Vetr'Arte, quand le verre reflète le Monde
Jocelyne Boyer est artisane verrier. Depuis 2015, dans son atelier, Vetr’Arte à Belgudè, elle transforme cette matière qui, un jour, s’est révélée à elle, « comme une illumination ».
Vetr’Arte
Quand le verre reflète le Monde
Jocelyne Boyer est artisane verrier. Depuis 2015, dans son atelier, Vetr’Arte à Belgudè, elle transforme cette matière qui, un jour, s’est révélée à elle, « comme une illumination ».
Vêtue de sa combinaison de travail, casque sur les oreilles et masque de protection (pour la poussière celui-ci), Jocelyne est concentrée sur la tâche délicate qu’elle doit exécuter pour finaliser sa création. Après avoir moulé un buste de femme, il lui faut traverser délicatement, à l’aide d’une mèche mécanique, la paroi de verre. Cette maîtrise est le fruit d’un long apprentissage qui, au départ, n’avait pourtant pas été envisagé. Durant une quinzaine d’années, Jocelyne est employée à la Casa di l’Artigiani de Pigna. Elle y côtoie des artisans et est sensibilisée aux différentes matières et savoir-faire qu’elle observe avec attention : la céramique, le bois, le textile. Quand elle décide de passer de l’autre côté, de créer de ses propres mains, les tentatives se multiplient jusqu’au jour où elle découvre la verrerie. « C’est le verre qui m’a choisie, confie-t-elle. J’ai ressenti au premier contact, une intense émotion, comme une véritable révélation. Cela peut paraître un peu mystique aux premiers abords ! Mais c’est surtout à partir de ce moment précis que j’ai su, pour la première fois de ma vie, que j’étais réellement à ma place. »
Jocelyne décide de parfaire ses acquis et suit, en 2012, une formation au Centre européen de recherches et de formation aux Arts verriers (CERFAV), à Vannes le Châtel, en région lorraine, haut lieu du travail du verre et du cristal depuis plus de 250 ans. À son retour, l’opportunité lui sourit ! Avec le soutien de la commune, elle inaugure son grand atelier dans le village de Belgudè en Balagna. Il est, à la fois, son atelier de fabrication mais aussi son espace d’exposition et de vente. Avec la crise sanitaire, la production de sa matière de prédilection, le très singulier verre « Massa », s’est raréfiée pour être définitivement interrompue. Pour autant, la créatrice s’est adaptée et continue de façonner du verre « teinté dans la masse » (plaque de verre coloré mais parfaitement transparent). Côté technique, il n’est pas soufflé mais fusionné et thermoformé après cuissons respectives. Une première permettra l’assemblage des différentes pièces de verre en superposition et dans un second temps, le moule fixera l’empreinte. Le sablage, quant à lui, densifie la couleur et creuse le matériau pour faire apparaître le motif souhaité.
« Il faut entrer dans la matière, la provoquer, l’étirer, chercher sa limite, c’est presque un rapport charnel !
» livre l’artiste.
Car il s’agit bien, avant tout, d’une démarche intellectuelle pour Jocelyne, avec la recherche constante de nouvelles inspirations, modèles, pour interroger nos sociétés actuelles. Le thème du corps féminin est récurrent chez l’artisane. Il est comme le fil conducteur de ses préoccupations plastiques. Il est toujours présent dans sa nouvelle collection autour de la Liberté, où il s’harmonise avec le motif végétal. « Une commande de la Communauté des communes de L’Isula-Balagna m’a permis d’intégrer une œuvre de 4 mètres de long, représentant un végétal, sur un plafond. La forme et les couleurs de cette plante insulaire (il est laissé au soin du visiteur de la découvrir – ou de l’imaginer !) m’interpelle et j’avais envie de travailler sur cette Nature, riche et en constante évolution » explique Jocelyne. Cet hiver, moment privilégié pour ses ébauches, réflexions, la créatrice se penchera sur la notion d’identitaire, avec des pièces autour de la représentation de la tête de Maure ou encore de l’illustre Pasquale Paoli. Avec somme toute, une crainte pour l’avenir : « Si cette crise ne cesse pas, les artisans d’art vont être lourdement impactés. À nous de repenser nos désirs, les choix que nous devons faire, pour que le futur préserve nos Libertés, le Beau et les métiers de tradition » conclut-elle.
Comme un appel collectif à la sagesse.
