de Nice. Dernier chantier en date, la création d’un musée dédié entièrement à l’Empereur
et dont il est l’un des grands artisans...Bref, une « pointure » comme on dit dans le jargon.
Philippe Costamagna : « Ajaccio est la ville napoléonienne par excellence, il suffit de se promener dans les rues pour s’ apercevoir que tout est lié à la famille Bonaparte »
Vous êtes conservateur du musée Fesch depuis quinze ans. Comment mesurez - vous cette évolution aujourd’hui ?
Elle est considérable ! Nous avons procédé à de nombreux changement, des travaux de réhabilitation, une grande campagne de restauration soutenue par les municipalités successives, le tout favorisant l’exposition de plus de tableaux. On a pu donner, à travers cette politique d’exposition, une place importante au niveau national et international au musée. Il était, de par son côté insulaire et malgré l’importance des collections, quelque peu oublié...Sa collection italienne et son fonds napoléonien en font aujourd’hui un lieu à la notoriété internationale. Le musée est cité en exemple dans de nombreux ouvrages spécialisé. Il occupe même une place scientifique très importante.
La « popularisation » des musées à travers « la nuit des musées » ou son ouverture au jeune public n’ajoute t -elle pas à cette notoriété ?
Le fait de populariser se situe à la base. C’est une constante très ancienne qui s’est développée au fil du temps. Ceci étant, nous considérons le secteur pédagogique comme le plus important et nous accueillons de nombreux scolaires tout au long de l’année si les conditions sanitaires le permettent bien sûr. Par ailleurs, diverses actions dans les prisons ou les hôpitaux permettent de familiariser le public corse à l’importance du musée. Mais je pense que les gens en ont conscience…
Le tryptique bibliothèque patrimoniale, musée Fesch et maison Bonaparte, axe culturel et historique majeur de la cité impériale travail t il en commun ?
Il est difficile d’établir un tryptique tant les collections sont différentes. On essaie, toutefois, de travailler ensemble. La bibliothèque accuse toujours du retard dans ses restauration ainsi que ses ouvrages. Quant à la maison Bonaparte, elle vit un peu de son côté.
Quelles perspectives pour le musée Fesch à l’occasion du bicentenaire de la mort de l’Empereur ?
Nous avons mis en place une exposition assez exceptionnelle sur la légende napoléonienne car je souhaitais, à cette occasion, que la ville d’Ajaccio ait la place mémorable qui lui revient. Le musée de l’Armée a créé une exposition sur la mort de l’Empereur « Napoléon n’est plus », nous avons opté pour une exposition sur la légende, c’est ce que les gens connaissent le mieux de Napoléon. Plus de 250 œuvres sont donc exposées sur ce thème avec des prêts incroyables du musée d’Orsay, du Louvre, du musée des Armées...Toutes les icônes de la légende sont présentées à Ajaccio ce qui est assez extraordinaire.
La rentrée prochaine au musée Fesch ?
Elle dépend en grande partie de la situation sanitaire. On travaille comme si tout fonctionnait normalement. L’automne et l’hiver sont plutôt dédiés au pédagogique et au scolaire. Et nous travaillons surtout dans la perspective du musée Napoléon dont l’ouverture est prévue pour 2024.
Où en est ce musée à ce jour ?
Le dossier avance, les financements arrivent puisque l’État attribue le montant demandé, il reste la part de la Collectivité de Corse. Nous lançons, pour notre part, le concours. Le musée sera situé au rez-de – chaussée et au premier étage du bâtiment qui abrite la mairie. Le pré-programme et le programme sont d’ores et déjà prêts. À travers les collections et de nombreux dépôts de l’État, nous allons raconter la destinée des Bonaparte depuis Madame Mère jusqu’à la mort de l’Impératrice Eugénie. Nous allons porter le visiteur par l’outil multimédia à travers une histoire contée par Madame Mère.
Il est important de réhabiliter l’image de l’Empereur dans sa ville natale ?
Ajaccio est la ville napoléonienne par excellence, il suffit de se promener dans les rues pour s’ apercevoir que tout est lié à la famille Bonaparte. D’un point de vue économique, Napoléon est Corse pour le monde entier, c’est l’homme le plus connu au monde, il est incontournable. Et c’est donc un attrait supplémentaire. Même si l’on est profondément indépendantiste, n’oublions pas que Paoli n’a pas ignoré Napoléon...