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Anna Massari
Atelier Vetr’arte,
Belgudè
www.atelier-vetrarte.fr
portrait : © Lea Eouzan-Pieri création : © Vetr’Arte
Quand le verre reflète le Monde
Jocelyne Boyer est artisane verrier. Depuis 2015, dans son atelier, Vetr’Arte à Belgudè, elle transforme cette matière qui, un jour, s’est révélée à elle, « comme une illumination ».
Vêtue de sa combinaison de travail, casque sur les oreilles et masque de protection (pour la poussière celui-ci), Jocelyne est concentrée sur la tâche délicate qu’elle doit exécuter pour finaliser sa création. Après avoir moulé un buste de femme, il lui faut traverser délicatement, à l’aide d’une mèche mécanique, la paroi de verre. Cette maîtrise est le fruit d’un long apprentissage qui, au départ, n’avait pourtant pas été envisagé. Durant une quinzaine d’années, Jocelyne est employée à la Casa di l’Artigiani de Pigna. Elle y côtoie des artisans et est sensibilisée aux différentes matières et savoir-faire qu’elle observe avec attention : la céramique, le bois, le textile. Quand elle décide de passer de l’autre côté, de créer de ses propres mains, les tentatives se multiplient jusqu’au jour où elle découvre la verrerie. « C’est le verre qui m’a choisie, confie-t-elle. J’ai ressenti au premier contact, une intense émotion, comme une véritable révélation. Cela peut paraître un peu mystique aux premiers abords ! Mais c’est surtout à partir de ce moment précis que j’ai su, pour la première fois de ma vie, que j’étais réellement à ma place. »
Jocelyne décide de parfaire ses acquis et suit, en 2012, une formation au Centre européen de recherches et de formation aux Arts verriers (CERFAV), à Vannes le Châtel, en région lorraine, haut lieu du travail du verre et du cristal depuis plus de 250 ans. À son retour, l’opportunité lui sourit ! Avec le soutien de la commune, elle inaugure son grand atelier dans le village de Belgudè en Balagna. Il est, à la fois, son atelier de fabrication mais aussi son espace d’exposition et de vente. Avec la crise sanitaire, la production de sa matière de prédilection, le très singulier verre « Massa », s’est raréfiée pour être définitivement interrompue. Pour autant, la créatrice s’est adaptée et continue de façonner du verre « teinté dans la masse » (plaque de verre coloré mais parfaitement transparent). Côté technique, il n’est pas soufflé mais fusionné et thermoformé après cuissons respectives. Une première permettra l’assemblage des différentes pièces de verre en superposition et dans un second temps, le moule fixera l’empreinte. Le sablage, quant à lui, densifie la couleur et creuse le matériau pour faire apparaître le motif souhaité.
« Il faut entrer dans la matière, la provoquer, l’étirer, chercher sa limite, c’est presque un rapport charnel !
» livre l’artiste.
Car il s’agit bien, avant tout, d’une démarche intellectuelle pour Jocelyne, avec la recherche constante de nouvelles inspirations, modèles, pour interroger nos sociétés actuelles. Le thème du corps féminin est récurrent chez l’artisane. Il est comme le fil conducteur de ses préoccupations plastiques. Il est toujours présent dans sa nouvelle collection autour de la Liberté, où il s’harmonise avec le motif végétal. « Une commande de la Communauté des communes de L’Isula-Balagna m’a permis d’intégrer une œuvre de 4 mètres de long, représentant un végétal, sur un plafond. La forme et les couleurs de cette plante insulaire (il est laissé au soin du visiteur de la découvrir – ou de l’imaginer !) m’interpelle et j’avais envie de travailler sur cette Nature, riche et en constante évolution » explique Jocelyne. Cet hiver, moment privilégié pour ses ébauches, réflexions, la créatrice se penchera sur la notion d’identitaire, avec des pièces autour de la représentation de la tête de Maure ou encore de l’illustre Pasquale Paoli. Avec somme toute, une crainte pour l’avenir : « Si cette crise ne cesse pas, les artisans d’art vont être lourdement impactés. À nous de repenser nos désirs, les choix que nous devons faire, pour que le futur préserve nos Libertés, le Beau et les métiers de tradition » conclut-elle.
Comme un appel collectif à la sagesse.
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Anna Massari
Atelier Vetr’arte,
Belgudè
www.atelier-vetrarte.fr